Mort pour la France

Joseph Marie COUGOULAT   1887/1914

Yves KERMAREC, un jeune lieutenant, de la 4ème Cie, et du même âge que Joseph Marie tué le même jour

 

 

 

 

 

 

 

<<< Caserne du 118ème RI à Quimper

Fils de Jean Marie (né en 1863 à Pluvigner), marié le 11 octobre 1887 à Merlevenez, avec Marie Anne MOELLO (née en 1859 à Languidic), Joseph Marie COUGOULAT, est né le 11 décembre 1887, à Merlevenez. C’est l’aîné d’une fratrie d'au moins cinq enfants

 

C'est une petite commune rurale de 1760 ha et d'un peu plus de 2.000 habitants aujourd'hui, située au centre de 4 cantons, à 9 kilomètres d'Hennebont, de Landévant, d'Etel et de Port-Louis (dont elle dépend) et à 12 kms à vol d'oiseau de Lorient, à 6 kms de Plouhinec et de l'océan. Elle comporte 33 écarts dont l'un, Trevelzun a été le 1er siège de la paroisse autrefois. Le territoire de Merlevenez est un démembrement de l'ancienne paroisse de Plouhinec et bordée par les communes de Kervignac, Nostang, Sainte-Hélène, Plouhinec et Riantec.    

 

A Merlevenez, on n’est pas marin de père en fils, lui sera journalier, c'est ce qu'il déclare lorsqu'il passe son conseil de révision en septembre 1907 à Port-Louis. Il est petit, brun et déclare résider chez ses parents à Merlenevez. Son n° matricule est le 1940/Lorient. Il est déclaré "bon pour le service".


Joseph COUGOULAT effectue son service militaire à partir du octobre 1908 au 118ème régiment d'infanterie dont la caserne de garnison se trouve à Quimper. Il est rendu à sa famille, le 25 septembre 1910.

 

Il décède dans les premiers jours de la guerre, le 22 août 1914, à Maissin en Belgique. Il a 26 ans.

 

Bien que ne résidant pas à Groix, Joseph Marie était bien connu des groisillons, étant le frère ainé de Jean Vincent Marie COUGOULAT, le mari de Joséphine KERBIRIO et menuisier au bourg de Loctudy qui lui aussi sera tué le 18 septembre1917 dabs le secteur de Verdun après 3 ans de guerre.  

 

A la déclaration de guerre, Joseph Marie COUGOULAT n'a pas encore 27 ans. Il est mobilisé dans son régiment d’origine, le 118ème Régiment d’infanterie dont le casernement se trouve à Quimper. Il appartient à la 44ème B.I., 22ème  D.I., 11ème C.A. Il est constitué de 3 bataillons en forme de combat.  Il le rejoint le 3 août, comme beaucoup d'autres. Il y reste affecté.

 

Le 118ème, sous le commandement du colonel François, s'embarque le 8 août, en 3 trains, via Vannes, Nantes, Angers, Le Mans, Versailles, Meaux, Reims. Accueil sympathique des populations sur tout le parcours. En cours de route, on apprend la prise de Mulhouse. Cette nouvelle soulève de nombreux cris d'enthousiasme. Tout le monde est joyeux, on a l'impression que chacun est décidé à faire tout son devoir pour défendre la Patrie menacée.  Le régiment débarque les 9 et 10 août, à Autry et  Challerenge, dans les Ardennes.

 

Il a un effectif de 55 officiers et de 3.320 hommes de troupe, auxquels il faut ajouter 12 éclaireurs montés du 2ème  chasseurs, de Pontivy et 186 chevaux. Le 10 août, le 2ème  et  3ème bataillons cantonne à  La  Croix-aux-Bois et le 1er bataillon à Boult-aux-Bois. Le 11, ils se porte sur Fontenoy (1er et 3ème bat.) et Saint-Pierremont (2ème bat.), où ils stationnent les 12 et 13. Le 118ème cantonne, le 14 à la Berlière, le 15  à Buison,  le 16  à Francheval (E.-M., 2ème et 3ème bat.) et à Rubécourt (1er bat.).

 

Du 16 au 20, le régiment occupe ces deux mêmes cantonnements, il s'organise sur la position.

 

Le 21 août, le régiment se porte (par Pourru-au-Bois, ferme  de  la  Grande-Hez-Bas, Dohan, les Hayons), sur Auby-s/semois (Belgique), où il cantonne. En arrivant à Auby, village situé au-delà de la Semois, au N.-E. de Bouillon, nous voyons défiler une division de cavalerie, qui venait de livrer un combat victorieux à la cavalerie allemande, aux environs de Florenville, mais qui avait dû se replier devant l'infanterie allemande. Cette division de cavalerie était accompagnée de son artillerie et les camarades nous racontaient qu'ils avaient fait du bon travail, ce qui nous enthousiasmait.

 

 

Le  19ème R.I., criblé  de  projectiles,  a  déjà subi de  grosses pertes et  ne  peut dépasser  la ferme de Bellevue. L'uniforme grisâtre de l'ennemi  est  tellement invisible que l'on ne se rend pas compte des points d'où partent les coups. Une batterie du 35ème qui, dès Le  début de l'action, est venue appuyer le 19ème, a déjà perdu la plus  grande  partie de son effectif et  ne peut tirer un coup de  canon sans être aussitôt  criblée d'obus.

 

Le 116ème, puis Le 62ème et enfin Le 337ème, viennent succes-sivement, nous renforcer, et par bonds successifs, nous pouvons gagner du terrain et nous rapprocher de l'ennemi. Pendant ce temps, une autre batterie d'artillerie prend position à l'Ouest de Bellevue, à l'abri d'une crête, à 1.200 m. environ des tranchées ennemies et, en très peu de temps, elle règle son tir et exécute un feu violent sur les tranchées d'où sort bientôt l'ennemi en fuite. Aussitôt, toute la ligne (19ème et 118ème) charge à la baïonnette et les Allemands abandonnent leurs tranchées et le village, en y laissant de nombreux morts et blessés.

 

 

Il est environ 16 h, le 19ème régiment est maître de Maissin et de ses abords. Mais peu de temps après, les hommes du flanc droit reçoivent de nombreux projectiles. Quelques fractions refondées en toute hâte font face à l'ennemi de ce côté et ouvrent immédiatement le feu. L'ennemi contenu devant la ferme de Bellevue, où se trouvent de nombreux blessés, riposte avec violence, en battant principalement l'entrée de la ferme pendant que d'autres fractions continuent à gagner du terrain vers Paliseul.

 

A 17h30, l'ordre de se replier est donné. La retraite s'exécute à travers bois, sur Paliseul. Les lisières N. et N.-E. du village sont organisées, des tranchées y sont creusées et, garnies de tirailleurs. On y passe la nuit, l’ennemi ne poursuit pas.

 

Pendant  la  nuit  et,  jusqu'au  23  août,  à   9h,  une  poignée  de  braves, composée d'hommes du 2ème bataillon du 118ème, du 19ème, du 62ème défendait vigoureusement le village de Maissin contre plusieurs retours offensifs de l'ennemi, qui perdait beaucoup de monde dans  ces contre-attaques.

 

Les actes d'héroïsme accomplis dans Maissin sont nombreux, et leurs auteurs ont disparu. Certains affirment avoir vu des hommes postés aux fenêtres des maisons situées à l'issue du village qui auraient tué de nombreux ennemis, un à un, au fur et à mesure qu'ils se présentaient dans leur champ de tir.

 

La petite troupe n'évacuait le village qu'après avoir épuisé toutes ses munitions, ainsi que celles des morts et des blessés. Les groupes, encerclés, parvenaient en combattant à se frayer un passage et à joindre Paliseul.

 

 

Considéré comme disparu à l’issue de la bataille Joseph Marie COUGOULAT ne réapparaît pas et n’est pas, non plus, déclaré comme prisonnier. Malheureusement le JMO du 118ème R.I., ne respectant pas les consignes de rédaction de ce document, ne produit pas la liste des morts, blessés, disparus de la journée du 22/23 août 1914.

 

Longtemps plus tard, un jugement déclaratif du tribunal de Lorient, en date du 29 décembre 1920, confirmera sa mort, tué à l’ennemi le 22 août 1914, « Mort pour la France ». Il sera honoré, à titre posthume, de la Croix de guerre avec une étoile d'argent. (voir J.O. du 16 mai 1922)

 

Le jugement sera transcrit sur le registre d’état-civil de la commune de Merlevenez, le 19 janvier 1921.

 

Son nom est gravé sur le Monument aux morts de Merlevenez.

 

Finalement retrouvé, son corps est inhumé dans la nécropole nationale de Fère-Champenoise, tombe individuelle n° 497 (vérifié, mais curieusement, selon la fiche SDG SGA, son corps semble avoir été retrouvé à Lenharrée)    

Nécropole nationale de Fère-Champenoise

Plaque du monuments, le nom de Joseph COUGOULAT est en partie effacé

(3ème de la 3ème colonne)

 

Monument aux morts de Merlenevez. Au dos de ce monument, il est écrit :

«JAMES NE VEHET ANKOÉHET » (« Jamais ne serez oubliés » ) >>>>>>>>>

 

 

Son frère cadet Jean Vincent est tué 3 ans après, le 16 septembre 1917 à Ornes (Meuse) au bois de Chaume (secteur de Verdun).

Le 22 août, le 118ème R.I. quitte Auby, à 4 h. 45 et entre dans la colonne formée par la division à Bellevaux, à 8 h30.

Le 19ème R.I. constitue l'infanterie de l'avant-garde de la division. Le 118ème  R.I., tête du gros de la colonne, atteint la voie ferrée de Paliseul, à 10h30. Coupé par des éléments de la 21ème D.I., il arrête sa marche, qu'il ne reprend qu'à 11h et passe à midi à Paliseul, marchant sur Maissin. Malgré la forte chaleur, la longueur de l'étape, le peu de nourriture pris en cours de route, le moral est excellent.

Les renseignements communiqués sont les suivants :

« Une colonne ennemie se dirige de Tronquoy (au N. de Neufchâteau) vers le N.-0.; attaquer l'ennemi partout où on le rencontrera. Le XIème C.A. marche sur Maissin, qui n'est pas occupé

 

Après avoir dépassé Paliseul, d'environ 2 km, les hommes commencent à entendre la fusillade et peu après ils rencon-trent des chevaux et des cavaliers blessés, qui se portaient en arrière. A 12 h15, le 1er bataillon reçoit l'ordre d'aller  s'installer en  flanc-garde aux lisières N.-E. et Est du massif de Franc-Bois, et  le  3ème  bataillon d'aller occuper la crête 405 /1.500 m. S.-E. de Maissin) pour surveiller les directions Anloy-Villance.

Le  2ème bataillon est  envoyé vers la  ferme de la  "Réunion des Laboureurs" (300 m. O. de la grande route), en soutien du 19ème R.I., qui est arrêté par des  feux violents,  à la  sortie S. du village de Maissin. Le combat s'engage, c'est Le baptême du feu.

 

Le terrain où ils allaient combattre, les Ardennes belges, de Givet à Virton, est une succession de plateaux boisés, aux forêts très denses, découpés par des cours d'eau qui ont cloisonné le paysage en creusant des ravins profonds. Les villages sont nichés dans des cuvettes ou dans des clairières de la forêt.

 

Les ennemis sont retranchés là depuis plusieurs jours, dans les bois, les champs d'avoine et champs de blé. Les bataillons se déploient et progressent sous une grêle de balles. Dans un élan magnifique, les officiers, sabre au clair, les soldats, baïonnette au canon, se portent à l'assaut des positions ennemies, fortement défendues par des fils de fer et de nombreuses mitrailleuses.

 

 

Suivant le mouvement général de l'armée qui se reportait vers la frontière française, le 11ème C.A. battit en retraite le 23 août en abandonnant le champ de bataille, les morts et les blessés intransportables à l'ennemi. Des centaines de blessés reçurent les premiers soins dans les villages de Transinne, Redu et Our où ils furent faits prisonniers par l'armée allemande. On peut considérer cette bataille de rencontre comme l'un des plus meurtriers affrontements, avec Rossignol et Ethe, du samedi 22 août 1914 dans la province belge de Luxembourg.

 

Concernant le 118ème R.I., les compagnies restantes, constituées, avec un effectif de  125 à 180 hommes, sont les  1ère, 2ème, 4ème, et 7ème. Les 5ème, 6ème, 9ème compagnies n'ont que des éléments ne dépassant pas l'effectif d'une section. Les 11ème et 12ème compagnies ont des débris qui ont pu rallier Paliseul dans la nuit. Les 3ème, 9ème, 10ème ne sont pas représentées à Paliseul; des fractions de ces compagnies rejoignent le lendemain à Bouillon. La 11ème  compagnie n'ayant plus que 1 caporal et 7 hommes, est supprimée provi-soirement.

 

Ces chiffres sont éloquents et montrent à quel point le régiment s'est sacrifié au cours de cette journée du 22 août ! La plus sanglante de toute la guerre (22.000 morts)

 

Les pertes, côté français pour ce corps d'armée sont de 4 500 hommes blessés ou tués. A elle seule, la plus éprouvée, la 44ème brigade (composé de 2 régiments bretons: les  19ème et 118ème RI) perdit 2.000 fantassins dont Joseph Marie Cougoulat, disparu.

 

extrait du J.O. 16 mai 1922 (avec une erreur dans le prénom)