Mort pour la France

Pierre Julien M. LE BORGNE (1886 / 1918)

 

Fils de Louis, un boulanger de Plouhinec (Morbihan), né en 1934 et de Marie-Vincente STÉPHAN, née à Plouhinec en 1847, mariés en janvier 1869 et domiciliés à Plouhinec, Pierre Julien Marie LE BORGNE est né le 17 juin 1886 à Plouhinec (Morbihan), dans le village de Kervarlay. C'est le petit dernier d'une fratrie de 10 enfants, nés de deux mariages.

 

Après quelques années passées sur les bancs de l'école, Pierre Julien fait son apprentissage de marin, en s'embarquant comme mousse vers l'âge de 12/13 ans, puis comme novice durant l'été 1901. Il devient inscrit définitif sur le registre du quartier des gens de mer d'Auray sous le matricule n° ... en juillet 1904.

 

Levé, pour effectuer son service militaire, le 10 juillet 1906, il est affecté au 3ème dépôt des équipages de la flotte à Lorient. Il est rendu à sa famille le 9 mai 1910, avec le grade de matelot de 2ème classe.

 

Il reprend ses activités à la pêche.

 

Pierre Julien LE BORGNE se marie le 7 janvier 1913, à Groix, avec une groisillonne Germaine Désirée JAFFRAY, née en 1892 à Groix. Ils résideront dans le village de Kermario et auront 3 enfants.

 

Pierre Julien Marie LE BORGNE décède le 8 août 1918 sur le territoire de la commune de Ciry Salsogne .


 

Au début de la guerre en août 1914, Pierre Julien LE BORGNE est âgé de 28 ans. Il est rappelé le 13 août 1914 au 3ème dépôt des équipages de la flotte à Lorient. Mais comme bien des marins, il n'y a pas de poste à pourvoir pour lui, il est alors mis à disposition de l'Armée de terre. Le 1er janvier 1915, il est alors affecté au 87ème R.I. dont le dépôt s'est replié sur Quimper, pour une instruction à la guerre sur terre.

 

Après quelques mois de formation, il est affecté au 6ème régiment du Génie, le 18 septembre 1915 dont le dépôt se trouve à Angers.

 

Assez vite, il rejoint sa compagnie au front, dans la forêt d'Argonne. Le 13 janvier 1916, il est évacué des tranchées de la Fontaine aux Charmes (Bois de la Gruerie) les pieds gelés.

 

Guéri et tiré de sa mauvaise passe, il est affecté au 9ème régiment du Génie où il arrive le 9 mars 1916. Le dépôt se situait avant-guerre à Verdun et qui s'est replié à Pont-de-Cé (au sud d'Angers).

 

Il est affecté au 6ème bataillon / 1ère Compagnie, qui est affectée à la 23ème brigade d'infanterie composée du 54ème R.I et du 67ème RI (12ème D.I.) A cette époque la brigade cantonne à Suippes et les régiments montent alternativement en ligne dans le secteur de Souain. La compagnie du génie réalise essentiellement des travaux d'entretien ou d'aménagement des tranchées aidée en cela par des corvées de travailleurs prélevés sur les régiments.

 

Elle participe toutefois aux attaques, tel le  15 mars 1916 avec un bataillon du 67ème RI dans l'attaque du bois 172.

 

Le 30 mai, la 12ème division est relevée pour se rendre dans le secteur de Verdun.

 

Le 18 juin, la 12ème division prend le secteur en avant du tunnel de Tavannes. La compagnie 6/1 travaille à l'organisation de la ligne dans le bois de la Laufée et le bois La Montagne. Là, sous un pilonnage systématique d'obus de gros calibre, dans un nuage de gaz lacrymogènes et toxiques, les sapeurs fournissent un effort magnifique, aidant puissamment la superbe infanterie de la division. 

 

La compagnie 6/1 est relevée vers le 10 juillet avec la 12ème division. Elle est transportée dans le camp de Ville-en- Tardenois, où elle est mise à l'instruction jusqu'au 19 septembre. 

 

 

La compagnie 6/1 travaille très activement à organiser le terrain et à l'équiper en vue des attaques. 

 

Par suite de l'enlèvement des premières positions allemandes (Mont Sapin le 17 avril 1917), la compagnie 6/1 vient bivouaquer dans les anciennes carrières souterraines à la ferme de Cour-Soupir. La 12ème division se prépare activement à enlever le Chemin des Dames et la compagnie fournit encore un très gros effort. 

 

Le 5 mai, la 3ème section de la 6/1 avec le 350ème R. I. et la 4ème section avec le 67ème partent à l'attaque. Les sapeurs se distinguent dans le nettoyage des creutes et abris, l'organisation du terrain conquis. 

 

En présence des contre-attaques ennemies, les sapeurs combattent comme des fantassins et maintiennent intégralement les positions. Les 3ème et 4ème sections de la 6/1 sont citées à l'ordre du 6ème C. A. pour leur belle tenue au feu, leur entrain et leur courage. C'est à cette occasion que Pierre Julien LE BORGNE se distingue

 

Le 22 mai 1917, la compagnie 6/1 se fait encore remarquer à Aizy en travaillant très en avant de nos premières lignes et en repoussant une patrouille ennemie. 

 

Le 28 mai, la compagnie 6/1 est relevée, elle rejoint la 12ème division dans la région de La Ferté-Milon et s'embarque avec elle pour les Vosges. Elle débarque à Saint-Dié le 17 juin et travaille sur l'étendue de l'immense secteur confié à la 12ème division, d'abord à la cote 607, puis à Hurbache, Moyenmoutier. 

 

Du 16 août au 10 octobre, la compagnie 6/1 est envoyée au cours du génie à Épinal. Le 10 octobre, elle remonte en ligne dans le secteur de la 12ème division. Elle prend part à la guerre de mines de la Chapelotte et exécute des abris à Hermanpère, Les Cinq-Maisons, La Vérioste et La Fontenelle. 

 

Le 16 décembre, la compagnie 6/1 est relevée, elle se rend par étapes avec la 12ème division sur le territoire de Belfort, puis à Florimont (Haut-Rhin) où elle organise des centres de résistance le long de la frontière suisse. 

 

Du 11 au 16 mars 1918, la 12ème division est mise en réserve et à l'instruction près de Vesoul. La compagnie 6/1 stationne à Colombette (Haute-Saône). C'est de là que la 12ème division est enlevée par alerte le 27 mars et va débarquer aux abords de Montdidier. 

 

Allégorie, dans le Parc du Château de Grivesnes

 

Le 7 avril, la 12ème division, relevée, est transportée en Lorraine, où elle prend le secteur de Saint-Clément. La compagnie 6/1 aide l'infanterie dans l'aménagement de la position, construction d'abris, etc. 

 

A la mi-juillet, la 12ème division est relevée et transportée dans l'Aisne, dans la région de Villers-Cotterêts, où elle prend part à l'offensive de l'armée MANGIN. La compagnie 6/1 apporte une aide efficace aux régiments d infanterie qui, attaquant sans répit l'ennemi, l'obligent à reculer et se lancent à sa poursuite jusqu'aux rivières de l'Aisne et de la Vesle. 

 

Au cours de la poursuite, le 8 août, la compagnie 6/1 est fortement éprouvée: la creute (piégée ?) dans laquelle elle était abritée saute (15 tués, 32 blessés, 72 disparus dont le sapeur Pierre Julien Marie LE BORGNE ). 

 

La compagnie 6/1, reformée à Serches et Chacrise, prépare activement le franchissement de la Vesle et de l'Aisne. A la suite d'une série d'attaques, le 4 septembre, l'audace d'un groupe de volontaires permet de franchir la Vesle de vive force et de culbuter l'ennemi, qui se replie en hâte derrière l'Aisne. Les troupes de la 12ème division ne laissent pas à l'ennemi le temps de se ressaisir. Un « va-et-vient » sur sacs Habert est installé sur l'Aisne par les sapeurs de la 6/1, qui font passer ainsi tout un bataillon d'infanterie

 

Au milieu de la creute se trouve un chemin donnant accès à une sorte d’étage creusé dans la pierre et surplombé par la route; c’est là que se trouvaient la mine (cinq ou six torpilles de gros calibres) destinée à faire sauter la creute et la route. Cette mine était posée là depuis une dizaine de jours au moins et tout le monde considérait que, puisqu’elle (la creute) n’avait pas explosé depuis le départ des allemands; elle ne présentait plus aucun danger. L’explosion s’est produite au moment où il y avait un maximum de monde dans la creute. Un entonnoir s’est produit en surface, qui semble indiquer par sa forme l’existence de deux fourneaux (deux charges estimées à 2 fois 300 kg d'explosif) ; cette hypothèse n’offre pas de certitude d’ailleurs étant donné les vides et fissures préexistants. Il est certain en effet qu’en dehors de l’action même des poudres il s’est produit des effondrements. L'ennemi non seulement avait bien dissimulé les charges qui ont explosé, mais encore il a cherché à tromper nos troupes en réalisant une destruction sommaire de l'entrée, et en laissant des charges non amorcées, facile à découvrir.

 

 

 

Un cimetière "Ciry-carrières" est installé dans un champ juste au-dessus de la creute afin d’y enfouir au plus vite les corps sortis des décombres. 

 

le samedi 10 août, le chef de Bataillon du Génie  reconnait les dégâts. Toutes les parties de la creute non éboulées ont pu être visitées, soit en pénétrant par l’entrée jusqu’au point d’explosion, soit en pénétrant par la partie supérieure de l’entonnoir dans le cul de sac du fond de la creute. On a écouté pour savoir si l’on pouvait en quelque point entendre des plaintes ou des appels; rien n’a été perçu.

 

Toutes les parties non éboulées de la creute ont été visitées, les blessés et les morts sortis. Il ne reste que ceux enfouis sous l’effondrement même, certainement tués par la chute des terres et rocs ou asphyxiés par l’oxyde de carbone au moment de l’explosion. Tout travail tendant à les dégager serait en pure perte; en conséquence les sapeurs de la Cie 6/51 ont commencé à murer la partie effondrée.Les sapeurs de la Cie 6/51 visitent les caves du village de Ciry pour rechercher d'éventuelles mines. 

 

Plusieurs soldats sont décédés des suites de leurs blessures à l'ambulance 16/22 de Villers-Cottrêts.

 

La section 6/1 est par suite inutilisable et le chef de Bataillon demande qu’elle soit ramenée à l’arrière de la DI où elle pourra être employée par exemple à l’assainissement du champ de bataille, ou à des travaux de récupération ou des travaux agricoles. 

  

Des corps sont restés sous les décombres. Combien d’entre eux,  dorment à jamais sous le plateau « Des Fortes Terres » ? Toutefois neuf de ces soldats morts le 8 août 1918 reposent dans le carré militaire du cimetière de Serches, soixante-deux dans les nécropoles de l’Aisne et trente-deux dans leurs communes de résidence.

 

Pierre Julien Marie LE BORGNE est mort dans cette catastrophe, sur la commune de Ciry-Salsagne ( Aisne), le 8 août 1918, vers 22h30. Il venait d'avoir 32 ans. Il laisse une veuve et 3 orphelins. 

 

Il fait partie des 78 sapeurs disparus. Un jugement déclaratif de décès est prononcé le 15 octobre 1920 par le tribunal de Lorient. Le jugement est transcrit dans le registre d'état-civil de la commune de Plouhinec le 29 octobre 1920.

 

Les autorités militaires ne semblent pas connaitre le lieu d'inhumation et plusieurs sources indiqueraient que les corps sont restés enfouis dans la creute. Pourtant article du journal l'Intransigeant (dont la date m'est inconnue) écrit :  " Des faits scandaleux, confirmant entièrement ce que nous avons déjà dit sur la façon inhumaine dont l’état civil exécute les instructions ministérielles, nous sont signalés de tous côtés .

 

Ainsi à Ciry-Salsogne, dans l’Aisne, une carrière remplie de cadavres par l’explosion d’une mine à retardement fut signalée à l’état civil militaire qui a refusé de s’en occuper et n’a jamais envoyé de représentants pour faire l’identification des cadavres. C’est un chef d’équipe français, appointé par le ministre des régions libérées et assisté de deux cents prisonniers allemands, qui y a procédé. "

 

Si c'est le cas, on se sait où les corps ont été inhumés. Peut-être le sont-ils dans l'ossuaire de la nécropole nationale, la plus proche: Braine (Aisne)

 

Par ailleurs, l'historique de la Compagnie 6/1 du 9ème régiment du Génie qui dans une annexe liste les morts a oublié de citer les 78 sapeurs disparus dans l'explosion de la creute 01/28, le 8 août 1918.

 

Le nom de Pierre Julien Marie LE BORGNE est gravé sur tous les monuments mémoriels de la commune de Groix.       (voir ci-contre) >>>>

 

Par contre, curieusement, il ne l'est pas à Plouhinec.

 

Durant sa convalescence, il semble qu'il ait fait des bêtises, puisqu'il est condamné à 2 ans de travaux forcés et un an de prison pour désertion et complicité d'escroquerie par le Conseil de guerre de Tours. Toutefois la peine est suspendue.

Sapeurs au travail dans le Bois de Laufée

 

A cette date, la 12ème division est alors transportée dans la Somme et prend comme secteur d'attaque celui de Cléry à Bouchavesnes. La compagnie 6/1 exécute les travaux préparatoires aux offensives, prend part aux attaques et organise le terrain conquis. 

 

Le 19 octobre, la compagnie 6/1 est relevée par la 26/55, la compagnie 6/1 est mise à la disposition du service routier à Villers-Bretonneux. 

 

Le 13 novembre, la 6/1 remonte en ligne avec la 12ème division sous un bombardement continu et très coûteux, les sapeurs font preuve du plus beau courage et travaillent avec acharnement à l'organisation des P. C. Aiguille et Violette. Il y a malheureusement de nombreuses pertes à déplorer, mais Pierre Julien LE BORGNE s'en sort indemne. 

 

A la fin de décembre 1916, la 12ème division est relevée et se transporte par voie de terre dans l'Aisne, où elle prend le secteur Chavonne-Soupir, en vue de l'offensive qui doit avoir lieu dans cette région. 

 

 

Pierre Julien LE BORGNE est cité à l'ordre du jour du régiment le 5 juin 1917 : " Brillante conduite lors de l'attaque du 5 mai 1917. Faisant partie d'un détachement d'ouvriers, s'y ai fait remarquer par sa cranerie et son allant "  Il est décoré de la Croix de guerre avec 1 étoile de bronze.


 

Un sergent d'une compagnie du Génie écrit :

 " Les sapeurs du génie peuvent être comptés parmi les combattants les plus méritants et parmi les plus méconnus. On a trop tendance à ne voir dans ce corps d'élite, ou que les spécialistes souvent héroïques de l'effroyable guerre de mines, ou que les sapeurs plus favorisés de compagnies de chemin de fer, de télégraphistes ou de pontonniers.

 

En réalité, les compagnies divisionnaires groupèrent la majorité des hommes du génie, à la fois sapeurs et fantassins. Dans les divisions d'attaque notamment, ils vécurent en contact intime avec leurs camarades de l'infanterie, dirigeant leurs travaux de préparation, les accompagnant à l'assaut, le fusil ou le mousqueton à la main, la pioche passée dans le ceinturon lorsque l'heure H avait sonné, s'efforçant ensuite d'organiser le mieux possible l'effroyable chaos du terrain conquis. "

 


tranchée au col de la Chapelotte

 

La compagnie 6/1 organise en hâte le front de la 12ème division : Cantigny-Saint-Aignan-Grivesnes. Le 29 mars, la compagnie 6/1 contribue à la défense de Grivesnes, dont la position est solidement et intégralement maintenue. 

 

Un détachement composé d'une douzaine d'hommes de la 6/1 tient la ferme de La Folie, où ils se retranchent et résistent pendant deux jours et une nuit, jusqu'à la dernière cartouche, et sans qu'il leur soit possible de prendre le moindre repos. 

 

Le 30 mars, la 1ère section de la 6/1 est avec le 350ème R. I. chargée de la défense de Grivesnes et du parc du Château. Cinq très violentes attaques ennemies sont repoussées et la section du génie rivalise d'ardeur, de courage et de ténacité avec les hommes du 350ème. Le 31 à midi, une nouvelle et très violente attaque ennemie se produit. La compagnie 6/1 résiste avec acharnement, mais après avoir épuisé ses munitions, est obligée de se replier momentanément en subissant de grosses pertes. La compagnie se reforme le 1er avril à Coullemelle, où elle organise une ligne intermédiaire. 

 

Le 4 avril, la compagnie 6/1 fait partie d'un groupe de contre-attaque. Elle se distingue de nouveau tout particulièrement. La compagnie 6/1 est alors citée à l'ordre de la Ière armée pour la période 29 mars-5 avril, avec le motif suivant : « A pris une part glorieuse aux combats du 29 mars au 5 avril, dans lesquels elle a déployé beaucoup d'énergie et de courage. A tenu jusqu'à l'extrême limite ses tranchées, qui étaient complètement débordées par l'ennemi et prises sous un feu violent d'enfilade. » 

 

 

 

Jeudi 08 août 1918, la seconde bataille de la Marne vient de se terminer ; les troupes allemandes ont reflué sur les bords de la Vesle.

 

La 12ème Division d’infanterie tient le plateau entre Serches et Ciry-Salsogne et une partie du village depuis le 3 août. Cette Division est formée par les 54ème, 67ème, 350ème Régiments d’Infanterie, les Compagnies 6/1 et 6/51 du 9ème Génie et deux batteries du 25ème RAC. L’artillerie ennemie bombarde régulièrement le plateau par obus de fort calibre explosifs et à ypérite mélangés. La première ligne, dans le village de Ciry-Salsogne, est tenue par le 2ème Bataillon du 54ème RI et le 3ème Bataillon du 67ème RI. 

 

Au soir, conformément aux ordres reçus, le 2ème Bataillon du 54ème RI prenant un nouveau dispositif, trois sections de réserve  doivent aller loger dans la creute 01/28 à 600 m au sud de Ciry-Salsogne. Le mouvement est terminé en début de soirée: deux sections de la 7ème Cie et une section de la 5ème Cie sont arrivées à la creute. La Compagnie 6/1 du 9ème Génie, celle de Pierre Julien LE BORGNE, occupe également cette creute. En cette belle soirée d’été, la majorité des hommes de cette compagnie sont rassemblés dans l’entrée de la creute se préparernt à monter en ligne afin d’effectuer les travaux de nuit, le lieutenant GRANDEMANGE chef de la 6/1 donne ses ordres aux chefs de section.

 

Les hommes du 54 sont pour la plupart installés au fond de la creute. Ils attendent l'arrivée de la soupe.

 

Cette creute est composée d’une unique galerie d’une quarantaine de mètres de profondeur dont l’ouverture, de huit mètres de largeur, donnait sur la route de Ciry-Salsogne à Serches; elle allait en se rétrécissant jusqu’au fond où sa largeur était réduite à quatre mètres.

 

Plusieurs soldats sont désignés pour aller chercher la soupe à Serches. Ils font le tour des sections afin de ramasser les bidons et se mettent en route à 22h10. Dans la plaine, en s'engageant dans un boyau, conduisant à Serches, ils voient une épaisse colonne de fumée s'élever dans l'air et ressentit un léger tremblement du sol. En arrivant à Serches, ils apprennent que la creute vient de s'effondrer.

 

A 22h30, une explosion sourde se fait entendre et le sol calcaire se met trembler; la creute vient de s’effondrer suite à une formidable explosion. Une forte secousse est ressentie jusqu’au PC du 2ème Bataillon du 54ème RI. Les personnels présents croient à l’explosion d’un obus de fort calibre à fusée retardée; mais quelques instants après, ils apprennent par un rescapé que la creute venait de sauter. 

 

Un adjudant, qui se trouvait dans la galerie, près de l'entrée est soufflé par l'explosion et se retrouve au sol, au milieu des gravats et du sable, contusionné. Il se relève et court, affolé, sur la route, un soldat à l'entrée de la carrière, s'en sort indemne.

 

Une mine à retardement laissée par les Pionniers allemands vient de sauter. Cette creute avait pourtant été visitée par les officiers du Génie. Ils y avaient découvert deux pièges non dissimulés et non armés.

 

intérieur d'une creute

 

Les secours organisés par la Cie 6/51 permettent d'accéder rapidement dans toutes les parties non effondrées de la creute et d'en dégager les tués et blessés.

 

Les blessés sont transportés au Poste de Secours de SerchesEn même temps, les Allemands continuent de bombarder les abords de la creute et la route de Ciry à Serches par obus de tous calibres. Le déblaiement des décombres doit être interrompu. Une autre raison de cette interruption est le risque d’ensevelissement des travailleurs par l’éboulement de grosses masses de pierres ou de sable.

 

 

35 blessés sont envoyés au Poste de Secours de Serches puis sont transférés à l’Ambulance 12-16 de Vierzy et ensuite à l’Ambulance 16-22 de Villers-Cotterêts en fonction de la gravité de leurs blessures; les intransportables sur Vierzy.

 

Vendredi 09 août à 07h30, un capitaine retourne à la creute; 8 corps du 2ème bataillon du 54ème R.I. ont déjà été retirés. Un 9ème est retiré peu de temps après. 

 

Les survivants de la 6/1 sont mis au repos à Serches. 

 

Le déblaiement de la creute est continué par la Cie 6/51. Les recherches sont abandonnées dans la matinée. Les sous-officiers du 2ème Bataillon du 54è RI qui aidaient à l’identification rentrent au PC

 

A 16H00, un premier décompte des pertes est donné ;

- pour la Cie 6/1: 2 officiers blessés ,15 sapeurs-mineurs tués dont Pierre Julien LE  BORGNE, 32 sapeurs-mineurs blessés

et 78 sapeurs-mineurs disparus présumés tués sur 201 hommes

- pour le 54ème RI: 1 officier, pour la 5ème Cie: 1 sous-officier, 3 caporaux et 14 hommes, pour la 7ème Cie: 3 sous-officiers, 6 caporaux et 34 hommes, soit 62 victimes directes au sein du 54ème RI; tous portés disparus dans les premières heures. Aucun blessé. Ce qui confirme que les hommes de ce régiment étaient rassemblés plus à l'intérieur de la creute, en cantonnement et s'apprêtaient à y passer la nuit.

 

début de la creuse 01/28, vue de l'intérieur

l'entrée de la creuse aujourd'hui

une croix collective à l'entrée de la creute porte la mention

"Soldats et Sapeurs... Morts pour la France  8-8-918"