Mort pour la France

Ange Marie GOURONC  (1878 / 1922)

 

Fils de Laurent, un marin-pêcheur groisillon, né en 1843 et Marguerite CAYREFOUR, une fille de Pluvigner (Morbihan), née en 1846, domestique à Groix en 1869, mariés à Groix en juin 1869, résidant dans le bourg de Loctudy, Ange Marie GOURONC est né à Groix le 24 juillet 1878 dans le bourg de Loctudy. Il est le cinquième enfant d'une fratrie de sept.

 

Après quelques années sur les bancs de l'école, Ange commence son apprentissage de marin, en s'embarquant comme mousse sur les dundees groisillons. A quinze ans, vers août 1893, il devient novice  avec une inscription provisoire. Son inscription définitive sur le registre des gens de mer du quartier de Groix intervient vers août 1896 sous le n° matricule ? (à rechercher)

 

Ange GOURONC est levé (incorporé) pour effectuer son service militaire le 23 octobre 1900 (tardif ? pb de santé ?). Il est affecté au 3 dépôt des équipages de la flotte à Lorient pour ses classes.Il est renvoyé dans ses foyers le 23 octobre 1901, après une seule année (?).

 

Il reprend ses activités à la pêche.

 

Ange Marie GOURONC se marie à Groix le 23 mai 1906 avec une groisillonne, Marie Célinie COLLOBER née en 1876. Ils résideront  dans le bourg de Loctudy et auront 8 enfants.


 

Lorsque la guerre est déclaré en août 1914, Ange a 36 ans et déjà 4 enfants.  Il est appelé au 3ème dépôt des équipages de la flotte, mais la Marine ne trouve pas d'affectation pour un "pépère" (surnom donné aux hommes relevant de l'armée territoriale) dans ses rangs. Joachim est d'abord renvoyé chez lui, puis Ange comme beaucoup d'autres marins est mis à disposition de l'Armée de terre, le 27 novembre 1914, et plus précisément dans les troupes coloniales, qui manque de bras après les évènements meurtriers de l'été et l'automne 1914. Il est incorporé au 6ème Régiment d'infanterie coloniale, et arrive au dépôt à Lyon (fort Saint-Irénée), le 17 décembre 1914.

 

Après douze semaines de formation, il rejoint le 36ème régiment d'infanterie coloniale sur le front, avec un contingent de renfort (dans lequel on trouve un pays: Joachim PENHOUET) parti de Lyon le 20 avril 1915. Il arrive quelques jours après dans un secteur au nord de Lunéville (Sommerviller, Maixe en Meurthe et Moselle) Les hommes sont rapidement répartis dans les compagnies.

 

Mais revenons un peu en arrière, Le 36ème Régiment d’Infanterie Coloniale est un régiment de réserve issue du 6ème RIC qui au début de la guerre compte plus de 2032 hommes et 50 officiers en deux bataillons. Il est dirigé, le 7 août, vers la frontière italienne. Désigné pour faire partie de l'armée des Alpes (74ème division), il débarque à Saint-Pierre-d'Albigny en Savoie. Après s'être assuré que l’Italie ne marche pas aux coté de l’Allemagne, la 74ème division est embarquée le 20 août à Montmélian, et débarqué en Lorraine où ils arrivent les 21 et 22 août. De là commence le mouvement vers l’Est et plus particulièrement vers la ville de Gerbéviller.

 

 

 

Le régiment revient dans le secteur Bathelémont, bois de Benamont, La Fourrasse (au nord de Luneville). De mars à fin juin dans ce secteur assez calme, l'existence habituelle de la vie de tranchées n'est troublée que par quelques reconnaissances (notamment au début de juin sur la ferme Haute-Riouville) et quelques bombardements traduisant de part et d'autre l'inquiétude causée par les travaux de défense.

 

Le contingent de renfort auquel appartient Joachim arrive vers la fin avril 1915. Les hommes répartis dans les différentes compagnies prennent part immédiatement aux différentes actions : patrouilles, gardes des tranchées, travaux,... 

 

Le 28 juin, le 36ème colonial quitte la 74ème Division d'Infanterie et est affecté à la 16ème D.I.C., pour entrer dans la nouvelle constitution de la 31ème brigade d'infanterie coloniale. Celle-ci étant mise à disposition de la 73ème D.I. dans le secteur de Bois-le-Prêtre.

 

lignes françaises (en rouge), allemandes (en bleu)

 

Le 18, septembre, la division coloniale est relevée de Lorraine et devient réserve du groupe d'armées de l'Est. Elle est appelée en Champagne où le régiment débarque le 3 septembre à Somme-Suippes. 

 

La Bataille de Champagne engagée le 25 septembre se poursuit victorieusement à l'Ouest, la 4ème armée a percé le front ennemi. Le moral des troupes est élevé. On a vu défiler les prisonniers ennemis, le terrain bouleversé porte les traces de notre écrasante supériorité en artillerie et de notre victoire. 

 

Après une installation de nuit imparfaite., dans le secteur qui va de la cote 193 au chemin Perthes-Somme-Py, le régiment est lancé à l'attaque le 29, à 14 h. Mais l'ennemi s'est ressaisi, ses renforts occupent solidement les deuxièmes positions à contre-pente dont les tranchées sont protégées par des réseaux intacts. Malgré un entrain remarquable l'attaque est brisée sur les réseaux par un feu violent d'infanterie et de mitrailleuses. 

 

quelques hommes de la 14ème section des commis et ouvriers d'administration

 

Le 36ème RIC connaît l’épreuve du feu dès le 25 août et comptabilise une série de revers. Les 29 et 30 août, 6 compagnies du 36ème RIC, profitant du brouillard attaquent au nord de la rivière MortagneL'ennemi est retranché aux lisières sud de bois. Ces unités sont surprises en formation de manœuvre au moment où le brouillard se dissipe. Les pertes sont énormes. Le régiment perd en deux jours la moitié de ses effectifs : « 4 officiers tués, 69 blessés, 6 disparus et 230 hommes de troupes morts, 900 blessés ou disparus». Les pertes sont telles que le 36ème colonial passe sous les ordres du 229ème, il en forme le 3ème bataillon; Avec ce régiment, il prend part dans la région de Méménil aux opérations qui aboutissent à la délivrance de Lunéville le 13 septembre. Il s'initie aux premiers travaux de la guerre de tranchées, et s'installe définitivement le 15 septembre dans la région de Sionviller face à la forêt de Parroy

 

Le 7 octobre 1914, 12 sous-officiers et 777 hommes arriveront du dépôt en renfort, ce qui lui permettra de se reconstituer en entité autonome. Après un repos à Sommervillers, il tient un secteur au nord du canal de la Marne au Rhin (région de Bathelémont-Bauzemont) jusqu'au milieu de février 1915. 

 

Le 18 février, le 36ème colonial se porte par Dieulouard dans la forêt de Facq pour prendre part à l'attaque de la position du Signal Xon-Norroy, dont l'ennemi vient de s'emparer. C'est le 4ème bataillon qui est désigné pour attaquer le signal de Xon (au nord-est de Pont-à-Mousson). Il se porte à l'attaque  et enlève l'objectif de haute lutte. L'artillerie ennemie a fait subir au bataillon des pertes sérieuses mais sans affecter l'élan des troupes. C'est un succès brillant au cours duquel le service médical s'est distingué et a été particulièrement éprouvé. Une citation à l'ordre du 2ème groupe de division est accordée au bataillon. 

 

 

Arrivé le 30 juin au Bois-Le-Prêtre, dans le secteur de Fey-en-Haye, le 36ème RIC monte en ligne le 1er juillet. Le même jour commence la préparation d'artillerie à une attaque ennemie. Le bombardement devient de plus en plus violent et le 4 juillet l'ennemi attaque le «Quart-de-Réserve et l'Eperon». Les 3 compagnies du 36ème colonial en secteur à l'Eperon sont anéanties après des prodiges d'héroïsme, et après avoir fait subir à l'ennemi des pertes terribles. Une contre-attaque permet de reconquérir la plus grande partie du terrain perdu. Jusqu'au 30 juillet, les bombar-dements, attaques et contre-attaques se succèdent sans trêve. Les pertes sont lourdes. Le régiment éprouvé est il amené au repos dans la région de Verdun. Mais la tentative de l'ennemi de percer en direction de Pont-à-Mousson a été enrayée. De nombreuses citations récompensent de nombreux faits d'armes. 

 

Pendant le mois d'août, et jusqu'au 12 septembre, le régiment occupe dans le Bois-le-Prêtre le secteur si tristement célèbre du carrefour Mouchoir - Croix-des-Carmes - Carrefour. Dans ce secteur où les tranchées adverses se touchent, c'est la lutte quotidienne à la grenade, la guerre de mines, le bombardement par l'artillerie de tranchée dont l'ennemi est largement pourvu. Les pertes sont lourdes et dans le vaste cimetière installé au nord de Montauville les tombes du 36ème colonial dressent des croix nombreuses. Ange Marie GOURONC et Joachim PENHOET semblent, pour cette fois, échapper au massacre.

 

 

 

Ange Marie GOURONC ne participera pas à cette dernière action, il est rapatrié au dépôt , à Lyon, le 28 septembre1915. A quel événement est du ce rapatriement : état de santé, blessure, naissance de son  5ème enfant, le 31 août ? (à rechercher)

 

En l'absence d'informations supplémentaires, on peut raisonnablement penser à une maladie contractée au front compte-tenu du parcours qui suit.

 

Après quelques mois de suivi médical et de convalescence, il est rayé des contrôles (?) le 22 janvier 1916.

 

Toutefois après un passage de son dossier devant une commission administrative (ou médicale), Ange GOURONC est affecté à la 14ème section des commis et ouvriers d'administration à Lyon, le 23 dévier 1916.

 

Il est muté le 22 avril 1916 à la 11ème section des commis et ouvriers d'administration à Nantes, jusqu'au mois de septembre1917.

 

Le 9 mars 1917, il est remis à disposition de la Marine et affecté au 3ème dépôt des équipages à Lorient.

 

Comme la plupart des marins sans affectation à cette époque, ils sont réputés sursitaires et autorisés (encouragés ?) à reprendre leurs activités à la pêche.

 

Trois enfants naîtront après son retour à Groix.

 

Ange Marie GOURONC décède au mois de juin 1922 des suites de la maladie contractée au front, en 1915. Il est âgé de 43 ans. Il laisse une veuve de 45 ans et 8 enfants de 3 à 15 ans qui seront adoptés "pupilles de la nation", le 13 octobre 1922.

 

Décédé après sa démobilisation, le statut "Mort pour la France" lui sera refusé.