Mort pour la France

David Augustin Jean RÉNIER (1884 / 1914)

vue d'un coin de Bourbourg Campagne

1er dépôt des équipages Cherbourg

vue de la rue où il résidait avec Eugénie GUILLIN

 

Fils de Victor Benjamin Auguste, un ouvrier, né à Brouckerque (Nord) en 1856 et de Eugénie Octavie Jossine DRIEUX, une servante, née à Bourbourg-Campagne (Nord) en 1861, mariés à Bourbourg-Campagne en avril 1881 et domiciliés à Bourbourg-Campagne, David Augustin Jean RÉNIER est né le 2 mars 1884 à Bourbourg-Campagne, une petite ville au sud-ouest de Dunkerque.

 

Après quelques années passées sur les bancs de l'école, David entre à l'usine.

 

Probablement David RÉNIER s'engage dans la Marine en ? (Les bombardement de Dunkerque durant les deux guerres ont gravement endommagés les archives). Il fait ses classes au 1er dépôt des équipages de la flotte à Cherbourg (Manche), sous le matricule 39182-1 et obtiendra son brevet de chauffeur.

 

Après ses années passées dans la Marine, David s'installe à Malo-les bains, une petite ville au Nord de Dunkerque et reprend son métier d'ouvrier. Il rencontre une petite bretonne de Groix, où elle est née en 1889, servante de son état, qui vient d'échouer à Malo-les-bains avant d'être passé par Créteil (Seine). Eugénie Marie GUILLIN et David RÉNIER se marient à Malo-les bains le  5 juin 1909. Ils résideront au 111 rue Gaspard Neuts et auront rapidement deux enfants.


 

Quand la guerre éclate en août 1914, Davis RÉNIER est âgé d'un peu plus de 30 ans et la famille vient d'accueillir son deuxième enfant, une fille, Denise Hélène, née le 3 juillet 1914.

 

David est mobilisé dès le premier jour et il rejoint le 1er dépôt des équipages de la flotte à Cherbourg. Ce dépôt à la charge de fournir 750 hommes pour le 1er bataillon du 1er régiment le 8 août et 250 hommes pour la 1ère compagnie du 1er bataillon du 2ème régiment le 16 août; c'est à ce deuxième groupe que David Augustin RÉNIER est affecté.

 

 

Le lendemain, au Nord de Montdidier, les hommes de la 6èmeCompagnie ouvrent le feu sur une patrouille de uhlans. Le 20 septembre, le train blindé se dirige sur Roye pour exercer la surveillance de la ligne. Au cours de cette reconnaissance, à la Boissière, la 6ème compagnie a un engagement cette fois avec une forte colonne de cavalerie soutenue par une puissante artillerie; les fusiliers la mettent en fuite et lui infligent de grosses pertes. Mais le tir de l'artillerie allemande dont la mise en batterie est remarquablement rapide, oblige le train touché par une quarantaine d’obus, à battre en retraite. La compagnie compte 3 tués et 8 blessés dont trois gravement. Toutefois, son moral reste excellent. Les hommes ne retiennent qu’une chose: la débandade éperdue des cavaliers. La réputation des Allemands leur paraît surfaite. 

 

Pour David Augustin Jean, cela durera malheureusement moins longtemps.

 

Immédiatement, dans la journée du 16, commence l’organisation de la défense: installation de barrages, de zones de repli successives, étude du terrain pour la défense de jour et de nuit, disposition des mitrailleuses. En ville, des barricades sont construites avec des pavés. Les fusiliers travaillent avec des outils pris sur place. Mais le plus pressé a été de creuser à 500 m en avant de la ville, un demi-cercle de retranchements dont les deux extrémités s’appuient sur l’Yser. Pour la première fois, les fusiliers-marins creusent des boyaux d’accès aux tranchées.

 

Dixmude est attaquée vers 16 h par de l’infanterie et de l'artillerie venant d’Eesen. L’action est assez chaude; et se prolonge pendant la nuit et la matinée du 17. C’est le baptême des marmites (obus de gros calibre), probablement du 155. Impressionnant et à l’effet démoralisant. « Un  seul  blessé, le cuisinier, traversé de gauche à droite, à hauteur de la taille, par un shrapnell ou un éclat. ... C’est le premier blessé de Dixmude ». Mais la brigade brise ce premier assaut des divisions allemandes.

 

 

 

 

Le 18 octobre, la matinée est calme. Une compagnie est envoyée à la gare de Dixmude en réserve de la défense de la ville. On observe des patrouilles de cavalerie ennemie vers Dixmude, et on entend canonnade et fusillade au nord vers Couckelaere.

Le Roi des Belges vient visiter les tranchées de l’Yser.

 

Le corps de cavalerie française a pris Clerken et continue sur Zarren. A Zarren, le commandant de cette cavalerie demande l’appui d’un bataillon de marins pour pouvoir continuer sur Thourout. Le 3ème bataillon/ II RFM avec deux autos-mitrailleuses belges est aussitôt envoyé à Eessen où il s’installe pendant la nuit en halte gardée face au nord, et en liaison avec Zarren.

 

 

Le 3ème bataillon du 2ème RFM débouche de Wladaloo sur Hoograde. L’ennemi met alors en action son artillerie lourde qui recherche sans succès le groupe placé au nord de Dixmude. A 17 h, Beerst est occupée par les marins. Les lisières nord du village sont mis en état de défense

 

Mais à partir de 18 h la brigade décroche et rentre pendant la nuit dans les cantonnements tout à fait insuffisants de Caeskerke (2ème régiment) et Saint-Jacques Capelle (1er régiment). Ces mouvements sont terminés à 23 h.

 

Louis Jean Marie BLAUREC, un groisillon du même bataillon (1er bataillon du 2ème RFM) que David, est lui aussi tué durant cette journée.

extrait du Journal officiel du 9 mars 1922

Transcription du jugement en date du 19 octobre 1920 - Registre d'état-civil de Malo les Bains

 

 

Son épouse, Eugénie GUILLIN, se remariera après le jugement déclaratif du 28 août 1920, le 4 juin 1921 à Malo-les-Bains, avec un groisillon, un cousin germain Laurent Joachim LE GOFF, né en 1894. Orphelin, son tuteur était Henri GUILLIN, frère de la mère de Laurent et frère du père d'Eugénie. Ils vivront à Malo-les-Bains et auront des enfants.

 

Le 2ème régiment des fusiliers marins, membre de la Brigade arrive à Paris vers le 22 août. La 1ère compagnie est logée à la Maison de la Légion d'honneur à Saint Denis. Leur mission est le maintien de l'ordre dans les rues parisiennes et des communes à proximité

Le 2 septembre, la brigade quitte ses cantonnements parisiens. Elle est incorporée dans le corps d'armée affecté à la défense du camp retranché de Paris. Les fusiliers sont organisés en force de campagne et s'établissent en dehors de Paris. De nombreuses missions leur sont confiées: soutien des forces d'infanterie, occupation des villes de la région parisienne pour y maintenir l'ordre et assurer une présence militaire, construction d'un pont flottant sur l'Oise.

 

Vers le 15 septembre, le 2ème régiment (celui de David RÉNIER) est engagé dans une opération destinée à «purger» les forêts de Chantilly et d'Ermenonville des derniers Allemands qui s'y trouvent depuis leur retraite.

 

Le 18 septembre, la 6ème Compagnie (2ème bataillon - 1er régiment) se rend à Creil en train blindé pour une mission spéciale: s’assurer de la manière dont fonctionne le service de garde de la ligne de chemin de fer Pontoise - Creil - et au delà, et prendre toutes les mesures nécessaires en vue de protéger les réparations des voies dans la région du Nord. Il doit aussi «promener» ses hommes dans la région non encore occupée par les troupes françaises pour y produire de l’effet moral, c'est-à-dire refroidir l’ardeur des patrouilles allemandes, redonner de la confiance aux populations, permettre aux travailleurs militaires -génie et chemin de fer de campagne- de faire leur métier en toute  tranquillité d’esprit. «Pour des marins, écrit Pinguet, il n’est pas de mission qui convienne mieux: audace, initiative, esprit de décision».

 

 

Le 26 septembre le 1er régiment se rend à Amiens pour contribuer couper la route de la mer aux allemands, mais il est rapidement rappelé et les deux régiments se rassemblent à Pierrefitte le 4 octobre. Ils embarquent le 7, en train, pour Dunkerque, puis pour Anvers afin d'aller prêter main forte aux belges qui sont en difficulté.

 

A Gand, le 8, la Brigade reçoit l'ordre de descendre du train, la voie étant coupée au-delà. Les fusiliers marins se battent les 9, 10 et 11 octobre pour protéger la retraite des troupes qui évacuent Anvers, puis décrochent vers Dixmude qu’ils atteignent le 15 octobre après une marche épuisante. Poursuivis par 50 000 allemands, ces hommes habitués à vivre nu-pieds sur le pont de leurs bateaux, fournissent des marches de trente et quarante kilomètres. Le lendemain, 16 octobre, la ligne de défense des marins est à peine établie que les Allemands déclenchent à 16 h leur première attaque par artillerie et infanterie. Les combats pour la possession de Dixmude viennent de commencer, opposant les 6 000 marins de l'Amiral Ronac'h et les 5 000 belges à 3 corps d'armées allemands.

 

Dès le 16 octobre les attaques d'infanterie, mais surtout l'artillerie harcèlent les défenses de Dixmude. Dans la soirée des ordres précis arrivent. L'Amiral Ronarc'h les traduit ainsi à ses hommes "Tenez 4 jours". En fait, cela durera 25 jours au prix de pertes humaines effroyables.

 

 

Le 17 octobre, les shrapnells tombent sur Dixmude et sur les tranchées en avant sans grands dommages. A 13 h, l’ennemi se retire. L’après-midi est calme; on travaille à refaire et à consolider les tranchées des lisières extérieures de Dixmude, à organiser les tranchées de l’Yser (rive ouest), et les tranchées des réserves. Ce travail sera repris d’ailleurs à chaque accalmie et toutes les nuits.

 

Un renfort d’artillerie arrive, qui donnent un total de 72 pièces de campagne. Ces nouveaux groupes sont répartis: un sur l’Yser au nord de Caeskerke, un au sud d’Oostkerke, un à la ferme Bien-Acquis, un à de Kappelhoek et un à Saint-Jacques Capelle. Ils sont reliés par téléphone au poste de commandement de la gare de Caeskerke qui se réserve l’emploi de cette artillerie.

 

Toutefois, ordre permanent est donné d’ouvrir instantanément le feu, de jour comme de nuit, sur les abords de Dixmude toutes les fois qu’une fusillade, ou un bruit des mitrailleuses, indique clairement qu’une attaque d’infanterie est dirigée contre nos tranchées.

 

 

Le 19 octobre, l’ennemi attaque en force Leke, Keyem et Beerst. Ces villages sont défendus par des forces belges qui demandent des renforts. Ordre est donné à la brigade de se porter sur Keyem pour enrayer l’attaque ennemie sur ce point.

 

Le 1er bataillon du 2ème RFM est envoyé pour attaquer Keyem par la route. Le 2ème bataillon du 2ème RFM est en soutien à cette attaque. Le 3ème bataillon du 2ème RFM qui est à Eessen attaque Hoograde par la route de Wladsloo.

  

L’artillerie appuie l’attaque, 2 batteries traversent Dixmude et se placent perpendiculairement à la route de Keyem, à la sortie nord de la ville. Les autres en situation de tirer vers Beerst et Keyem ont l’ordre de préparer l’attaque, mais l’action de l’artillerie sera gênée par l’incertitude dans laquelle on se trouve de savoir si Keyem et Beerst sont ou non aux mains des Allemands.

 

Le mouvement commence à 10 h. Les Belges n’occupaient pas Beerst, et le 1er bataillon du 2ème RFM est accueilli par des coups de feu partant du village. Il se déploie très malaisément en raison du terrain coupé de canaux, de fossés pleins d’eau. Il est obligé d’attaquer d’abord Beerst. Il en est assez éprouvé. C'est proba-blement dans cet assaut que David RÉNIER est tué.

 

Le 2ème bataillon du 2ème RFM qui le suit en soutien le remplace dans l'attaque et, en même temps, se couvre du côté de Keyem. Le 2ème bataillon du 1er RFM lui vient en soutien. Le 1er bataillon du 2ème RFM rentre à Dixmude.

 

 

 

David Augustin Jean RÉNIER est d'abord porté disparu à la suite de cette bataille, tué probablement lors des combats de la matinée du 19 octobre 1914. Son corps est resté sur le champ de bataille. Il n’a jamais réapparu, ni porté prisonnier. Il est tué, mort à l'ennemi, en fin de matinée, dans l'attaque de Beers (Belgique)

 

Un jugement déclaratif du tribunal de Dunkerque en date du 28 août 1920, près de 6 ans après, dit qu’il est effectivement mort au combat le 19 octobre 1914, « Mort pour la France » et que ce jugement tiendra lieu d’acte de décès.

 

Le jugement a été transcris dans le registre d’état civil de la commune de Malo-les-Bains à la date du 19 octobre 1920.

 

Son corps ne sera jamais retrouvé, ou s’il a été retrouvé, il n’a pu être identifié et a été inhumé dans l'un des ossuaires de la nécropole de Saint Charles de Potyze (Ypres) qui compte aujourd'hui 762 tombes françaises de soldats non identifiés et un ossuaire de 616 corps inconnus.    

 

Il avait 30 ans et laissait une veuve et deus jeunes enfants. La plus jeune ayant moins de 4 mois. Pour lui, la guerre avait durée 50 jours.

 

Son nom est gravé sur une plaque mémorielle dans l'église de Malo-les-Bains, le Monument aux morts de Malo-les-Bains ne porte pas de noms et il sera honoré d'une citation.

 

 

nécropole de Saint Charles de Potyze (Ypres)

 

Plaques mémorielles des Morts pour la France - église de Malo les bains