Mort pour la France

Charles Louis M. LE BOULAIRE  1894/1915

 

Fils de Joseph, un cultivateur / charretier, né à Pluneret (Morbihan) en 1863 et de Jeanne Marie HENO, née à Riantec en 1867, mariés à Groix en novembre 1891, domicilié dans le village de Port-Tudy, Charles Louis Marie LE BOULAIRE est né à Groix dans le villagede Port-Tudy le 12 septembre 1894. Il est le second enfant d'une fratrie de quatre.

 

Il passe son conseil de révision vers septembre 1913, il est déclaré "bon pour le service armé", mais il obtient un sursis d'incorporation.

 

Il exerce le métier de voilier.

 

Charles Louis Marie LE BOULAIRE décède le 21 juin 1915, dans la commune des Éparges.


 

A la déclaration de la guerre, en août 1914, Charles Louis LE BOULAIRE n'a pas encore 20 ans.

 

Il n'est incorporé que le 13 septembre 1914, le lendemain de son 20ème anniversaire. Il est affecté au 137ème R.I. dont le dépôt se trouve à la caserne Du Chaffault à Fontenay-le-Comte en Vendée.

 

Il y passe quelques mois afin d'apprendre le métier de soldat.

 

bois de la Gruerie

 

Après quelques semaines de repos à Charmontois, qui sont largement occupés par des exercices et des entrainements le régiment se dirige sur Somme-Tourbe et Mesnil-les-Hurlus. Le 28 février, le régiment tout entier reçoit l'ordre d'attaquer.

 

Après une violente mais courte préparation d'artillerie, il se porte à l'at-taque des positions allemandes. Son premier objectif est le bois du Trapèze. Pendant les dernières minutes de la préparation d'artillerie, nos premières lignes partent en rampant, mais dès qu'elles se relèvent elles sont soumises à un feu d'enfer et prises d'enfilade par des canons revolvers et de nombreuses mitrailleuses. Arrêtées momentanément, les sections cherchent à progresser en rampant et subissent de lourdes pertes: la 9ème compagnie perd tous ses chefs de section. Dans la nuit une nouvelle attaque est déclenchée et la 10ème compagnie réussit à atteindre la 1ère ligne allemande.

 

Le lendemain matin, deux compagnies du 2ème bataillon (5e et 6e), avec une section de mitrailleuses, se portent de nouveau à l'attaque, mais elles se heurtent vers la lisière du bois du Trapèze à des positions solidement occupées et sont obligées de s'arrêter momentanément. Une compagnie cependant, après des efforts inouïs, atteint la lisière nord du bois. La lutte est âpre et le régiment subit des pertes cruelles. Le commandant du régiment est tué.

 

Le 2ème bataillon est arrêté dans sa progression: à sa droite, le 1er bataillon; soumis à un feu de barrage intense, n'a pu gagner ses emplacements de départ. A sa gauche, le 3ème bataillon est arrêté lui aussi par des feux violents de mitrailleuses. Le 2ème bataillon doit alors revenir en arrière dans ses tranchées de départ. Cette pénible journée ne

pouvait se clore sur cet échec; tant de bravoure et d'énergie ne pouvaient rester stériles. A 23 h, le 2ème bataillon repart, appuyé à sa gauche par la 10ème compagnie et, malgré l'opiniâtre défense de l'ennemi et l'obscurité, réussit à prendre pied à la lisière nord du bois du Trapèze, mais il ne peut en déboucher. Il organise le terrain conquis. Au matin la situation du 2ème bataillon est critique; deux de ses compagnies, en flèche, sont sans communication avec nos anciennes lignes. L'ennemi qui s'en rend compte les soumet à un violent bombardement et contre-attaque, mais nos feux et l'héroïsme des hommes qui ne veulent pas céder un terrain si péniblement conquis, arrêtent l'ennemi. D'autres contre-attaques se déclenchent les jours suivants, mais échouent aussi. Le 6 mars, mètre par mètre, le régiment a repris Ia totalité du terrain occupé le premier jour de l'attaque. Le 9 mars, le régiment est relevé et se rend à Somme-Tourbe.

 

Du 12 au 19 mars, le régiment monte de nouveau dans ce secteur pour organiser le terrain conquis, puis relevé, va se reposer et gagner par étapes la région des Hauts-de-Meuse.

 

 

 

Après deux jours de repos seulement, le régiment monte en ligne aux Éparges le 9 avril. Il y subit des bombardements d'une violence insoupçonnée jusqu'alors. Dans ce secteur le moindre des mouvements est des plus difficiles, mais les agents de liaison circulent quand même: des groupes d'hommes sont enfouis, et immédiatement, sans se soucier du danger de l'avalanche de fer et de feu, leurs camarades se précipitent
pour les dégager. C'est là, dans le ravin de la MORT, malheureusement trop bien qualifié, que les "bleuets", les jeunes soldats de la classe 1915, Charles Louis LE BOULAIRE parmi eux, font leur dur apprentissage. Malgré la pénible tension nerveuse, résultat du feu terrible des canons ennemis, ils se montrent à hauteur de leur tâche, imitant leurs anciens et donnant dès le début une même preuve d'endurance et d'esprit de sacrifice.

 

 

 

Comme on le voit, le 3ème bataillon (9ème, celle de Charles LE BOULAIRE et 11ème compagnies) a plus de difficultés dans cet assaut du 20 juin         >>>>

 

 

 

A la fin de l'année 1914, Charles Louis LE BOULAIRE est affecté au 147ème R.I. pour rejoindre le front.

 

Le 147ème a habituellement son dépôt à la caserne Mac Donald à Sedan. Pendant la guerre, il a été transféré à Saint-Nazaire (Loire Atlantique), il appartient 7ème brigade d'infanterie, 4ème division d'infanterie, 2ème corps d'armée. Il a participé à la bataille des frontières, à la bataille de la Marne et du 15 septembre à la fin de l'année 14 il est dans la forêt d'Argonne:  bois de la Gruerie Bagatelle, ravin de Fontaines-aux-charmes, Fontaine-Madame, ravin du  Mortier (Vienne le Château) ...

 

Un contingent de renfort de 194 hommes venant du 137ème R.I. arrive le 26 décembre 1914. Il est probable que Charles Louis LE BOULAIRE soit parmi eux. Il affecté à la 9ème compagnie (3ème bataillon)

 

Le 31 décembre, les allemands font sauter une mine et se précipitent dans les tranchées de la 7ème Cie. Une lutte au corps-à-corps s'ensuit. Puis une contre-attaque est lancée par la 8ème Cie qui arrive à rétablir la situation.

 

Le 147ème régiment est relevé le 17 janvier. Les pertes du régiment durant ces 4 mois sont considérables :

extrait du J.M.O. du 147ème RI à la date du 17 janvier 1915

 

 


Dans la région des Hauts-de-Meuse, le 147ème va encore arracher à l'ennemi quelques lambeaux de terrain. Il attaque les 5 et 6 avril; les bataillons font preuve d'un élan admirable et franchissent, sous un feu très violent, la distance qui les sépare de la 1ère ligne allemande dont ils s'as-surent la possession. La nuit se passe à retourner les tranchées conquises et à les organiser face à Pareid et à Mayzeray. Le lendemain l'attaque est reprise, mais le mauvais temps a empêché le réglage, et la préparation d'artillerie qui devait ouvrir des brèches dans les réseaux de fil de fer ennemis est inefficace. Accueillies par des feux terribles, nos troupes ne peuvent progresser et s'établissent solidement dans la tranchée prise la veille. Une pluie persistante transforme les tranchées en véritables ruisseaux; la température se refroidit singulièrement, la neige tombe, et toutes ces intempéries mettent le comble aux misères de la troupe.

 

Le 2ème bataillon tient deux jours et deux nuits, presque isolé du régiment, avec un admirable stoïcisme, sous un bombardement intense, jusqu'à ce que sa relève soit décidée. La 1ère section de la 2ème compagnie est citée à l'ordre du jour de la 4ème division d'infanterie en ces termes: « En 1ère ligne, le 5 avril, à l'attaque d'une position allemande, a fait preuve d'un élan admirable. Bien que perdant les 2/3 de son effectif, a franchi sous un feu très violent environ 1000 mètres dans un ordre parfait, débordant de 100 mètres la position occupée par l'ennemi et obligeant ainsi celui-ci à la retraite. »

 

Les Éparges, deux clichés du "ravin de la mort"

 

Après un court repos, le régiment est appelé, à partir du 29 avril, à combattre dans le secteur de la tranchée de Calonne. Il s’agit d’une route forestière, passant à proximité des Éparges qui mène vers Verdun. Depuis septembre 1914, la zone est âprement disputée. Pendant 3 semaines, le 147ème RI fournit un effort considérable pour créer de toute pièces avec le génie, une première ligne et quelques boyaux, consolider la défense générale et préparer une prochaine attaque. Le 16 juin les travaux sont terminés, la parallèle de départ est prête.

 

Le 20, les compagnies partent à l’assaut et conquièrent les premières lignes ennemies et s'y maintiennent malgré de violentes et puissantes contre-attaques, manifestant une fois de plus la ténacité et la volonté de vaincre qui animent le régiment. Le 2ème bataillon arrivant même jusqu’à la 3ème ligne allemande. Malgré de violentes contre-attaques et au prix de nombreux morts, plusieurs tranchées allemandes passent sous contrôle français.

 

Le 2ème bataillon qui s'est particulièrement distingué reçoit la citation suivante « A attaqué avec un entrain remarquable une position ennemie solidement fortifiée; l'a enlevée et a pénétré d'un seul élan jusqu'à la 3ème ligne allemande, malgré les feux violents de mitrailleuses et d'artillerie de front et de flanc. »

 


 

 

 

Ces faits d'armes "glorieux" ont malheureusement un revers, les pertes enregistrées sont sensibles:

le 20 juin Officiers tués  6 et blessés 4

hommes de troupes tués 132, blessés 395 et disparus 170

 

Charles Louis Marie LE BOULAIRE en paie le prix fort. Il ne fêtera pas son 21ème anniversaire. Il décède de ses blessures à 16h35, le 20 juin 1915, lors de l'assaut du 147ème R.I  sur l'éperon nord de Genonsevaux (Bois Hauts); commune des Éparges dans la Meuse. Il avait 20 ans et 9 mois. Il était célibataire.

 

Il est dans un premier temps inhumé dans le cimetière de la tranchée de Calonne. Les autorités militaires ne connaissent pas son lieu d'inhumation. Peut-être son corps a-t-il été rapatrié par sa famille et inhumé à Groix, ou inhumé dans l'un des ossuaires à proximité du champ de bataille, son corps n'ayant pas pu être identifié ?

 

 

Son acte de décès est transcrit sur le registre d'État-civil de la commune de Groix à la date du 18 octobre 1915. Il est honoré de la mention "Mort pour la France", mais ne semble avoir reçu aucune récompense particulière à titre posthume.

 

Son nom est gravé sur les différents monuments mémoriels de la commune de Groix.