Mort pour la France

Isidore YVON (1881/1915)

 

Fils de Jean Marie, marin-pêcheur, né à Groix en 1820 et en seconde noce, de Marie Françoise KERLIR, une lorientaise née en 1842, résidant à Groix en 1869, mariés à Groix en avril 1869, résidant dans le village de Kerlo bras, Isidore YVON est né le 13 novembre 1881 à Groix dans la village de merlo Bras. C'est le petit dernier d'une fratrie de 9 enfants, issu de deux ménages. Il est orphelin de père, mort en mer, à l'âge de 9 mois.

 

Après quelques années passées sur les bancs de l'école, le drame de son père n'entame en rien sa détermination. Il sera pêcheur comme lui et fait son apprentissage vers l'âge de 12/13 ans comme mousse, puis comme matelot. 

 

A l'époque de son conseil de recrutement en 1900, il est déjà inscrit maritime sous le matricule / Groix. Jugé bon pour le service, il effectue son service militaire au 3ème dépôt des équipages de la flotte à Lorient, à partir du 13 novembre 1901, le jour anniversaire de ses 20 ans.

 

Dès qu'il est rendu à la vie civil, il reprend ses activités de marin-pêcheur.

 

Isidore se marie en novembre 1907 avec une groisillonne, d'une famille de meuniers,  Maria Valentine KERSAHO, née en 1885 et résidant le village de Kerdurand.

 

Isidore YVON décède à Groix, le 16 octobre 1915.


A la mobilisation, en août 1914, Isidore YVON est rappelé au 3ème dépôt des équipages de la flotte à Lorient.  Dans les premiers jours, il ne reçoit pas d'affectation, puis comme beaucoup de marins qui ne trouvent pas place sur les navires et les bâtiments de défense côtière, il est mis à disposition de l'Armée de terre. Il est alors affecté le 16 décembre 1914  au 2ème R.I.C à Brest d'abord pour une période de formation. Puis envoyé rejoindre ce régiment sur le front, probablement avec le contingent de renfort qui arrive le 11 mars 1915, en compagnie de Joseph Marie BARON, Ange CAUDAL, Émile BARON, Joseph Marie BERNARD, Pierre GROSSIN, Pierre BLANCHARD, Élie EVEN, Yves Marie JAFFRÉ et Yves LANCO, neuf autres groisillons. Celui-ci se trouve à cette date dans le secteur de Servon (Marne), à l'ouest du massif d'Argonne. 

 

un groupe de soldats du 2ème RIC pendant leur  déplacement de Brest vers le front

Massif d'Argonne

 

A la suite de cette saignée, les débris du 2ème R.I.C tiennent toujours, le 15 juillet, le secteur Y, renforcés par quatre compagnies du 155ème R.I. 

Le régiment est relevé le 16 et va au repos à la Neuville-au-Pont, où il reste jusqu'au 26 juillet pour se réorganiser.

 

Un bataillon se rend dans le secteur 188 le 27 juillet, relever un bataillon du 5ème R.I.C. dans le centre de résistance A.

 

Le 11 août, le 1er bataillon du 2ème R.I.C., à l'effectif moyen de 160 fusils par compagnie, venait de passer six jours en première ligne dans le centre de résistance A, où il avait eu à repousser une petite attaque allemande, et avait été relevé dans la nuit du 10 au 11 août occupait les abris des Territoriaux et de la Houyettes, lorsque commença l'attaque ennemie sur les centres B et C. Le bataillon se porta à la tranchée du Pavillon en C que les allemands venait de forcer.

 

Vers 9 h. 30, La 1ère compagnie contre-attaqua, à la baïonnette, des Alle-mands qui s'avançaient par un boyau vers nos tranchées en se couvrant par une pluie de pétards. Mais seuls, un officier et 3 hommes  attei-gnirent l'ennemi dans son boyau, le reste de la fraction ayant été arrêté après des pertes relativement fortes par des feux d'une mitrailleuse allemande.   

 

Par la suite une section de la 2ème compagnie, fut appelée de la tranchée dite de « Réserve » au fuseau C1 pour renforcer le 6ème colonial, et maintenir ainsi la liaison avec B3. Dans l'après-midi, une section de la 1ère compagnie s'installait dans les trous d'obus et rétablissait ainsi la liaison entre C1 et C2. Dès ce moment, une ligne continue reliait B3 à C3 et la fin de la journée se marquait par le gain en C3 de quelques éléments de boyaux conquis à coups de pétards et l'organisation dans ce même fuseau de quelques barrages défensifs.

 

Le 12 août, des ordres d'attaque vigoureuse et rapide, furent donnés pour que l'ennemi fatigué n'ait pas le temps de se ressaisir et de s'organiser défensivement, Ce fut une attaque à coups de pétards sur chacune des extrémités du boyau et une attaque de front venant de l'est sur le boyau.

Elles furent exécutées vers 2 h. 45.

 

La première tentative exécutée pourtant avec énergie, échoue : l'attaque du barrage nord, qui était la plus facile, manquait de bons grenadiers. L'attaque du barrage sud se heurta à une organisation défensive sérieuse (blockhaus, mitrailleuse, lance-bombes)  l'attaque de front progressa jusqu'au layon Servon-Bagatelle, fit , en subissant des pertes, un deuxiè-me bond, jusqu'à une ligne jalonnée par des trous d'obus, mais ne put dépasser cette ligne au delà de laquelle se trouve une zone difficile d'arbres abattus et hachés par les obus et où les assaillants recevaient du boyau ennemi, une avalanche de grenades, pétards, bombes et rafales de mitrailleuses. Une deuxième attaque sur ce boyau fut faite vers 14 h qui échoua pour les mêmes raisons que le matin. Le groupe d'attaque se replia dans sa tranchée de départ, tout en se couvrant par des postes installés au layon Servon-Bagatelle. Il avait subi de fortes pertes. Dans la nuit du 12 au 13, une troisième attaque fut conduite sur la partie centrale et la partie sud du boyau; elle subit le même sort que les deux premières.

 

Le lieutenant-colonel prescrivit alors de renoncer à toute attaque de front, de n'attaquer que par les barrages et de commencer contre le barrage sud une galerie de mine. Pendant toute la journée du 13 et la nuit du 14, les troupes restent sur les mêmes positions. L'ennemi bombarde violemment les lignes. Le concours de notre artillerie fait défaut. La relève a lieu dans la nuit du 13 au 14.

 

Le 14 août, le régiment est relevé et vient se reposer à la Neuville-au-Pont. Le colonel et le capitaine major reconstituent et remettent un peu d'organisation dans les compagnies, dont quelques unes ont perdu tous leurs officiers et ont été fortement éprouvées. Le régiment a eu en effet 15 officiers blessés et un tué dans les journées de combat des 11, 12 et 13 août. Il a perdu aussi 10 sous-officiers tués, 24 blessés et 47 soldats tués, 171 disparus, et 341 blessés.

 

Le 15 août, tout le régiment est transporté au repos à Cheppy en camions automobiles. Il quitte Cheppy le 27 et se rend à La Cheppe. Il est employé jusqu'au 16 septembre à faire quelques travaux d'aménagement aux tranchées de première ligne et aux boyaux de communication.

 

Le J.M.O. du 2ème R.I.C. ayant disparu, on ne sait à quelle date Isidore YVON est évacué pour cause de maladie. Il apparait pourtant sur sa fiche matricule qu'il est "dispensé" à compter du 15 septembre étant considéré comme soutien de famille ?

 

photo de la tombe d'Isidore YVON

(quelqu'un de Groix aurait-il la gentillesse d'en prendre une et de me l'envoyer par mail)

Mais revenons un peu en arrière. Le 2ème RIC a son dépôt à Brest, il est membre de la 1ère Brigade Coloniale rattachée à la 3ème Division Coloniale. Il dispose de 3 bataillons.

 

En août 1914, le 2ème RIC participe à la bataille des frontières en Lorraine et en Belgique. Il combat à Rossignol le 22 août. Durant les combats, le régiment perd 2850 hommes mis hors de combat, puis à Villers-sur-Semoy. Là, craignant qu’il tombât au main de l’ennemi, le drapeau du régiment est enfouit en terre par le soldat LE GUIDEC. Il retraite par Cernay-en-Dormois, Ville-sur-Tourbe puis bois de Ville, il combat à la ferme de Touanges et à Servon. 

 

Le régiment est reconstitué le 17 septembre, avec seulement 2 bataillons, suite aux pertes des précédents combats. Il est dans le secteur de Minaucourt, cote 180, Massiges de la fin septembre à novembre. Il passe en Argonne vers le 13 novembre: bois de la Gruerie, le Four-de-Paris, Chaudefontaine, Fontaine-aux-Charmes, puis dans le secteur de Servon de janvier 1915 jusqu’au 16 juin. Durant cette période, le secteur est "calme" avec quand même quelques tués et blessés chaque jour, et le 2ème RIC se relaie tous les 5 jours avec le 1er RIC. Il ne se passe pas d'évènements très importants, sauf le 29 janvier 1915, où le 3ème bataillon est alerté et engagé dans la partie sud-ouest du bois de la Gruerie pour coopérer avec la 40ème D.I. à une contre-attaque dirigée contre les Allemands qui ont pris des tranchées.

 

Après 3 semaines d'un repos bien mérité, du 16 juin au 13 juillet, le régiment se prépare à une nouvelle attaque dans le secteur du bois Baurain. Le 13 juillet au soir, les troupes d'attaque occupent leurs positions de combat, dans le but de les reconnaitre. Le mouvement terminé vers 20 h, les troupes reprennent leurs positions de départ. Le 14 juillet, à 4 h du matin, les bataillons d'assaut sont à leurs postes. A 8 h15, ils s'élancent à l'assaut des positions ennemies...

... Pour la suite de la description de l'attaque voir le fiche d'Émile Marie BARON

 

Dans ces combats du Bois Baurain du 14 juillet 1915, le régiment a eu 28 officiers et 1.322 hommes tués, blessés ou disparus dont 7 groisillons : Emile Marie BARONJoseph BERNARDPierre BLANCHARDÉlie EVENYves LANCOPierre LE DREFF, et Eugène STÉPHAN et sans doute de nombreux blessés. Journée noire pour l'île de Groix et à y regarder de plus près, cette attaque n'a servi à rien !!!  Isidore YVON a échappé à cette tuerie. avait-il été évacué avant ou membre d'une compagnie plus épargnée ?

 

Selon les documents dont nous disposons, Isidore YVON est décédé des suites d'une fièvre typhoïde contractée au service, le 16 octobre 1915, dans son domicile à Groix, village de Kerdurand. Son décès est déclaré par sa soeur Marie Anne et son frère Jean Marie.

 

Il est mort avant sa démobilisation effective, puisqu'on peut lire dans son acte de décès, rédigé par le maire de Groix, qu'il est encore soldat au 2ème R.I.C.

 

Toutefois, il ne bénéfice pas de la mention "Mort pour la France", ce qui parait particulièrement injuste, car il a participé, sans aucun doute, aux combats du printemps et de l'été 1915 et qu'il a contracté sa maladie à cause des mauvaises conditions d'hygiène des installations et des mauvaises conditions climatiques auxquelles il était exposé dans les tranchées. 

 

Son nom ne figure ni sur le tableau de l'Église, ni clairement sur le Monument aux Morts, sauf à considérer que le YVON sans prénom lui correspond. Le seul mémorial sur lequel il est clairement identifié, c'est celui qui est installé dans les locaux de l'Écomusée.

 

Il est naturellement inhumé dans le cimetière de Groix

 

extrait du mémorial de l'Écomusée