Mort pour la France

Jean Jacques ÉVEN  (1878/1915)

 

Fils de Chrysostome Joseph, marin, né à Groix en 1836 et de Jeanne Marie STÉPHANT, née à Groix en 1840, mariés en août 1861, résidant dans le village de Kérampoulo, Jean Jacques ÉVEN est né le 14 juin 1878, à Groix dans le village de Kérampoulo. C'est le 9ème d'une fratrie de 13 enfants.

 

Après quelques années passées sur les bancs de l'école, il apprend le métier de marin-pêcheur, d'abord comme mousse vers l'âge de 12/13 ans, puis comme matelot. Il est déjà inscrit maritime lorsqu'il passe son conseil de révision en 1897. Son n° matricule est le ?

 

Son matricule au recrutement est le 557. il fait son service militaire au 3ème dépôt des équipages de la flotte à Lorient

 

Rendu à sa famille, il reprend ses activités de marin-pêcheur.

 

Jean Jacques se marie le 30 mai 1911 à Groix avec une fille du village de Locmaria, Marie Hyacinthe JÉGO, née en septembre 1889. Ils résideront à Locmaria et auront une fille Anne Rose.

 

Jean Jacques ÉVEN décède le 25 septembre 1915


A la déclaration de la guerre, Jean Jacques est mobilisé au 3ème dépôt des équipages de la flotte à Lorient. Mais il est renvoyé dans ses foyers, car aucune affectation ne lui est proposée. Il est mis à disposition de l'Armée de terre et mobilisé le 14 décembre 1914. Il alors affecté au 3ème R.I.C. à Rochefort. La caserne habituelle du 3ème RIC a été transformée en hôpital. Les recrues sont donc hébergées dans des tentes "marabout" plantées sur un vaste cours hors les murs , le cours d'Ablois.

 

Le 3ème RIC a son dépôt à Rochefort (Charentes maritimes). Il fait partie de la 3ème brigade d'infanterie coloniale, intégrée à la 3ème division coloniale. Il est composé de 3 bataillons.

 

 AAA   le campement du 3è RIC                 revue du contingent de renfort sur le départ  VVVV

 

Bien que dans une situation assez précaire, il attaque le 3 octobre, où l'ennemi fit une dernière et violente tentative de percée, à laquelle il dut renoncer par suite de ses pertes. Jusqu'au 18 décembre, il continue, avec le 7ème, à tenir le secteur de Ville‑sur‑Tourbe, qu'il a, pour ainsi dire, créé. Il prend part aux attaques de la fin décembre (attaques du 17ème corps et du C.A.C. sur Tahure et Nipont) et repousse une tentative d'attaque ennemie, le 23. Il a supporté les veilles, les fatigues sous la pluie, par la gelée, et n'a laissé entendre aucune plainte. Les hommes sont exténués, mais nul ne récrimine et tous font largement leur devoir jusqu'au dernier moment. Les courages ne se sont point abattus et tous acceptent leur nouvelle tâche, tenir l'ennemi éloigné d'une position dangereuse pour tout le front du C.A.C. Il combat et travaille en même temps, avec la ferme certitude que l'ennemi ne passera pas. Cette situation dure jusqu'au 23 février 1915.

 

Le 24 février 1915, les bataillons disponibles sont alertés, prêts à partir pour le ravin des Pins. L'ordre arrive à 1 h.15. Le 1er bataillon cantonne à Minaucourt; le 2ème bataillon, au ravin des Pins. Les 2 bataillons sont mis à la disposition du 22ème RIC, pour les opérations prévues contre le fortin allemand "de Beauséjour" au nord‑ouest de Minaucourt. Cet ouvrage, pris et perdu déjà 7 fois, avait été enlevé et reperdu, le 24, par le 22ème RIC.

 

Les hommes des 2 bataillons entrent aux tranchées dans la nuit du 26 au 27, décidés à s'emparer à tout prix du fortin et à le conserver. L'attaque doit se déclencher à 15h.45. L'artillerie la prépare par un bombardement serré de 15h.30 à 15h.45. Les bataillons sont placés face au fortin à enlever: le 1er bataillon sur la face Est, le 2ème bataillon sur la face Ouest. La première vague est formée par les 2ème, 3ème, 5ème  et 6ème compagnie. La 4ème compagnie et la 7ème doivent aller renforcer les compagnies d'assaut dès que l'ouvrage sera enlevé et consolider les positions conquises. Les 1ère et 8ème compagnies sont en réserve avec deux compagnies du 22ème RIC. 

 

A l'heure indiquée, les vagues d'assaut s'élancent, elles sont reçues par un feu de mousqueterie intense et par un violent tir d'artillerie. Dès les premiers instants, les pertes sont terribles. Les officiers tombent les premiers. Les compagnies hésitent un instant, mais se reprennent vite et se cramponnent au terrain conquis. Rien ne les en délogera plus. La position est prise. Malgré tout, on progresse en combattant à la grenade. Cependant, l'ennemi veut à toutes forces reprendre le fortin; âprement disputé, il lance 4 contre-attaques successives. La dernière, faite le 28, à 8 h, est d'une violence inouïe. Rien ne peut faire lâcher prise aux compagnies du 3ème R.I.C. ; malgré le manque le vivres, malgré la pluie, malgré la fatigue des survivants, tous les efforts de l'ennemi échouent. Quand le 91ème régiment l'infanterie vient relever les deux bataillons, l'ouvrage entier est bien conquis. C'est au cours d'une de ces luttes qu'un adjudant poussa le cri resté légendaire: « Debout les morts ! »

 

Le régiment perdait dans cette affaire: 6 officiers tués et 183 sous-officiers et soldats; 11 officiers blessés et 565 sous-officiers et soldats; et 250 hommes disparus.

 

Les unités du 3ème R.I.C., relevées dans la nuit du 28 février, sont obligées de rester sous la pluie, mais nul ne se plaint. Ce haut fait fut consacré par une citation à l'ordre du jour de la 4ème armée le 10 mars.

 

 

C'est après cette affaire que des renforts importants arrivent pour regarnir les rangs du 3ème RIC. Après quelques semaines de forma-tion, ce contingent de renfort est composé essentiellement d'inscrits maritimes début mars 1915. Le régiment se trouve à cette époque à Minaucourt / Massiges.  Le rédacteur du J.M.O. écrit le 8 mars 1915: "le régiment est plus âgé dans sa moyenne qu'un régiment territorial..." et il se plaint du contingent qui lui est envoyé de Rochefort... "408 inscrits maritimes qui avaient à peine 2 mois d'instruction et dont 380 ont plus de 36 ans...". Il y a tout lieu de penser que Jean Jacques ÉVEN arrive sur le front, dans ce contingent, en compagnie de Pierre GOUROND, Joseph Marie CALLOCH et probablement d'autres groisillons. 

 

 

La première contre-attaque, poussée par 3 compagnies du 7ème RIC, échoue. Les compagnies du 3ème prennent alors part à une attaque qui est appuyée par l'artillerie et qui se déclenche à 10h.45.

 

Le 17, la contre-attaque se prononce, partie contre la face nord, partie sur le flanc droit de l'ennemi. La première partie est arrêtée, mais une fraction pousse méthodiquement l'ennemi; elle progresse, et, à 1h.30, la ligne de soutien est reprise. L'ennemi, coupé de sa retraite par un formidable barrage, se rend en masse; à 2h.45, toutes nos tranchées sont reprises.

 

Les 1ère, 3ème, 4ème et 9ème compagnies du 3ème RIC, avec 3 sections de mitrailleuses, prennent une part active aux deuxième et troisième contre-attaques. Le premier groupe (3ème compagnie du 1er bataillon) prend part à la deuxième contre-attaque sur la face ouest; la 9ème compagnie mène celle du côté est, liée à des éléments du 7ème colonial. La 1ère compagnie arrive la première à l'ouvrage Pruneau; après avoir fait ravitailler par une de ses sections les détachements du 7ème qui défendent la face ouest de l'ouvrage, se relie aux 3ème et 4ème compagnies et, à 1 h, prononce avec elle la contre-attaque. L'ennemi, énergiquement attaqué, résiste furieuse-ment. Le commandant la 3ème compagnie, tombe presque au départ. Mais rien ne peut avoir raison de la résolution des troupes. La 4ème compagnie occupe l'entonnoir ouest, coupant la retraite à l'ennemi. Les hommes de la 1ère compagnie prennent 3 mitrailleuses, un matériel considérable et de nombreux prisonniers. Grâce à la connaissance du secteur qu'avaient tous les officiers, grâce au ravitaillement en grenades bien organisé, grâce surtout à l'énergie et à la ténacité des hommes, toute cette partie de l'ouvrage Pruneau est réoccupée et son organisation remise en place.

 

De son côté, un lieutenant du 3ème Colonial s'est porté avec une compagnie vers le saillant nord de l'ouvrage. Un tir foudroyant de mitrailleuses les accueille. Sans se décourager, le lieutenant rassemble les hommes valides dans une tranchée qu'il a pu atteindre, et se prépare à y recevoir l'inévitable contre-attaque. Soudain, coupés de leurs positions de départ par un terrifiant tir de barrage, les Allemands lèvent les mains: cinq cents d'entre eux se rendent. Et une douzaine de coloniaux, cernés depuis plusieurs heures, qui avaient décidé de lutter jusqu'à la mort, sont délivrés. Les Allemands laissent plus de mille cadavres sur le terrain. Mais les pertes françaises étaient à peu près égales, un groisillon, Pierre GOUROND, perdait la vie dans ce combat.

 

Le régiment continue à assurer la garde du secteur de Ville-sur-Tourbe jusqu'au 29 mai. A cette date, le corps d'armée colonial est relevé par les 15ème et 16ème corps. Le régiment quitte Maffrecourt. Le corps d'armée colonial doit soutenir le 35ème corps dans ses attaques sur Tracy-le-Mont et Moulin-sous-Touvent. Le régiment, en réserve de groupe d'armées, stationne successivement dans la forêt de Laignes, au carrefour de la Chapelle-Sainte-Croix, à Tosly-Breuil et à Breuil pendant les 6, 7 et 8 juin.

 

Le 14 juin, le régiment s'embarque pour la Somme. Il est réserve de groupe d'armées. Il y reste deux mois.

 

Le 3ème RIC participe au mois d'août à la guerre des frontières en Lorraine, puis entre en Belgique. Le 22, le régiment faisant partie de la 3ème DIC marche avec l'artillerie divisionnaire, une compagnie entre chaque groupe de canons qui marche sur Rossignol. Au débouché de Saint‑Vincent, il est pris à partie par l'artillerie allemande. A 11 h, le 2ème bataillon, à la sortie du bois au nord-est de Breuvannes, est accueilli par des mitrailleuses et de l'artillerie. Dès midi, les 3 bataillons sont immobilisés jusqu'au soir, recevant des coups de toutes parts. A 12 h.45, l'ordre est donné de marcher sur Rossignol, qui devra être fortifié. Il ne pourra être exécuté. Les pertes sont énormes. Dès 14 h, les 1er et 2ème bataillons sont presque cernés. On ne peut recevoir ni renforts, ni ravitaillement. Aussi, à 19 h, un mouvement de retraite est ordonné. Les débris des 1er et 2ème bataillons sont ramenés sur la route Tuitigny-le-Fresnois et peuvent rejoindre, à 21 h, les lignes de la 2ème division. La retraite se poursuit jusqu'à Orval. Les pertes sont de 2.085 tués, blessés ou disparus. 

 

La rage au coeur, le 24, la brigade se porte sur Olizy, où les restes du régiment sont groupés en deux bataillons. Le 26, il repasse la Meuse. Dans la matinée du 27, avec le 7ème colonial, il contre-attaque les Allemands, drapeau en tête, mais le mouvement de retraite continue Le régiment va bivouaquer à Pont-Gaudron, sur la route de Beaumont. La contre-attaque exécutée dans la matinée a coûté 117 hommes tués, blessés ou disparus. Le 28, le régiment se porte sur Fontenoy. Le 29, la retraite continue vers Vouziers l'on cantonne à Falaise et, le lendemain, à Longue. Le 31, l'on organise une position défensive à Bouet-aux-Bois. Le 1er septembre, la retraite continue. Il s'établit en avant-postes sur une ligne ferme Joyeux - ferme Trière. Le 2, un ordre indique qu'on ne doit plus se retirer devant l'ennemi, on ne doit bientôt plus lui céder de terrain. Le 3, le C.A.C. se replie vers le Sud, ses arrière-gardes (3ème R.I.C.) sur la ligne de hauteurs à 2 km de Saint-Remy, lisière des bois, à 4 km nord-ouest de Somme-Tourbe. Après de nombreux combats, le 17 septem-bre, la bataille de la Marne est terminée, vainqueurs mais à bout de souffle. L'ennemi imposera, une nouvelle forme à la guerre, les tranchées.

 

Quoique nullement préparés à cette guerre de taupes, officiers et soldats l'apprirent vite. Pendant 65 jours, le régiment tiendra le secteur de Ville-sur-Tourbe, avec le 7ème colonial. Il a repoussera 5 attaques: le 15 septembre, le 17, le 18, le 26 septembre et le 1er octobre. Le 26 septembre, surtout, l'affaire fut chaude. Ce jour-là, il a dû tenir le front avec 2 bataillons contre une attaque violente. En même temps, il devait faire face sur son flanc gauche, une situation exceptionnellement grave créée par la perte du bois de Ville. Pendant tous les combats, son front est vigoureusement attaqué, et son flanc droit constamment menacé, avec la Tourbe à dos. Grâce à la rapidité des mesures prises, à la vigueur de l'exécution, au dévouement et à la ténacité de ses troupes et de ses officiers, il a repoussé victorieusement l'ennemi, qui a subi des pertes importantes, ainsi que l'atteste les cadavres laissé en avant des lignes.

 

Une attaque s'est produite dans la nuit du 30 septembre au 1 octobre. Après une préparation d'artillerie lourde et de campagne, cinq colonnes allemandes, prises dans les troupes de deuxième ligne, se sont avancées sur nos tranchées, pendant que l'infanterie, en ligne, continuait à tirer. Ces troupes étaient soutenues par leur artillerie, alors que l'artillerie française se faisait à peine entendre. Le régiment tient bon (particulièrement le 3ème bataillon, qui supporte le choc principal) et fait au feu la plus belle figure, se montrant l'égal des meilleurs régiments.

 

Pendant le mois de mars, l'ennemi commence des sapes et laisse supposer qu'il est décidé à entreprendre la guerre de mines. Aussi se montre-t-il très actif, surtout devant l'ouvrage Pruneau. Il cherche à pousser ses travaux au plus près des lignes et essaie d'encercler le saillant. A l'évidence le secteur de Ville-sur-Tourbe, en flèche, intéresse l'ennemi. Le régiment cherche à enrayer les travaux de l'ennemi. Patrouilles, grenades, feu d'infanterie et tirs d'artillerie, tout coopère à ce but. Le 3 avril, notre génie évente une mine face de l'ouvrage Pruneau et aménage aussitôt une galerie, de façon à placer une chambre au-dessous de la mine allemande qui saute le 7. Cette explosion a amené celle de la mine allemande et un entonnoir assez vaste s'est produit. II a fallu le réunir à l'ouvrage par un boyau et l'occuper, puis le combler. Ce travail est très pénible et périlleux. Les hommes sont à 6 m de la sape allemande, qui lance constamment des grenades. Ils sont exposés à des feux de mitrailleuses. Ils ne peuvent travailler que par petits paquets de 6 ou 8, couchés dans la boue. Les attaques du génie sont reprises et poussées vers l'ennemi, de manière à pouvoir nous fournir des renseignements sur ses travaux.

 

Les boyaux sont remplis d'eau jusqu'aux genoux. La pluie qui tombe sans répit rend inutiles les efforts des écopeurs. Pendant la période du 8 au 12 avril, le travail a été très dur. La pluie persistante met les tranchées et les boyaux dans un état lamentable.

 

Le 15 mai, à 18h.25, les Allemands font jouer 3 énormes fourneaux de mines sur la face nord et nord-ouest de l'ouvrage Pruneau, alors occupé par le 7ème colonial. L'explosion est suivie par un violent bombardement, qui achève de bouleverser les positions et de couper les communications téléphoniques. L'artillerie ennemie prend aussitôt sous son feu les batteries de Montremoy et de Malmy. L'infanterie allemande, aussitôt après, s'élance et occupe la première ligne, ainsi que la ligne de soutien. La lutte d'infanterie dure une heure, acharnée, pendant que l'artillerie des 2 divisions et du corps d'armée fait un barrage en arrière de l'ennemi et tire sur les lignes allemandes.

 

 

La situation se précise vers 20h.50 et les contre-attaques peuvent être entreprises. Quatre compagnies du 3ème RIC sont envoyées comme renfort aux bataillons du 7ème, qui ont perdu beaucoup d'hommes et presque tous les officiers.


les objectifs vus de Virginy

Le régiment s'est comporté dans cette affaire, comme à son habitude depuis août 1914. Ses pertes sont terribles, le JMO du 3ème RIC a disparu pour cette période, mais le rapport de la brigade indique (pour la période du 25 septembre au 1 octobre) la mort de 3 officiers supérieurs ainsi que 25 officiers tués ou disparus et 764 hommes morts ou disparus dont plusieurs groisillons morts: Jean Jacques EVENJoseph Marie CALLOCH, Alfred LE GARFF, Laurent Marie TRISTANT et de 857 hommes blessés.

 

Malgré cette sanglante saignée, le régiment reste en place et combat jusqu'au 29, aide à élargir le terrain gagné et n'est relevé que le 30 par le 4ème bataillon de chasseurs et un escadron de cavalerie à pied, après avoir solidement installé les positions enlevées à l'ennemi.

 

Après la relève (1 et 2 octobre), le régiment se reforme à Verrière et reprend les tranchées de Massiges et de 191.

Le nom de Jean Jacques ÉVEN est gravé sur les différents monuments mémoriels de la commune de Groix, y compris celui de l'Église.

 

Petite note personnelle d'Enguerrand: La veuve de Jean Jacques EVEN, Marie Hyacinthe JÉGO s'est remariée quelques années plus tard, en 1925, avec Charles Laurent GOURONG, ce sont mes arrières grand-parents. Elle deviendra veuve de nouveau en septembre 1930, Charles ayant disparu dans la terrible tempête de cette année-là.

 

Marie Hyacinthe JEGO, avec l'une de mes tantes, vers 1950

 

Le 15 août, le 3ème RIC reprend les tranchées de Ville-sur-Tourbe. Les 2ème et 3ème bataillons sont en secteur depuis le 12 septembre. Le régiment se prépare pour la grande offensive du 25 septembre.

 

Le matin du 25 septembre, le 2ème bataillon occupe les faces ouest et nord de l'ouvrage Pruneau. Il contribue à sa transformation en parallèle de départ et reçoit l'ordre de tenir ses tranchées pendant l'attaque. Il formera une troisième vague d'assaut si besoin est. Les 1er et 3ème bataillons accolés forment les deux premières vagues. Ils ont pour objectifs, le 1er "la Justice", le 2ème "le petit bois de l'Oreille", à l'est de 191. Ils doivent pousser ensuite, si possible, jusqu'à La Dormoise.

 

La préparation d'artillerie, commencée le 22, est terrible. Jusqu'à ce jour, on n'avait rien vu de semblable. Le terrain est pilé. Tout saute, c'est infernal, le boche ne pourra tenir.

 

L'attaque est fixée à 8h.30. Au signal, les hommes bondissent hors de la tranchée et se portent en avant dans un superbe élan, et en bon ordre. Cependant, un feu terrible les accueille au débouché de la parallèle. Le chef du 1er bataillon tombe dans la tranchée. Le commandant du 2ème bataillon est tué à peine sorti; les pertes sont sensibles, surtout au 1er bataillon, devant lequel les barbelés n'ont pas été coupés. La première vague, de ce côté, est en partie fauchée. La deuxième arrive jusqu'à la première tranchée allemande et s'y maintient aux prix de lourds sacrifices. Vers la gauche, le 3ème bataillon est plus heureux, il enlève une partie de la deuxième ligne du 191 et peut s'y maintenir.

 

Le lieutenant-colonel, commandant le régiment, qui se trouve à l'ouvrage A, sort avec la deuxième vague. Il arrive jusqu'à la tranchée ennemie et s'y jette avec les hommes qui l'occupent déjà. Mais, à ce moment, l'ennemi prononce une violente contre-attaque. Le Commandant du régiment se met au parapet, un fusil à la main et fait le coup de feu au milieu de ses soldats. Le colonel reçoit presque aussitôt une balle dans la bouche et tombe dans la tranchée. 

 

Malgré les efforts de l'ennemi, qui parvient à reprendre sa première ligne entre l'ouvrage Pruneau et la route de Vouziers, le 3ème bataillon se maintient dans 191 et réussit même à progresser. Le 29, l'attaque était reprise à la grenade; les efforts de ce bataillon contribuent à faire tomber la défense allemande sur ce point.

Jean Jacques EVEN est recensé comme disparu à la fin de la journée du 25 septembre 1915. Il n'apparait pas dans les listes de prisonniers, il est donc présumé tué à l'ennemi. Il avait 37 ans. Il laisse une veuve et une fille d'environ 2 ans.

 

Un jugement déclaratif de décès est pris le 14 novembre 1916, le déclare mort pour le France le 25 septembre 1915, sur le territoire de la commune de Ville-sur-Tourbe. Ce jugement est transcrit sur les registre de la commune de Groix, le 22 novembre 1916. Ce qui est exceptionnel de rapidité.

 

Comme beaucoup, le corps de Jean Jacques ÉVEN n'a pas été retrouvé ou pas pu être identifié. Il se trouve probablement dans l'un des ossuaires proches, dans la Nécropole nationale du Pont de Marson (commune de Minaucourt Le-Mesnil-les-Hurlus, Marne) d'une superficie de 4,4 ha. 21 319 soldats français y sont inhumés, dont 9 096 dans des tombes individuelles et 12 223 dans six ossuaires.