Mort pour la France

Charles Marie SIMON  (1881 / 1915)

 

Fils, né officiellement de père inconnu * et de Marie Anne SIMON, une groisillonne, née en 1850, veuve de Prudent GOURONC, mort en mer un an après leur mariage, Charles Marie SIMON est né le 12 février 1881 à Groix, dans le village de Quelhuit. il est le 3ème enfant d'une famille recomposée de 4.

 

* le père était probablement connu, mais Marie-Anne SIMON ne pouvait pas se marier et son enfant pas reconnu légalement, car le jugement déclaratif de décès n'a été prononcé que le 8 août 1821, soit 47 ans après la disparition de Prudent.

 

Après quelques années sur les bancs de l'école, il fait son apprentissage de marin-pêcheur, d'abord en s'embarquant comme mousse vers l'âge de 12/13 ans puis comme matelot.

 

Lorsqu'il passe devant la commission de recru-tement en 1900, il est déjà inscrit maritime sous le matricule n° 1534 / Groix.

 

Il est levé (incorporé) pour effectuer son service militaire le 9 octobre 1901 au 3ème dépôt des équipages de la flotte à Lorient. Son matricule au recrutement est le 2072 / Lorient. Embarqué sur les navires de servitude du port de Lorient du 29 janvier au 3 octobre 1902. Rendu à la vie civile le 9 octobre 1902, en congé exceptionnel comme soutien de famille.

 

Il reprend ses activités à la pêche. En 1909, le 5 mai, Charles SIMON se marie avec une veuve groisillonne, commerçante (son premier mari, Jacques NOEL est mort en mer en 1904) nommée Sophie Anne YVON, née à Groix, dans le village de Kermarec, en mars 1883.

 

Ils s'installent au bourg de Loctudy et auront 3 enfants.

 

Charles SIMON décède officiellement le 22 juin 1915 dans la péninsule de Gallipoli en Turquie.


 

En 1914, Charles SIMON qui a 33 ans a été appelé dans les troupes de réserve de la Marine, au 3ème dépôt des équipages de la flotte de Lorient, mais la marine n'a pas de mission à lui confier, il est donc versé dans l'Armée de terre, le 28 janvier 1915.

 

Charles est affecté au 6ème R.I.C., stationné au fort Sainte Irénée de Lyon où il arrive le 21 février 1915 pour une période de formation. A l'issue de celle-ci, il est affecté au 6ème R.M.I.C le 13 mai 1915 (qui deviendra le 56ème RIC le 16 août 1915) pour rejoindre le front avec un contingent de renfort. Il fait le voyage en compagnie d'autres groisillons: Ange Joseph et Victor BARON, son cousin, Jean François DIBERDER, Théodore LANCO. Il est affecté, à la ? compagnie (? bataillon).

 

Lorsqu'il arrive, le général Gouraud vient de prendre (14 mai 1915, ) le commandement du corps expéditionnaire français, réorganise les positions et fait reprendre l'offensive le 1er juin. Gouraud ordonne de «durer» face aux Turcs désormais solidement installés sur le pic d’Achi Baba 8 à 9 km du cap Hellès.

 

Sans succès, les assauts successifs ne parviennent pas à percer les lignes turques. La nuit, les soldats alliés subissent même les contre-attaques de commandos turcs qui les attaquent silencieusement pour égorger les guetteurs dans les tranchées. Les côtes de la péninsule de Gallipoli sont un gigantesque cimetière où des milliers de corps pourrissent sous un soleil torride.

 

Alors qu'il devait allé au repos, le 6ème RMIC est rappelé en renfort, cette fois du côté européen du détroit. Et les Turcs résistent toujours.

 

Le 1er mai, les turcs ont décidé une offensive générale pour rejeter à l'eau tout le corps expéditionnaire. Le 6ème RMIC s'illustrera comme toutes les autres unités et cette offensive sera un échec pour eux.

Les Turcs après cet échec n'abandonnent pas la partie; leurs assauts se continuent sans interruption, sans considération de pertes sur toute la ligne, jusqu'au matin 3 mai, mais le front après l'intervention du 6ème Mixte reste inébranlable et le 5 ce sont les Anglo-Français ravitaillés et renforcés qui passent à leur tour à l'offensive; offensive lente et méthodique, prodigue en moyens matériels mais ménagère d'hommes.

 

Les 8 et 9 mai, le 6ème Mixte participe à une grande attaque, au cours de laquelle il réalise une nouvelle avance qui lui fait atteindre les pentes du fameux «Kérévès Déré » ravin abrupt dont les Turcs ont très solidement organisé la défense.

 

C'est après cette attaque que le contingent de renfort avec Charles SIMON,  Victor et son cousin, Ange BARON, Jean DIBERDER, Théodore LANCO, rejoignent leur régiment.

 

A la naissance du ravin se trouve un fortin turc que la position et les défenses rendent imprenables d'assaut. Trois sections, constituées de 34 Français et 32 Sénégalais, du 6ème RMIC montent une opération qui permet, le 28 mai, de prendre à l’arme blanche le fortin de Kérévès Déré avec des pertes jugées raisonnables (un seul mort et 7 blessés). Gouraud et Hamilton s’inspirent de ce succès pour préparer ensemble l’attaque du 4 juin sur tout le front. L’assaut brusqué du 4 juin est un échec, de l’aveu même de Gouraud. Des tranchées turques ont certes été prises, mais l’artillerie des alliés s’avère insuffisante pour tenir les forces ennemies à distance. La bataille se prolonge pendant 2 jours mais les alliés doivent admettre qu’ils ne viendront pas à bout des Turcs. Ils ont gagné près de 300 mètres mais au prix de plus de 15 000 hommes, dont 2 500 Français.

 

Charles Marie SIMON disparait lors du premier jour de l'assaut pour tenter de conquérir le Mont Achibaba, le 21 juin 1915. Il a plus de 34 ans et laisse une veuve et 3 orphelins, dont le plus jeune a, à peine, 3 ans.

 

Bien que sa fiche matricule indique sa disparition le 21 juin, le jugement déclaratif que prononce le tribunal de Lorient arrête sa "Mort pour la France" au 22 juin 1915. Ce jugement en date du 11 mai 1921 est retranscrit dans le registre d’état-civil de la commune de Groix à la date du 27 mai 1921.

 

Les autorités militaires ne connaissent pas son lieu d'inhumation. Si son corps a été retrouvé, il n'a pas pu être identifié et a été inhumé dans un ossuaire. Probablement dans l'un des 4 ossuaires de Sedd Ul Barh où reposent environ 10 000 soldats inconnus.

 

Son nom est gravé sur le Monument aux morts de Groix, sur la plaque de l’église (à la date du 21 juin 1915) et sur le mémorial de l'écomusée.

 

 

Charles SIMON, sera honoré, à titre posthume de la Croix de guerre avec une étoile de bronze.

 

 

Le 6ème Régiment Mixte d’infanterie coloniale (R.M.I.C.) a été créé le 1er mars 1915, composé d'un bataillon du 6ème R.I.C. et des 3ème et 4ème bataillons sénégalais du Maroc, deux bataillons d'élite. Le bataillon européen vaut surtout par ses cadres; la plupart des hommes de celui-ci sont en effet des réformés d'avant guerre, leur instruction a été hâtive, ils n'ont pas encore vu le feu.

 

Le 6ème Régiment Mixte d’infanterie coloniale appartient à la 2ème brigade coloniale (avec le 4ème RMIC) intégrée à la 1ère division d'infanterie du Corps expéditionnaire d'Orient (C.E.O.). Il devient le 56ème Régiment d’Infanterie coloniale, le 16 août 1915.

 

Le 6ème RMIC est rassemblé à Bizerte (au mois de mars) puis transféré à l’île de Lemnos (où il stationne du 17 au 25 mars 1915), transféré à Alexandrie en Egypte de la fin mars au début avril. Embarqué, à Alexandrie, le 16 avril, le régiment fait escale sur l'île de Skyros puis à Moudros (île de Lemnos) avant le grand débarquement.

 

Le débarquement à Gallipoli, auquel participe le 6ème RMIC, le 25 avril 1915, marque véritablement le point de départ des opérations terrestres aux Dardanelles. Le régiment ( avec le 4ème RMIC) débarque sous le feu ennemi à Koum-Kale, il prend la ville Koum-Kale et de sa forteresse (25-26 avril) et réembarque le 26 avril la mission terminée, qui était de prendre la forteresse et de tenir 3 jours, pour protéger, avec de l’artillerie, le gros des troupes qui débarquaient aux Dardanelles. Les Turcs cessent le combat après avoir perdu 2.000h. durant ces combats.

 

Ce n'est que le 1er mai 1915 que les alliés réussissent à installer véritablement leur tête de pont. Elle reste très fragile par son absence de profondeur. L'évacuation des blessés, le débarquement de nouvelles troupes ou de matériel se fait sous le feu ottoman. Il n'existe pas de secteur calme et chacun, du soldat de première ligne au général de division, court un perpétuel danger. La situation perturbe même le ravitaillement qui ne peut bientôt plus s'effectuer que de nuit.

 

 

Les combats se multiplient au cours du mois de juin 1915, notamment les 8 et 9 juin. Alors que les Britanniques attaquent en direction de Krithia, (centre de la péninsule), les Français cherchent à prendre l’éperon de Kérévès Déré (au pied du Mont Achi Baba). Vingt jours après la grande attaque des 8 et 9 mai, le régiment s'illustre une fois de plus par une nouvelle avance à l'ouest du ravin. Malheureusement, il est tellement décimé après cette action qu'il doit être envoyé au repos à l'arrière, C’est durant ces deux journées qu’Ange BARON, sera blessé par des éclats d'obus, puis qu’il décède des suites de ses blessures. Le 21 juin 1915, Gouraud confie l’exécution principale d'un assaut au colonel Girodon avec le 176ème, le 6ème RMIC, en soutien. L’attaque est menée à l’aube, les Français prenant le «Haricot» et le «Quadrilatère», mais dès 7 h, les troupes doivent se replier sur leur point de départ. Les textes officiels veulent croire à une victoire en fin de journée. Les troupes repartent à l’assaut les 22 et 23 juin. Mais au bout de 3 jours de combats, le décompte est macabre: 3 200 hommes sont mis hors de combat dont quelque 500 ont été tués. Gouraud déplore surtout la mort de 21 officiers et la blessure de 46 autres. C'est au cours de cette funeste journée que six groisillons sont tués ou disparaissent. C'est le cas de Charles SIMON dès le premier jour.

 

Le 30 juin, les forces anglaises, néo-zélandaises, australiennes et françaises combinées enlèvent de nouveau l’important ouvrage turc dit du «quadrilatère» tandis que Gouraud est grièvement blessé. Mais pendant les jours suivants, attaques et contre-attaques meurtrières se succèdent sans victoire décisive.

 

Pour la campagne des Dardanelles, il y eut près de 90 000 morts et 170 000 blessés du côté des Turcs et 50 000 morts et 100 000 blessés du côté des Alliés, parmi lesquels 12 000 soldats français morts au champ d'horreurs et 20 000 autres blessés. Charles SIMON fut l’un d’eux.