"Gloire" "Jeune-Mathilde" "Algésiras"

 

"Gloire" et "Jeune Mathilde" détruits, par fait de guerre, le 23 septembre 1917

 

Le 23 septembre 1917, deux dundees groisillons sur trois ("Gloire" et "Jeune Mathilde"), sont détruits sur les lieux de pêche. Il n'y a pas de pertes humaines, ce jour-là, mais la frayeur des marins groisillons fut grande.

 

 

Rapport des autorités maritimes

 

" Le 11 septembre 1917, les 3 dundées thoniers "Gloire" (G 1038), "Jeune-Mathilde" (G 1187), "Algésiras" (G 860), ont quitté Groix pour se rendre, sous l'escorte de la "Caroline-V" aux lieux de pêche situés à environ 300 milles dans l'ouest d'Ouessant. Dans la nuit du 11 au 12, l'"Algésiras" perd le convoi; la nuit suivante, c'est le tour du "Gloire" et du "Jeune-Mathilde". Les 3 dundees après leur séparation continuèrent leur route vers les lieux de pêche: le 15 le "Gloire" et le "Jeune-Mathilde" se rencontrent et naviguent dès lors de conserve; sur les lieux de pêche, l'"Algésiras" se joint à eux et les 3 petits bâtiments se mettent ensemble au travail.

 

Le 22, jugeant leur pêche suffisante, ils font route sur terre.

 

Le 23 à 8 h, le temps est brumeux, avec une mauvaise visibilité, une grosse houle de NW, et une légère brise de SE. Un sous-marin ennemi apparaît dans la brume à 5 ou 600 mètres à tribord derrière de le "Gloire" qu'il canonne aussitôt. L'équipage évacue et sur signes du commandant allemand vient accoster le sous-marin. On fait monter les Français à bord et le commandant leur dit en français, mais en cherchant ses mots : " Pourquoi pêchez-vous si loin ? Vous n'avez donc pas peur des sous-marins ? " Deux Allemands embarquent dans le canot du "Gloire" et vont placer des bombes à bord. Ils reviennent peu après rapportant du thon, des conserves, des souliers et enfin le compas. Quelques instants plus tard, le "Gloire" coule sous l'explosion des bombes.

 

Le sous-marin remorquant le canot du "Gloire" se dirige alors sur le "Jeune-Mathilde" tout en ouvrant le feu sur elle. Au 2ème coup de canon, le "Jeune-Mathilde" est évacuée par son équipage et l'Allemand se place alors pour la couler commodément au canon: ce à quoi il réussit en quatre coups. Pendant ce temps, une lame a jeté le canot du "Gloire" sur la coque du sous-marin et l'a chaviré. L'embarcation est abandonnée.

 

Le sous-marin manœuvre alors pour se placer par le travers de l'"Algésiras" et lui envoie un coup de canon. L'équipage de la troisième victime met son canot à la mer, mais l'embarcation est crevée dans le débarquement et ce n'est qu'à grand'peine qu'elle est maintenue à flot. Le commandant du sous-marin, par l'entremise des gens du "Gloire" enjoint à ceux de l'"Algésiras" de retourner et de vider le canot qu'il a été obligé d'abandonner.

 

Les hommes de l'"Algésiras" essaient, mais ne réussissent pas. Alors pour une fois, l'Allemand est humain. Il se résout à épargner l'"Algésiras" quand il se rend compte que les trois équipages n'ont aucune chance de regagner terre avec les 2 embarcations qui leur restent et il fait accoster le canot de l'"Algésiras". Il accoste donc et les Français ont la surprise de voir un Allemand prendre leur bosse et un autre s'employer complaisamment à déborder leur canot que la lame fait tosser contre le sous-marin. Aux hommes du "Gloire" qui quittent son bord, et pour que son acte d'humanité profite un peu à sa patrie, le commandant allemand adresse ces mots en guise d'adieu : " Dites bien chez vous que nous ne sommes pas aussi barbares qu'on le prétend dans votre pays ".

 

Il se met en route ensuite cap au sud et ne tarde pas à disparaitre. L'"Algésiras" avec les 3 équipages fait alors route vers terre et arrive à Concarneau le 26 et à Groix le 28. " S.H.M., rapport du 5 octobre 1917

 

septembre 1917

 

C'est le sous-marin U 60, commandé par KL Karl Georg Schuster, qui a attaqué ces trois navires, le 23 septembre.
Il mesure environ 60 m de long pour 5 de large. Le kiosque est comme une tour ronde, sans passerelle, qui porte une inscription "LSF" peinte sur le kiosque. Il a garde-corps autour du pont. Il est armé de 2 canons de 77 à tir rapide, à l'avant et à l'arrière du kiosque, avec à côté de chaque canon un passage tubulaire pour convoyer les projectiles. Le périscope mesure 1,5 m de haut et 10 cm de diamètre terminé par un chapeau ogival et tenu par deux étais. Il est peint d'une couleur gris foncé, fraîche.

Il manœuvre très bien.

 

un sous-marin allemand en opération d'arraisonnement d'un dundee

 

 

Dundee ALGÉSIRAS (G 860, puis LGX 2809)

 

Dundee de 42,9 tx construit en 1906 à Paimpol (Côtes d'Armor)

Immatriculé G 860 dans la quartier de Groix en 1909

 

Les propriétaires en sont:

Tudy BIHAN, marin pêcheur, né en 1857, époux de Marie Josèphe LE DREF, née en 1863, résidant à Locmaria, pour 3/8

Aimé Alexandre DAVIGO, marin-pêcheur, pilote, époux de Philomène NÉRO, résidant à Kerrohet, pour 3/8

Joseph DAVIGO, dit "Le Braz", armateur, né en 1857, époux séparé de Anne Marie YVON, née en 1869, et résidant à Kermouzouet pour 1/8

Valentin NOEL, marin, armateur, né en 1862, époux de Marie Josèphe LE DREFF,  né en 1871, résidant à La Rochelle pour 1/8

 

Son cartel de propriétaires évolue en 1913, le navire passe dans les mains de

Charles Louis BIHAN, marin-pêcheur, né en 1859, époux de Maria Hyacinthe BIHAN, résidant à Locmaria pour 3/8, ayant racheté les parts de Tudy BIHAN, son cousin, Joseph DAVIGO, dit "Le Braz", époux séparé de Anne Marie YVON, résidant à Kermouzouet pour 2/8 et Valentin NOEL,époux de Marie Josèphe LE DREFF, résidant à La Rochelle pour 3/8

 

Le dundee sort indemne de cette mésaventure du 23 septembre, après avoir été canonné et chargé de ramener les équipages du "Gloire" et de la "Jeune-Mathilde" à terre. Il  poursuivra sa carrière jusqu'en 1930.

 

L'équipage de "Algésiras"  le jour le jour de cette rencontre dramatique était constitué de :

 

* Valentin NOEL, co-propiétaire et patron, 55 ans, né le 18 mars 1862 à Groix dans le lieu dit Locmaria, fils de Pierre °1828 et de Marie Joséphe LE DREF °1829, époux de Marie Josèphe LE DREFF,  né en 1871, avec laquelle il a contracté mariage à Groix, le 23 mai 1892, domiciliés à Locmaria, inscrit au quartier de Groix, mle ?
* Charles Louis BIHAN, Matelot, et copropriétaire, 58 ans, né le 2 août 1859, fils de Marc Joseph °1819 et  Françoise TONNERRE °1823, époux de Maria Hyacinthe BIHAN °1866, avec laquelle il a contracté mariage à Groix, le 23 mai 1892, domiciliés à Locmaria, inscrit au quartier de Groix, mle ?
* Émile Joseph NOEL, Novice, 17 ans, né le 24 janvier 1900, à Groix dans le lieu-dit Locmaria, fils du patron Valentin ° 1862 et de Marie Josèphe LE DREFF ° 1871, célibataire, inscrit au quartier de Groix, mle ?
* Ange Joseph BIHAN, Novice, 17 ans, né le 18 mars 1900 à Groix dans le lieu-dit Locmaria, fils de Jean Marie °1871 et d'Eugénie LE GREL °1872, célibataire, inscrit au quartier de Groix, mle ?
* Joseph STEPHANT, probablement Émile Joseph, 14 ans, né le 13 février 1903 à Groix, lieu-dit Créhal, fils de Joseph °1867 et de Marie Josèphe MÉTAYER °1880, mousse, inscrit provisoire au quartier de Groix, n° 3908;

 

Des années plus tard le dundee "ALGESIRAS" disparu "corps et biens" dans la fameuse tempête de septembre 1930

 

Joseph DAVIGO, armateur et co-propriétaire de l "Algésiras"

Charles Louis BIHAN, armateur et co-propriétaire de l "Algésiras"


 

Dundee GLOIRE (G 1038)

 

Dundee de 54,7 tx construit en 1910 à Belle-Île

Immatriculé dans la quartier de Groix en 1910

 

Les propriétaires en sont :

Yves Marie SALAHUN, marin-pêcheur, né en 1866, et conjointement son épouse Marie Bernadette STÉPHAN, née en 1874, résidant à Locmaria, pour 3/8

Etienne LE DREFF, ostréiculteur, né en 1860, époux de Marie Josèphe LANCO, résidant à Locoal-Mendon, pour 1/4

Maurice LANCO, marin-pêcheur, beau-frère du précédent, époux de Marie PUILLON, résidant au bourg de Loctudy pour 1/8

Marie Josèphe STÉPHAN, veuve de Jean-Baptiste NEXER, résidant à Locmaria pour 1/8

Constance YVON, veuve de François EVEN, résidant à Locmaria, pour 1/8

 

Il est coulé, après évacuation de l'équipage, par des explosifs, placés par les marins d'un sous-marin allemand le 23 septembre 1917.

 

Ces mêmes personnes avaient qualité de demandeurs lors de la clôture de la procédure d’indemnisation, intervenue le 7 décembre 1925. La Commission d’indemnisation de Groix leur alloua les sommes 144.560 F. au titre de la perte du bâtiment et de 8.540 F. au titre de la perte du produit de la pêche.

 "Gloire" fut remplacé par "Excelsior", dundee construit en 1921 et immatriculé G. 1384 / L.G.X. 3078, dont Yves Marie SALAHUN était l’unique propriétaire.

 

L'équipage du "Gloire"  le jour de sa destruction était constitué de :

* Yves Marie SALAHUN, patron et copropriétaire, 51 ans, né le 16 mai 1866 à Groix, lieu-dit Locmaria, fils de Pierre °1825 et de Marguerite LILIEN °1831, époux de  Marie Bernadette STÉPHAN, née en 1874, mariés en mai 1895, résidant à Locmaria, inscrit au quartier de Groix, mle ?
* Adolphe STÉPHANT, matelot, 49 ans, né le 10 février 1868, à Groix, lieu-dit Locmaria, beau-frère du patron, fils de Jean-Marie °1834 et de
Geneviève NICLOT °1842, époux de Sophie GOURONC, née en 1869, mariés à Groix en mai 1893, résidant à Locmaria,  inscrit au quartier de Groix, mle ?

* Hubert NEXER, matelot, 46 ans, né le 7 septembre 1870 à Groix, lieu-dit Locmaria, fils d'Hubert °1841 et de Geneviève LANCO °1843, époux de Marie Louise LE ROUX, née en 1875 à Moélan/mer (Finistère), mariés en juin 1896 à Groix, résidant à Locmaria, inscrit au quartier de Groix, mle ? 

* Jacques TONNERRE, matelot, Groix  ?  inscrit au quartier de Groix, mle ?

* Théophile Laurent GOURONC, novice, 17 ans, né le 16 février 1900 à Groix, lieu-dit Locmaria, fils de Paul °1862 et de Jeanne Rose DIBERDER °1863, futur époux de Stéphanie EVEN °1902 , résidant chez ses parents à Locmaria, inscrit au quartier de Groix mle ?
* Joseph Jean STÉPHANT, mousse, né le 22 octobre 1901 à Groix, lieu dit Locmaria, fils d'Adolphe °1868, matelot embarqué sur le même navire et de
Sophie GOURONC, °1869, résidant chez ses parents, inscrit provisoire au quartier de Groix mle n° 1719.

 

on aperçoit le dundee "Gloire", le premier à gauche

 

 

Dundee JEUNE-MATHILDE (G 1187)

 

Dundee de 47,4 tx construit en 1914  vraisemblablement construit par le chantier Jean-Marie Guillaume du Palais ( Belle-Île)

Immatriculé dans le quartier de Groix en 1914.

 

Les propriétaires en sont :

Maurice TRISTAN, époux de marie Cécile LE DREFF, résidant à Ker Port-Tudy, pour 3/8

Joseph BOBINNEC, époux de Marie KERSAHO, débitante de boissons, résidant à La Rochelle, pour 1/8

Laurent Marie BOBINNEC, marin pêcheur, époux de Jeanne MILLOCH, résidant à Ker Port-Tudy, pour 1/8

Jules GUILLAUME, du Palais (Belle-Ile) pour 1/8

Jeanne Marie Théotiste MILLOCH, veuve de Laurent NOEL, résidant à Kerrohet pour 1/8

François TRISTAN, armateur résidant à Moustéro, pour 1/8

 

Il est coulé, après évacuation de l'équipage, par des canonnades du sous-marin allemand le 23 septembre 1917. Quand le sous-marin est aperçu, à environ 500 m sur tribord arrière, il tire deux coups de canon. L'équipage évacue dans son canot. Le sous-marin va ensuite tirer 4 coups de canon à la vitesse d'un coup par minute sur le dundee, à la flottaison, et le navire coule aussitôt. Cette fois, il n'y as pas de bombe déposée à bord.

 


Lors de la clôture de la procédure d’indemnisation pour perte de ce bâtiment, intervenue vers 1925, avaient qualité de demandeurs :

      Maurice TRISTAN, François TRISTAN, Laurent BOBIN(N)EC, Joseph BOBIN(N)EC et Jeanne Théotiste MILLOCH, déjà nommés ci-dessus;

      Augustine Victorine GUILLAUME, fille de feu Jean-Marie – sans doute le constructeur naval du Palais – et Victorine BÉDEX, et sœur de Jules GUILLAUME – décédé en cour de procédure, le 22 janvier 1925 –, domiciliée au Palais (Belle-Île, Morbihan).

La Commission d’indemnisation saisie leur alloua les sommes 171.250 F à raison de la perte du bâtiment et de 12.250 au titre de celle de la pêche.

 

La "Jeune-Mathilde" fut remplacée par la "Jeune-Mathilde II", dundee immatriculé G. 1383, puis L.G.X. 3077, qui a été mis à l’eau le 6 mai 1921 aux Sables-d’Olonne par le chantier Chauffeteau et Cie.

 

L'équipage de "Jeune Mathilde"  le jour de sa destruction était constitué de :

 

*Pierre Marie TONNERRE, patron, 55 ans, né le 15 mars 1862 à Groix dans le village de Kerohet , fils de Joseph Marie °1828 et de Françoise BIHAN °1829, époux de Marie Josèphe BIHAN °1865, mariés le 4 juin 1894, résidant à  Kerohet,  inscrit maritime au quartier de Groix sous le matricule n° ?

* Louis CALLOCH, matelot, 53 ans, né le 8 février 1864 à Groix, dans le lieu-dit Kerohet, fils de Jean Paul Eugène °1833 et de Sophie BIHAN °1836, époux de Marie Anne MILLOCH °1861, mariés le 17 novembre 1890, résidant à Kerampoulo, inscrit au quartier de Groix mle ?

* Émile BIHAN,  matelot, 53 ans, né le 4 septembre 1963 à Groix, dans le village de Kerohet, fils de Gildas BIHAN °1823 et d'Anne CALLOCH °1832, époux d'Émilie CUON née 1873, mariés le 1 juin 1897 et résidant dans le village de Kerohet, beau-frère du patron, inscrit maritime au quartier de Groix sous le matricule n°?

* Joseph SALAHUN, matelot, 50 ans, né le 14 janvier 1867 à Groix, dans le village de Kerohet , fils de Joseph Marie °1825 et de Thérèse GUILLAUME °1831, époux d'Anne Marie BARON, née à Groix en 1875, mariés le 8 janvier 1913, résidant dans le village du Mené, oncle du mousse, inscrit maritime au quartier de Groix sous le matricule n° ?

* Adolphe SALAHUN, matelot, 48 ans, né le 2 juin 1869 à Groix, dans le village de Locmaria, fils de Pierre Marie °1835 et de Marie Perrine LE DREF °1835, veuf de Pélagie LE DREF résidant à Locmaria, cousin germain du précédent, inscrit maritime au quartier de Groix sous le matricule n°1011

* Joseph Marie TONNERRE, novice, 16 ans, né le 7 avril 1901 à Groix dans le village de Kerohet, fils de Joseph Marie TONNERRE °1869 et de Marie  GUILY °1880, résidant à Kerohet, neveu du patron, inscrit maritime provisoire au quartier de Groix sous le matricule n°

* Auguste Marcel PESSEL, mousse, 15 ans, né le 24 juin 1902 à Groix, dans le village de Kerohet, fils de Jean-Marie °1860 à Plouhinec et de Marie Anne SALAHUN °1864, neveu de Joseph Salahun (ci-dessus),  inscrit maritime provisoire au quartier de Groix sous le matricule n°

 

on aperçoit la "Jeune Malthide", coque noire , à gauche

 

Tous les marins des 3 dundees furent sauvés et revinrent sains et saufs, mais avec une belle frayeur, à Groix le 28 septembre 1917.