Dundee "Rédempteur" (1916)

 

Le Dundee « Le Rédempteur », un nouvel accident dû aux mines du "Môwe", heureusement sans victimes.

 

Le 31 mars 1916, le "Rédempteur", un dragueur des Sables-d'Olonne, saute sur une mine. L'équipage a eu le temps de se réfugier dans le canot, avant que l'engin ne réduise le dundee en miettes. Il n'y a heureusement aucune victime.

 

C'est un dundee de pêche de 36 tx,  immatriculé aux Sables-d’Olonne, n° 125. Son patron qui est aussi son armateur (propriétaire) est Auguste HÉDANT

 

Le 31 mars 1916, vers 7 heures du matin, étant à 52 milles dans le S. 34 W. du phare des Baleines, le bâtiment remonta dans son chalut une mine, qui vint à environ deux mètres du bord. Le patron fit aussitôt mettre le canot à la mer et se réfugia, avec son équipage, à bord du dundee "René-Paul", qui se trouvait à environ 200 mètres des lieux. Ce bateau les remit ensuite à la "Clémentine" qui les débarqua la nuit suivante aux Sables-d’Olonne.  A 10 heures, ayant vraisemblablement touché la coque ou le train de pêche, la mine explosa, détruisant totalement le "Rédempteur".

 

" Un Équipage l’échappe belle ".

 

Vendredi dernier [31 mars 1916], vers 7 heures, le dundee "Rédempteur", du port des Sables-d’Olonne, LS 125, monté par le patron-armateur Auguste Hédant, 51 ans, les matelots Massé, 50 ans, Grimaud, 30 ans, Mérieau, 54 ans, Bernard, 40 ans, et le mousse Rousseau, 16 ans, était à draguer au large du phare des Baleines (au nord de l'île de Ré), quand il s’arrêta tout à coup.

 

Le patron donna l’ordre de lever le train de pêche pour voir ce qui se passait, et, au moment où le chalut arriva à la surface, il aperçut une mine à deux mètres sur le côté du bateau.

 

Il fit aussitôt mettre le canot à la mer et se réfugia, avec son équipage à bord du René-Paul qui se trouvait à environ 200 mètres de là. Ce bateau les débarqua ensuite sur la Clémentine. Pendant qu’on prévenait l’Inscription Maritime, la Clémentine surveillait le Rédempteur.

 

Vers 10 heures, la mine, ayant sans doute heurté soit la drague, soit le bateau, fit explosion et le Rédempteur fut réduit en miettes.

 

L’équipage du Rédempteur est rentré aux Sables dans la nuit de vendredi à samedi, à bord de la Clémentine. »

 

l'étoile fixe approximativement l'endroit de l'explosion du "Rédempteur"

 

Extrait de la "Vendée Républicaine" du 8 avril 1916

 

L'équipage du "Rédempteur" en mars 1916 :

 

patron-armateur: Auguste HÉDANT, âgé de 51 ans, né en juillet 1865 sur l'île d'Arz, marié en 1890 aux Sables d'Olonne, avec Rose COUTOUIS résidant aux Sables d'Olonne

matelots:  ?  MASSÉ, 50 ans,

                Aimé Jules GRIMAUD, âgé de 30 ans, né en octobre 1888 aux Sables d'Olonne, marié en 1910, avec Léontine GUÉRIN, résidant aux Sables d'Olonne

                    Ernest (?) MÉRIEAU, 54 ans, né vers 1859

                     ?   BERNARD, 40 ans,

mousse     Pierre Victor Rousseau, né en novembre 1900 aux Sables d'Olonne, 16 ans,


extrait de la "La Vendée Républicaine", n° 1.447, Samedi 13 janvier 1912

 

Thomas BIHAN, le patron sauveteur

 

 

Le "Rédempteur", est un dundee bien connu des groisillons

 

Le 7 janvier 1912, dans le Sud-Ouest de La Coubre, le dundee "Rédempteur " avait déjà, par forte tempête, miraculeusement échappé au naufrage. Son équipage ne dut en effet son salut qu’au courage et à l'intrépidité des hommes du dundee "Saint-Thomas", immatriculé à Groix, n° 4045, et spécialement de son patron, Thomas BIHAN.

 

Un Héros de la Mer

J’écris le titre de cet article avec un respect infini et le nom de Thomas Bihan, de Groix, patron du Saint-Thomas, avec une émotion si profonde qu’il ne me souvient pas d’en avoir éprouvé de semblable. Les poètes ont chanté l’héroïsme simple des marins de nos côtes ; les écrivains, les philanthropes leur ont rendu l’hommage qu’ils ont mérité hier, qu’ils méritent aujourd’hui et dont ils resteront dignes demain. Mais les premiers, dans leurs poèmes les plus hautement inspirés ; les autres dans leurs narrations les plus attendrissantes, n’ont rien écrit de comparable au récit que viennent de me faire, sans phrases vaines, les matelots du "Rédempteur".

 

Voici :

Le "Rédempteur" des Sables-d’Olonne a pour patron Auguste Hédant et pour matelots : Charles Pateau ; Joseph Cadoret ; Élie Poiraudeau ; Dappel-Voisin ; Pierre Barreteau et Adolphe Hédant.

Dimanche matin, vers 10 heures, le Rédempteur se trouvait au Sud-Ouest de la Coubre. La tempête faisait rage. Les lames assaillaient le navire ; le vent courbait les mâts, arrachait les toiles lorsque soudain un coup de tangage, meurtrier comme le choc d’un bélier, ouvrit la coque du malheureux bateau qui se trouva de suite en perdition.

 

Le pavillon de détresse fut hissé de suite, tandis que l’équipage à demi-nu sous la rafale luttait désespérément en attendant un secours qu’il n'osait plus espérer.

 

Le fils de Thomas Bihan s’aperçut de rappel des camarades du Rédempteur et, à midi, sur l’ordre du patron du Saint-Thomas, n° 1045, de Groix, le canot de ce dundee était mis à la mer. L’Océan était comme fou de fureur. Mais l’admirable folie de dévouement des sauveteurs ne le cédait en rien à celle des flots démontés et des vents déchaînés.

 

Au prix de mille dangers, chaque vague pouvant être pour eux un suaire, Thomas Bihan et ses compagnons s’approchaient du Rédempteur. Le frêle canot, tantôt bondissait au sommet des vagues, tantôt disparaissait sous les cinglantes écumes, mais il avançait toujours, et les Sablais éperdus d’admiration, du pont balayé de leur bateau, regardaient peu à peu le salut venir vers eux.

 

Quatre fois le canot du Saint-Thomas chavira, et quatre fois, sans se décourager, les matelots héroïques reprirent place à la barre et sur les bancs. Un à un, et au prix de quelles difficultés ! ils arrachèrent à une mort certaine nos compatriotes. Durant huit heures — huit heures, entendez-vous ! — tandis que la tempête redoublait de violence, ils ignorèrent la fatigue, le découragement et la peur.

 

Cependant la nuit étant presque venue, Cadoret restait seul sur le bateau qui, selon son expression, coulait sous ses pieds. Thomas Bihan, d’un mot, surexcita le courage des siens. «Il faut sauver le denier, dit-il. Je resterai seul avec cet homme plutôt que de l’abandonner !»

 

Et à 18h, après les Hédant, Pateau, Dappel-Voisin, Barreteau et Poiraudeau, Cadoret était sauvé.

 

Mais l'héroïsme n’a point de bornes, parmi nos marins; les hommes à l’abri, Bihan voulait aussi sauver le "Rédempteur". Et toute la nuit il resta près du bateau en détresse qu’il n’abandonna qu’en raison de la furie grandissante de la mer, de l’épuisement de ses hommes harassés par la lutte épique et auxquels les vivres manquaient.

 

Dans la nuit, le dundee "Amour-du-Travail", d’Étel, à la faveur d’une accalmie, put prendre à la remorque le "Rédempteur" qu’il ramena à La Rochelle. Nos amis des Sables, et nous en sommes profondément heureux, sont hors de danger. Mais il nous reste à dire quelques mots en ce qui concerne Thomas Bihan, de Groix, patron du "Saint-Thomas", et ses valeureux compagnons.

 

Thomas Bihan peut déjà accrocher sur sa poitrine des médailles de sauvetage. S’il a fait, en matière d’héroïsme dimanche dernier, un coup de maître, il n’en était pas à son coup d’essai. A Thomas Bihan, soixante-deux hommes doivent la vie. Il a arraché à une mort certaine, au péril de son existence, soixante-deux hommes en perdition sur la mer. Soixante-deux hommes ! Et je demande à ceux qui lisent ces lignes de compter celles dont l’héroïsme de Bihan a empêché qu’elles ne fussent des mères affligées et des veuves inconsolables, et ceux aussi dont l’indomptable courage de ce héros n’a pas voulu qu’ils devinssent des orphelins !

Tout commentaire serait superflu. Les faits parlent ici avec une autre autorité que les mots. Les compagnons de Bihan ont été héroïques, nous demandons au gouvernement que leurs noms et leurs poitrines ne soient point oubliés.

Ces noms, les voici : Pierre Tuaudun, Eugène Bihan, Eugène Tuaudun, Adémar Barbier, Arlet Tromet, Yacinthe Bihan, mousse. Quant à Thomas Bihan lui même, il nous suffira de traduire ici la demande que formulait d’une voix que l’émotion faisait trembler un des « rescapés » du Rédempteur, parlant au nom de tous ses camarades : « Pensez-vous, disait-il, que sur la chemise en laine de Bihan, le ruban rouge ne serait pas bien placé ? » Le sentiment qui a dicté cette indication part des nobles cœurs reconnaissants. Il plairait à tous qu’elle arrive aux oreilles et au cœur de M. le Ministre de la Marine. Pouvons-nous espérer qu’elle sera entendue ?        Jean RENOU.

 


 

 L'appel du Journaliste a été entendu

 

Par décision du Ministre de la Marine en date du 5 avril 1912  les récompenses suivantes furent accordées aux membres de l’équipage du dundee groisillon "Saint-Thomas", avec cette citation collective : « Ont secouru, par une mer démontée, l’équipage du navire le "Rédempteur", en perdition dans le Sud-Ouest de la Coubre et après de grandes difficultés, ont réussi à le recueillir à bord du Saint-Thomas, le 7 janvier 1912. » :

• Médaille en argent de 2e classe :

— BIHAN Thomas, patron, inscrit à Groix, n° 906; né le 12 décembre 1866 à Groix

• Médaille de bronze :

— BIHAN Eugène Marie, matelot, inscrit à Groix, n° 1.385 ; né le 25 août 1877 à Groix

— BARBIER Adhémar, matelot, inscrit à Groix, n° 815 ?; né le 25 août 1884 à Groix

— TUAUDEN Jean Pierre, matelot, inscrit à Lorient, f° 6.376, n° 2.370 ;

— TROCMÉ Hervé Marie, matelot, inscrit à Douarnenez, n° 2.901 ;

— TUAUDEN Eugène Marie, matelot, inscrit à Lorient, n° 4.045 ;

— BIHAN Hyacinthe, fils de Thomas, novice, inscrit à Groix, n° 1.350.; né à Groix le 10 août 1895.

 

 

extrait du J.O. du 14 avril 1912


un groupe de dundees groisillons semblables au "Saint Thomas"

 

Saint-Thomas.

Dundee de pêche construit à Belle-Ile en 1910 ;

immatriculé G. 1045, puis LGX 2897, dépecé en 1935.

 

En étaient initialement copropriétaires :

― Pour 6/16ème, BIHAN Thomas, époux de Victoire BIHAN, patron-pêcheur, né le 12 décembre 1866 et domicilié à Locmaria (Île de Groix) ;

― Pour 6/16ème, Marie-Josèphe STÉPHAN, veuve de Jean-Baptiste NEXER, née le 12 juillet 1827, domiciliée à Locmaria (Île de Groix) ;

― Pour 4/16ème, Marie Joséphine NOËL, célibataire, née le 2 avril 1857, domiciliée au bourg de Groix (Île de Groix).

 

Ce bâtiment naviguait toujours en 1929, date à laquelle la répartition de ses parts de copropriété fut modifiée de la sorte :

― Pour 6/16ème, BIHAN Thomas Auguste fils, qui a repris les parts de son père, patron-pêcheur, domicilié à Locmaria (Île de Groix) ;

― Pour 6/16ème, Marie-Josèphe STÉPHAN, précitée ;

― Pour 4/16ème, BIHAN Thomas père précité, qui a racheté ou hérité des parts de Marie Joséphine NOEL, pré-citée.