Dès les premiers jours d’août 1914, une brigade de Fusiliers Marins est constituée sous le commandement du Contre-amiral RONARC’H. D'abord envoyé à Paris, pour le maintien de l'ordre, puis incorporé dans les unités pour défendre le camp retranché de Paris et enfin transportée en Belgique au mois d’octobre suivant, elle participe à la bataille de l’Yser, et combat dans les Flandres jusqu’en novembre 1915. A cette date, la brigade est supprimée et remplacée par un bataillon de marche, qui prend part à des actions importantes. Il n’est dissout qu’après l’armistice, en février 1919.
CONSTITUTION DE LA BRIGADE
Un premier régiment est constitué d'éléments superflus à l'armements des bâtiments de la Marine
Dans l’esprit du Ministre qui le décida, dès les premiers jours de guerre (D.M. des 7 et 9 août 1914), il est affecté à la police de Paris.
Les quatre premiers dépôts en fournirent les éléments :
- 1er bataillon formé de 3 compagnies (+/- 750 hommes) issue du dépôt de Cherbourg et d'une compagnie (+/- 250 hommes) issue du dépôt de Rochefort.
- 2ème bataillon formé de 4 compagnies (+/- 1.000 hommes) issues du dépôt de Brest
- 3ème bataillon formé de 4 compagnies (+/- 1.000 hommes) issues du dépôt de Lorient
Le Capitaine de Vaisseau DELAGE prenait le commandement du 1er Régiment de Marins ainsi constitué.
Une dépêche Ministérielle du 16 août prescrit aux dépôts la constitution de 8 nouvelles compagnies destinées à former un 2ème Régiment de Marins : Cherbourg fournira 1 compagnie (+/- 250 hommes), Lorient trois (+/- 750 hommes) pour un premier bataillon et Brest quatre (+/- 1.000 hommes) pour un second. La formation d’un troisième bataillon est prescrite au port de Rochefort par Dépêche Ministérielle du 25 août. Le Capitaine de Vaisseau VARNEY prend le commandement du 2ème régiment de Marins. La constitution du 2ème régiment était complétée le 30 août par un détachement de 200 fusiliers brevetés, encadrés de gradés de la mousqueterie et prélevés dans les compagnies de formation de Toulon. Ce personnel est réparti entre les unités du Régiment.
Le 22 août, le contre-amiral RONARC’H qui, depuis le commencement du mois présidait à l'organisation des Régiments prenait le commandement de la Brigade. Le 28 août, le chef de bataillon d'infanterie LOUIS lui était adjoint en qualité de chef d'état-major.
Une dépêche ministérielle du 2 septembre prescrit que les deux régiments de marins affectés à la place de Paris deviendront des régiments «de marche», constituant la «Brigade des fusiliers marins» (B.F.M.).
De nombreux groisillons seront membres de cette brigade et dix y périront.
Maintien de l'ordre à Paris
Dès les premiers jours du conflit, le ministre de la guerre Adolphe Messimy décide de constituer un régiment de marins. Sa mission est de maintenir l’ordre dans Paris et sa banlieue. Brest est le premier détachement à rejoindre la capitale le 13 août. Suivent les autres à quelques jours d'intervalle. Du 27 au 30 août, les différents détachements du 2ème régiment arrivent à Paris rejoints le 2 septembre par 2 compagnies du 3ème bataillon. Ce deuxième régiment est affecté à la police de la banlieue. Il est complété le 30 août par le détachement de 200 fusiliers marins brevetés, venus de Toulon.
Les cadres des deux régiments sont des officiers et officiers-mariniers pourvus ou non du brevet de fusilier, mais surtout des réservistes dont beaucoup ont quitté le service depuis de longues années déjà, n'ayant guère appris du métier de soldat que le maniement des armes. Si les régiments participent au service de police de Paris, leur entraînement ne s'arrête pas et probablement jamais puisque la formation militaire des marins est activement poussée. «Pour mes hommes, écrit le lieutenant de vaisseau Jean Pinguet, capitaine de la 6ème compagnie, je, n'ai pas trouvé mieux, pour leur donner de l’assurance et de la cohésion, que la méthode Hébert (Georges Hébert, lieutenant de vaisseau, directeur de l’enseignement physique de la Marine, grand apôtre de la culture physique). Un tir de quelques balles, un peu de rang serré, des théories, et ce fut tout». L'organisation des deux régiments est supervisée par le contre-amiral Ronarc'h, 49 ans alors, le plus jeune officier général de la Marine. Il en prend le commandement à partir du 22 août.
La défense du Camp retranché (1er sept - 7 oct.)
Le 2 septembre, la brigade quitte ses cantonnements parisiens. Elle est incorporée dans le corps d'armée du général Armand Mercier-Milon affecté à la défense du camp retranché de Paris. Les fusiliers sont organisés en force de campagne et s'établissent en dehors de Paris. De nombreuses missions leur sont confiées: soutien des forces d'infanterie, occupation des villes de la région parisienne pour y maintenir l'ordre et assurer une présence militaire, construction d'un pont flottant sur l'Oise. Le 12 septembre, Ronarc'h reçoit du commandant en chef, le général Joseph Joffre, l'annonce de la victoire sur les Allemands: la bataille de la Marne est gagnée. Dans les jours qui suivent, le régiment Varney est engagé dans une opération destinée à «purger» les forêts de Chantilly et d'Ermenonville des derniers Allemands qui s'y trouvent depuis leur retraite.
Le 18 septembre, Pinguet se rend à Creil en train blindé pour une mission spéciale: s’assurer de la manière dont fonctionne le service de garde de la ligne de chemin de fer Pontoise - Creil - et au delà, et prendre toutes les mesures nécessaires en vue de protéger les réparations des voies dans la région du Nord. Il doit aussi «promener» ses hommes dans la région non encore occupée par les troupes françaises pour y produire de l’effet moral, c'est-à-dire refroidir l’ardeur des patrouilles allemandes, redonner de la confiance aux populations, permettre aux travailleurs militaires -génie et chemin de fer de campagne- de faire leur métier en toute tranquillité d’esprit. «Pour des marins, écrit Pinguet, il n’est pas de mission qui convienne mieux: audace, initiative, esprit de décision».
Le lendemain, au Nord de Montdidier, les hommes de Pinguet ouvrent le feu sur une patrouille de uhlans, «dix casques à pointe». Le 20 septembre, le capitaine de frégate Léon de Kerros se met en liaison avec Pinguet et lui demande de se diriger sur Roye avec le train pour exercer la surveillance de la ligne. Au cours de cette reconnaissance, à la Boissière, la compagnie Pinguet a un engagement cette fois avec une forte colonne de cavalerie soutenue par une puissante artillerie; les fusiliers la mettent en fuite et lui infligent de grosses pertes. Mais le tir de l'artillerie allemande dont la mise en batterie est remarquablement rapide, oblige le train touché par une quarantaine d’obus, à battre en retraite. La compagnie compte 3 tués et 8 blessés dont trois gravement. Toutefois, son moral reste excellent. Les hommes ne retiennent qu’une chose: la débandade éperdue des cavaliers. La réputation des Allemands leur paraît surfaite. Jean Laot, né à Landéda, 23 ans, François Guéganton, natif du même village, 16 ans, tous deux matelot de 3ème classe sans spécialité, et Jean-Marie Paranthoen, né à Pleubian, 25 ans, matelot de 2ème classe gabier breveté, sont les trois premiers morts de la brigade, les premiers marins tombés au champ d’honneur.
Pendant ce temps, l'amiral Ronarc'h se démène afin que ses hommes soient correctement équipés. Les efforts se portent sur l'équipement et l'habillement. Petit-Dutaillis se souvient :
« Capotes bleues de biffins, dans lesquelles les marins se trouvent une drôle de touche mais qui leur seront très utiles; des brodequins à clous, qu'ils enlèveront pour éviter les ampoules; leurs bérets qu'ils garderont jusqu'à la fin et qui leur vaudront de la part des Allemands, le sobriquet de "demoiselles au pompon rouge"; quelques pansements et des munitions pour quelques jours».
Les marins sont équipés du fusil Lebel à baïonnette qui peut tirer 12 coups à la minute. Mais les efforts sont aussi axés sur la constitution des trains des équipages. Les magasins militaires parisiens fournissent le nécessaire pour compléter l'équipement initial, très insuffisant, en raison du manque de ressources locales dans les ports.
Le 18 septembre, le Général, gouverneur de Paris, plaçait sous les ordres du contre-amiral et rattachait à la brigade un détachement de 8 sections de mitrailleuses commandé par le Lieutenant de Vaisseau de MEYNARD. Constitué dès les derniers jours du mois d’août avec du personnel et du matériel débarqué des croiseurs "AMIRAL AUBE", "GLOIRE", "GUEYDON", "KLEBER", "GUICHEN", "DUPETIT-THOUARS", "MARSEILLAIS"E, "JEANNE D’ARC". Ce détachement était depuis cette époque placé auprès de la 92ème D.T. affectée à la défense du secteur N.E. du "camp retranché de Paris". Son effectif de 100 hommes environ fut porté à 275 hommes par des prélèvements faits dans les deux régiments. Ce détachement prit le nom de «Compagnie des mitrailleuses de la Brigade».
L’organisation de la brigade se poursuivit pendant tout le mois de septembre, notamment en ce qui concerne l’équipement, l’habillement des hommes et la constitution des trains. En dépit des déplacements des unités au cours du mois de septembre, ces diverses opérations se poursuivirent activement et le 24 septembre, le Contre-amiral pouvait écrire que la brigade était prête à sortir du camp retranché de Paris.
La brigade comprenait les unités suivantes :
1) 1er Régiment de marche constitué à 3 bataillons de 4 compagnies de 250 hommes environ chacun. Chaque bataillon commandé par un Capitaine de Frégate secondé par un Lieutenant de Vaisseau, adjudant-major; les compagnies sont commandées par des lieutenants de vaisseau, les sections par des enseignes de 1ère classe, des officiers des équipages ou des premiers-maîtres. Le régiment possède 2 sections de mitrailleuses commandées par un enseigne de 1ère classe et un officier des équipages.
Le service médical comprend une infirmerie réglementaire dirigée par un médecin principal et 3 postes de secours rattachés aux bataillons, et sous la direction chacun d’un médecin de 1ère classe.
Le service administratif est dirigé par un commissaire de 1ère classe assisté de deux commissaires de 3ème classe, dont l’un remplit les fonctions d’officier d’approvisionnement.
2) 2ème Régiment de marche selon la même constitution que le premier.
3) Compagnie des mitrailleuses de la Brigade. Commandée par un lieutenant de vaisseau, elle comprend 8 sections, sous les ordres chacune d’un lieutenant de vaisseau, d’un enseigne ou d’un officier des équipages. Le service médical comprend un poste de secours sous la direction d’un médecin de 1ère classe.
4) Ambulance n°1 et n°2. Dirigées chacune par un médecin principal et munies du matériel nécessaire pour hospitaliser momentanément à l’arrière les blessés ou les malades provenant des premières lignes, en attendant leur évacuation définitive.
C'est ainsi que 6585 marins (inscrits maritimes, engagés volontaires ou recrues du contingent général) originaires majoritairement de Bretagne iront se battre en Belgique, regroupés au sein d'une «brigade de fortune» comme l'a écrit Ronarc'h. Un des médecins de la brigade, note dans ses souvenirs : "Les hommes de cette brigade étaient de tous âges: il y en avait de moins de 20 ans et de plus de 50 ans. On y trouvait toutes les spécialités, aussi bien des timoniers, des gabiers, des infirmiers, des soutiers, des électriciens, que de véritables fusiliers, et des canonniers sans canon». Pour une très grande partie de ces marins le métier des armes leur est inconnu. Pourtant nombreux sont ceux qui, improvisés officiers ou officiers mariniers, rempliront avec courage des rôles auxquels ils n'étaient pas préparés".
Par commodité, et pour ne pas alourdir le texte, nous utiliserons les abréviations suivantes pour le nom des unités:
1er régiment (commandé par le C.V Joseph Paul DELAGE, puis par le C.V. Jules PAILLET)
1er/I 1er bataillon (commandé par le C.F. Georges MARCOTTE de SAINTE MARIE, puis par C.F. Gabriel GENEY)
2ème/I 2ème bataillon (commandé par le C.F. Léon Émile de KERROS)
3ème/I 3ème bataillon - les lorientais - (commandé par le C.F. Eugène RABOT)
2ème régiment (commandé par le C.V Georges VARNEY, puis par le C.F. Bernard MAUROS)
1er/II 1er bataillon - les lorientais forment la 2ème, 3ème et 4ème compagnie- (commandé par le C.F. Roch Louis JEANNIOT,
puis par le C.F. de JONQUIÈRES)
2ème/II 2ème bataillon (commandé par le C.F. Henri PUGLIESI-CONTI)
3ème/II 3ème bataillon (commandé par le C.F. Bernard MAUROS)
Compagnie de mitrailleuses de la Brigade (C.M.B.) commandée par le L.V de MAYNARD
La course à la mer
La victoire française de la Marne -12 septembre 1914- n’est pas décisive. Epuisées, manquant d’artillerie lourde, les troupes françaises ne peuvent exploiter complètement leur victoire et empêcher les Allemands d’arrêter leur repli le long de la ligne de l’Aisne. Mais aucun des deux adversaires ne renonçant encore à remporter une décision rapide, chacun d’entre eux tente alors de déborder l’autre, les Français sur la droite allemande, les Allemands sur la gauche française. La bataille s’étend ainsi vers l’Ouest jusqu’à la mer du Nord: c’est la course à la mer, dernier épisode de la guerre de mouvements. La lutte se poursuit ainsi jusqu'en Flandre belge où les Allemands parviennent après avoir pris Anvers le 10 octobre. C'est sur 18 kilomètres, de Nieuport à Dixmude, que la 4ème armée allemande forte de 40000 hommes va commencer son action. Trois points sont particulièrement visés: Dixmude, Nieuport, et la boucle de Tervaete. Face à elle, 16000 hommes, Belges, Sénégalais, chasseurs à pied français, fusiliers marins.
Une bataille acharnée va alors s’engager sur l’Yser - petit fleuve de 20 mètres de large - du 16 octobre au 10 novembre. L’enjeu numéro un pour les Allemands : la conquête de Dixmude, ville hautement stratégique, notamment parce qu'elle est le centre d'un riche réseau de communications. Sa position en fait l’objectif désigné d’une attaque ayant Calais pour but. Si une ville représente une position stratégique très importante, c'est bien Dixmude. On s’explique ainsi l’obstination mise par les Allemands à tenter de s’en emparer. On en confie la défense à la brigade des fusiliers marins du contre-amiral Pierre Ronarc'h avec ordre de tenir coûte que coûte au moins quatre jours, le temps qu’arrivent des renforts. Aucun retranchement préparé. Comme artillerie, des pièces de campagne belges, toujours à court de munitions, incapables de riposter aux écrasantes batteries lourdes que les Allemands vont amener. D’ailleurs ni avions, ni ballons captifs pour régler le tir, et absence complète de tout service de renseignements. Ronarc’h aura un front de 7 kilomètres à garnir avec seulement 6 bataillons, alors que le double serait nécessaire.
Mais revenons un peu en arrière, le 4 octobre, la brigade reçoit l’ordre de se tenir prête à partir pour Dunkerque, afin de faire partie d’une armée qui s’organise dans cette région.
le 7 octobre, elle embarque à la gare de Saint-Denis et à la gare de Villetaneuse (7 trains) à destination de Dunkerque. Arrivé à Dunkerque, ordre est donné de faire continuer les trains de transports sur Anvers. Mais la voie est coupée après Gand: la brigade débarque dans cette ville (l'après-midi du 8 octobre et la nuit du 8 au 9).
Elle y trouve la situation suivante, les 6 divisions de l’armée belge sont en retraite d’Anvers sur Bruges, s’échelonnant entre ces deux points. Une est encore à Anvers avec 10.000 Anglais; 2 sont à l’ouest du canal de Terneusen, 3 à l’est de ce canal. La division de cavalerie belge est sur le flanc sud de cette marche, au sud de Lokeren, surveillant l’Escaut.
A Gand, les troupes belges composées de 8 escadrons de cavalerie, 1 brigade mixte et 1 brigade de volontaires, 2 régiments de ligne (toutes ces unités à effectifs très réduit), défendent le front sud de Gand entre l’Escaut aval et la Lys. Les Allemands peu actifs, dépassent toutefois la Dender.
Dès son arrivée à Gand, la brigade se couvre :
- dans le secteur entre Escaut, un bataillon du 2ème régiment est poussé sur le front entre Gontrode et Quadrecht, pour compléter de ce côté la ligne déjà établie par les Belges; l’autre bataillon est placé au nord de la Melle, en réserve de ce secteur.
- dans le secteur nord de l’Escaut aval, 1 bataillon du 1er régiment va constituer un front défensif face à l’est, entre Heusden et Goudenhant; un autre est placé à Destelbergen, en réserve de ce secteur.
Le reste de la brigade (2 bataillons, la compagnie de mitrailleuses) est rassemblé au sud et à proximité de Gand, en réserve générale au carrefour de Schelde, où l’Amiral place son poste de commandement. Les convois (sauf les ambulances) sont réunis à la sortie de Gand (N.O.).
La brigade doit arrêter l'ennemi en avant de la ville au moins jusqu'à ce que leur armée ait pris de l'avance vers l'ouest. Les fusiliers creusent leurs premières tranchées. Dans la nuit du 8 au 9, les Allemands attaquent le front Gontrode-Quatrecht défendu par le 2ème régiment.
Le 9 octobre, on signale qu’Anvers est en feu et près d’être pris, que des forces allemandes suivent l’armée belge en retraite et cherchent à la prendre en flanc, que des forces ennemies de plus en plus nombreuses garnissent la Dender dans la région d’Alost.
Grâce à la résistance devant Gand, l'armée belge peut se retirer sans être véritablement inquiétée. Cependant les effectifs de l'ennemi augmentent sur les deux rives de l'Escaut. La décision est alors prise le 10 de décrocher dans la soirée. Ainsi, le 11 octobre, la brigade se met en route pour Aeltre. Après une marche de nuit de 35 kilomètres dans le froid et le brouillard, elle y arrive le 12 à 4 h, très fatigués; effectifs et matériels sont au complet. Et dès midi il faut partir pour Thielt. Après une nouvelle marche de 20 kilomètres, la brigade entre dans la ville à 16 h «Ayant fourni depuis moins de 24 heures, une marche de 55 kilomètres sans traînard, et autre perte qu'une voiture à munitions embourbée, brisée et abandonnée. Mais la brigade est exténuée, et je me rends compte que la situation serait désastreuse si Thielt, bourré de troupes, était attaqué pendant la nuit qui d'ailleurs reste calme » écrit l'amiral.
Le lendemain, direction Thourout. Mais la position est trop dangereuse. L’ennemi est signalé à Thielt et à Roulers se dirigeant sur Cortemark. D’autres colonnes allemandes sont signalées en route sur Bruges et de Menin sur Roulers. Le 15 octobre, entre 3 et 4 h. du matin, sous la menace d’une attaque, la brigade part précipitamment sur Dixmude, où la brigade arrive vers 10h.
Parcours de la Brigade du 11 au 15 octobre 2014
La bataille de DIXMUDE 10 oct. - 11 nov.
D'après le "Journal de marche de la brigade"
Document dactylographié et conservé au musée des fusiliers marins à Lorient.
Aussitôt, la brigade s'installe aux avant-postes le 2ème/I barrant la route de Woumen. Le reste de la brigade est à Dixmude (4 bataillons et la compagnie de mitrailleuses), derrière l’Yser poussant une grand’garde d’une compagnie sur la route de Seerst. Le groupe d’artillerie est placé en surveillance sur le mouvement de terrain au sud de la chapelle de Notre-Dame du Bon Secours. Le poste de commandement est à la chapelle N.D. du Bon Secours.
L’ordre arrive de tenir «coûte que coûte» la tête de pont de Dixmude dont la gare doit servir à certains transports de matériel venant d’Anvers et d’Ostende. Les dispositions précédentes sont maintenues, toutefois le 3ème/I est poussé à Notre-Dame du Bon Secours, en soutien des avant-postes vers l’est. Un autre, le 1er/I avec une compagnie du Génie belge, met en état de défense les lisières extérieures de la ville.
Dans la soirée, le poste de la route d’Eesen repousse l’attaque d’une automitrailleuse allemande venant de Zarren.
Immédiatement commence l’organisation de la défense de la position: installation de barrages, mise en place de zones de repli successives, étude du terrain pour la défense de jour et de nuit, disposition, à l’abri des regards indiscrets, des mitrailleuses. Des escouades -15 hommes- sont placées en réserve, aux tranchées de seconde ligne, généralement à hauteur des mitrailleuses. En ville, des barricades sont construites avec les pavés des rues. Les fusiliers travaillent avec des outils pris dans les maisons désertes. Mais le plus pressé a été de creuser à 500 mètres en avant de la ville, un demi-cercle de retranchements dont les deux extrémités s’appuient sur l’Yser. Pour la première fois, les fusiliers marins creusent des boyaux d’accès aux tranchées celles-ci s’apparentent à de petits abris de tir, tout simples, sans toit ni traverse. Par ailleurs est présente une brigade d'élite belge de 5.000 hommes et une compagnie du génie; celle-ci, avec les fusiliers du 1er/I , met en état la défense aux abords de Dixmude.
Le 16 octobre, les transports par la gare ayant pris fin, la brigade se replie dans la matinée sur Dixmude et l’Yser. Ce mouvement difficile s’exécute en vue des patrouilles ennemies. Le terrain à défendre est divisé en deux secteurs, séparés par la route Dixmude-Caeskerke, cette route appartenant au secteur nord.
- Le secteur nord est défendu par le 2ème/I
- A Dixmude, les tranchées organisées autour de la villes sont gardées par un bataillon sur la rive ouest de l’Yser, et un bataillon à Caeskerke en soutien.
- Le secteur sud est défendu par 2 bataillons du 2ème régiment; un bataillon sur la rive ouest de l’Yser, et un bataillon en soutien au sud de Caeskerke.
L’Amiral place son poste de commandement à la gare de Caeskerke. Il garde à sa disposition un bataillon du 2ème régiment, la compagnie de mitrailleuses (placés à la croisée des routes Dixmude-Pervyse et Dixmude-Oudecappelle) et l’artillerie dont 2 batteries sont en batterie au sud du 2ème passage à niveau de la voie ferrée Dixmude-Furnes, et l’autre au nord de Caeskerke.
Au nord de la brigade, la ligne de l’Yser est défendue par la 4ème D.A. belge. Au sud, un corps de cavalerie française venant de la forêt d’Houthulst attaque Clerken où les Allemands sont retranchés.
Dixmude est attaquée vers 16 h par des forces d’infanterie et d’artillerie de campagne venant d’Eesen. L’action est assez chaude; elle se prolonge pendant la nuit et la matinée du 17. C’est le baptême des marmites (obus de gros calibre), probablement du 155. Impressionnant et à l’effet démoralisant. « Un seul blessé, écrit Pinguet, Mourguillard, le cuisinier, traversé de gauche à droite, à hauteur de la taille, par un shrapnell ou un éclat. ... C’est le premier blessé de Dixmude ». Mais la brigade brise ce premier assaut des divisions allemandes.
Dans la soirée du 16, le général Foch adresse à l’amiral une instruction lui fixant sa tâche à Dixmude : « Dans les circonstances où nous sommes, la tactique que vous avez à pratiquer ne comporte pas d’idée de manœuvre, mais simplement et au plus haut point, l’idée de résister là où vous êtes. Dans ce but, il y a lieu de préparer sans aucune réserve la mise en œuvre, dans une situation abritée, et de bonnes conditions, de tous vos moyens. Quant à la conduite à tenir, elle consiste pour vous à arrêter net l’ennemi, par la puissance de vos feux en particulier. C’est dire qu’elle est facile à tenir avec les effectifs et les moyens dont vous disposez, qu’elle vous permet d’occuper une grande étendue de terrain et que vous ne devez songer à évacuer la position que sur un ordre formel de vos supérieurs ou à la suite de l’enlèvement de toute la position par l’ennemi. Inutile de dire que je compte entièrement sur votre dévouement pour remplir cette mission ».
L'amiral Ronarc'h la retransmet ainsi: "Le rôle que vous avez à tenir est de sauver notre aile gauche jusqu'à l'arrivée des renforts. Sacrifiez-vous. Tenez au-moins 4 jours".
Hôtel de ville de Dixmude avant les combats. ^ et pendant. v
Le 1er/II est envoyé pour attaquer Keyem par la route. Le 2ème/II est en soutien à cette attaque. Le 3ème/II qui est à Eessen attaque Hoograde par la route de Wladsloo
Le 1er régiment, reste rassemblé à Dixmude.
L’artillerie appuie l’attaque, 2 batteries traversent Dixmude et se placent perpendiculairement à la route de Keyem à la sortie nord de la ville. Les autres en situation de tirer vers Beerst et Keyem ont l’ordre de préparer l’attaque, mais l’action de l’artil-lerie sera gênée par l’incertitude dans laquelle on se trouve de savoir si Keyem et Beerst sont ou non aux mains des Allemands.
Le mouvement commence à 10 h. Les Belges n’occupaient pas Beerst, et le 1er/II est accueilli par des coups de feu partant du village. Il se déploie très malaisément en raison du terrain coupé de canaux, de fossés pleins d’eau. Il est obligé d’attaquer d’abord Beerst. Il en est assez éprouvé.
Le 2ème/II qui le suit en soutien le remplace dans l'attaque et, en même temps, se couvre du côté de Keyem. Le 2ème/I lui vient en soutien. Le 1er/II rentre à Dixmude.
Le 3ème/II bataillon débouche de Wladaloo sur Hoograde.
L’ennemi met en action son artillerie lourde qui recherche sans succès le groupe placé au nord de Dixmude. A 17 h, Beerst est occupée par les marins. Les lisières nord du village sont mis en état de défense
Mais à partir de 18 h la brigade décroche et rentre pendant la nuit dans les cantonnements tout à fait insuffisants de Caeskerke (2ème régiment) et Saint-Jacques Capelle (1er régiment). Ces mouvements sont terminés à 23 h.
Le premier groisillon, membre de la brigade Louis J.M. Blaurec est tué au cours de cette journée.
Tranchées au bord de l'Yser
Le 17 octobre, les shrapnells tombent sur Dixmude et sur les tranchées en avant sans grands dommages. A 13 h, l’ennemi se retire. L’après-midi est calme; on travaille à refaire et à consolider les tranchées des lisières extérieures de Dixmude, à organiser les tranchées de l’Yser (rive ouest), les tranchées des réserves de secteur et celles de la réserve générale. Ce travail sera repris d’ailleurs à chaque accalmie et toutes les nuits.
Un renfort d’artillerie arrive, 5 groupes qui donnent à la défense de Dixmude et de l’Yser un total de 72 pièces de campagne. Ces nouveaux groupes sont répartis: un sur l’Yser au nord de Caeskerke, un au sud d’Oostkerke, un à la ferme Bien-Acquis, un à de Kappelhoek et un à Saint-Jacques Capelle. Ils sont reliés par téléphone au poste de commandement de la gare de Caeskerke) qui se réserve l’emploi de cette artillerie.
Toutefois, ordre permanent est donné d’ouvrir instantanément le feu, de jour comme de nuit, sur les abords de Dixmude toutes les fois qu’une fusillade et plus particulièrement le bruit des mitrailleuses indique clairement qu’une attaque d’infanterie est dirigée contre nos tranchées.
Dans la nuit du 16 au 17, nouvelle attaque venant d'Eessen. Pour la première fois, le battement des mitrailleuses éclate aux oreilles des fusiliers. Les hommes tremblent. Les officiers ne sont pas assez nombreux. Très peu sont préparés à leur rôle. C’est le sentiment des capitaines de compagnie. Des témoignages tels ceux de Pinguet et du quartier-maître Luc Platt indiquent "Souffrances physiques et morales sont atroces... Le moral de mes hommes baisse d’heure en heure. Depuis longtemps, je les vois à leur manège: avec une extrême lenteur, ils tournent la tête de mon côté, et, du coin de l’œil... ils cherchent à lire dans mes yeux, dans mes gestes... (Alors), je chante quelque refrain du bataillon... L’effet est immédiat... C’est le facteur moral qui donne».
Le 18 octobre, la matinée est calme. Une compagnie du 3ème/I est envoyée à la gare de Dixmude en réserve de la défense de la ville. On observe des patrouilles de cavalerie ennemie vers Dixmude, et on entend canonnade et fusillade au nord vers Couckelaere.
Le Roi des Belges vient visiter les tranchées de l’Yser.
A midi, le 3ème/I est envoyé en reconnaissance offensive sur Eessen. Il rentre à la nuit dans les tranchées .
Le corps de cavalerie française a pris Clerken et continue sur Zarren. A Zarren, le commandant de cette cavalerie demande à l’Amiral l’appui d’un bataillon de marins pour pouvoir continuer sur Thourout. Le 3ème/II avec deux autos-mitrailleuses belges est aussitôt envoyé à Eessen où il s’installe pendant la nuit en halte gardée face au nord, et en liaison avec Zarren.
Le 19 octobre, l’ennemi attaque en force Leke, Keyem et Beerst. Ces villages sont défendus par des forces belges qui demandent des renforts. Ordre est donné à la brigade de se porter sur Keyem pour enrayer l’attaque ennemie sur ce point. Une division belge doit également déboucher de Dixmude et se porter sur Wladsloo et au nord.
Une brigade belge doit remplacer la brigade de marins à Dixmude et sur l’Yser.
Deux régiments de goumiers sont mis pour la journée à la disposition de l’Amiral qui leur donne l’ordre de se porter par Werckem sur Bovekerke en vue d’explorer les bois vers Couckelaere et d’assurer la liaison avec le corps français de cavalerie.
Le 20 octobre, la brigade belge qui est à Dixmude est placée sous les ordres de l’Amiral. Elle conserve la défense de la ville, et la Brigade des Marins prend la défense de l’Yser. Les dispositions nouvelles prises en conséquence sont terminées à 8 h.
Chaque régiment a un bataillon le long de l’Yser, un bataillon en soutien dans des tranchées entre la gare de Caeskerke et l’Yser, perpendi-culairement à la route, et un bataillon à la réserve générale au carrefour ouest de Caeskerke. Rien n'est changé pour l’artillerie. L’Amiral reprend son poste de commandement à la gare de Caeskerke. Toutes les tranchées sont approfondies à 1,70 m en vue de mettre les troupes à l’abri du bombardement par l’artillerie lourde.
L’ennemi a repris son attaque de Keyem et de Leke. Il repousse sur l’Yser les troupes belges.
A 11 h, commence un bombardement énergique sur Dixmude et les tranchées. A 16 h, l'infanterie allemande attaque Dixmude. Deux compagnies du 2ème régiment et 2 compagnies du 1er régiment sont envoyés en renfort. Toute l’artillerie de la défense est mise en action. Les tranchées de la ville résistent. L’ennemi se retire à 20 h. En prévision d’une nouvelle attaque, ces 4 compagnies sont maintenues dans les tranchées. Dans la nuit, on entend une fusillade intermittente.
Le 21 octobre, les Allemands continuent leurs progrès jusqu’à l’Yser.
Le bombardement de Dixmude et des tranchées recommence à 6 h du matin. Pendant l’après-midi, le bombardement devient violent qui déclenchent de nombreux incendies dans la ville. Les compagnies de réserve dans Dixmude sont assez éprouvées. L’Amiral cherche à éteindre le feu des batteries ennemies à l’aide de l’artillerie, mais sans résultat appréciable.
Vers 19 h, des renseignements arrivent d’après lesquels certaines tranchées au sud de la ville seraient prises par les Allemands. Ordre est donné de reprendre les tranchées coûte qui coûte. Trois compagnies sont envoyées en renfort et l’artillerie "arrose" les abords immédiats de Dixmude. Après une lutte violente, les Allemands sont repoussés et les tranchées sont réoccupées. A 21 heures, l’ordre est rétabli, mais les 3 compagnies de renfort restent dans les tranchées déjà occupées par les belges. Au sud de Dixmude, le corps de cavalerie française a rétrogradé sur la forêt d’Houthulst, puis plus au sud. Il sera remplacé sur l’Yser, à droite par la 89ème D.I.T.
Soldats belges et marins "au coude à coude". >>>
Dans la nuit du 21 au 22 octobre, la bataille reprend à Dixmude. On signale de nouveau que des tranchées ont été évacuées au nord de la ville; 2 compagnies du 2ème régiment qui étaient prévues pour la relève y vont et rétablissent les affaires. Elles relèvent ensuite les 2 autres compagnies du 2ème régiment.
Le 24 octobre, pendant la nuit, les compagnies des tranchées de Dixmude sont relevées. Des attaques d’infanterie allemande sont lancées à intervalles réguliers d’une heure,... et toujours précédées de quelques obus de gros calibre.
L'Amiral reçoit un nouveau message du Haut Commandement: « Il est de la plus haute importance que l'occupation de la ligne du canal de l'Yser ... soit maintenue coûte que coûte. Il y va de notre honneur d'aider les Belges, dans cette tâche, jusqu'à l'extrême limite de nos moyens. En conséquence, le passage de Dixmude devra être tenu par vous, tant qu'il restera un fusilier marin vivant, quoiqu'il puisse arriver ... Si vous êtes trop pressé, vous vous enterrerez dans des tranchées. Si vous êtes tourné, vous ferez des tranchées du côté tourné. La seule hypothèse, qui ne puisse être envisagée, c'est la retraite».
Au matin, le bombardement de Dixmude et des tranchées par l’artillerie lourde allemande postée vers Wladsloo, Eessen, Clerken, reprend. Notre artillerie répond, mais sans résultat appréciable. Les obus nous arrivent également du nord. L’ennemi a réussi à traverser le fleuve et est maintenant en force sur la rive gauche de l’Yser. Par suite d’un malentendu, il s’infiltre de Stuyvekenskerke à Oud Stuyvekenskerke, tournant la défense de l’Yser, cependant que le bombardement redouble de violence sur toute la plaine entre Dixmude et Caeskerke.
La situation de la brigade qui est toujours face à l’est devient critique. En vue d’arrêter le plus loin possible des ponts de Dixmude les progrès de l’ennemi, l’Amiral envoie dans la matinée une partie des réserves de secteur pour étayer l’aile gauche du front de l’Yser, puis vers 13 h, il envoie la réserve générale (déjà portée depuis le matin à Caeskerke) vers Oud Stuyvekenskerke pour arrêter coûte que coûte l’ennemi. Ils réussissent à constituer un front face au nord, sur lequel l’ennemi s’arrête. Mais les pertes sont grandes. La plupart des officiers des éléments engagés, notamment des 2ème/I et 3ème/I bataillons sont hors de combat.
Le 25 octobre, la bataille reprend, mais moins violente au nord; les Allemands paraissent chercher à gagner du terrain vers Pervyse et Ramscapelle. Le 19ème bataillon de chasseurs vient relever les marins qui rentre dans les tranchées des réserves de secteur, très diminué et très fatigué.
Sur le front de Dixmude, les attaques allemandes sont repoussées. L’ennemi bombarde la ville et les tranchées extérieures, les tranchées de l’Yser, tout le terrain entre l’Yser et Caeskerke, et en particulier la gare de Caeskerke. L’artillerie de la défense n’arrive pas à éteindre ou même à diminuer le feu de la grosse artillerie ennemie. Les moyens d’observation sont insuffisants. Le toit de la minoterie n’est pas tenable; d’un autre côté le pays est plat, assez couvert; enfin le manque de ballon ou d’avion fait que l’observation des coups est à peu près impossible. Le commandement est donc obligé d’indiquer à son artillerie les emplacements probables de l’artillerie ennemie d’après les renseignements reçus des défenseurs des tranchées. De plus, les munitions mises à la disposition des batteries sont limitées.
Dans la soirée, le GQG belge fait connaître qu’il a pris les mesu-res nécessaires pour inonder la rive gauche de l’Yser entre le fleuve et le chemin de fer de Nieuport.
La nuit est troublée, on s’attend à une attaque violente, ayant eu connaissance de groupements ennemis amenés autour de Dixmude par les 3 route d’Eessen, de Beerst et de Woumen.
Le 28 octobre, le début de matinée est calme, mais à 10h, un bombardement violent reprend sur Dixmude et tout le terrain à l’ouest de l’Yser, sans que notre artillerie réussisse à en diminuer l’intensité. Les tranchées sont bombardées. Les pertes considérables. La ville de Dixmude est à peu près détruite.
Ce bombardement prend fin à la nuit, au moment où une atta-que d’infanterie se produit contre les tranchées du cimetière, attaque qui est d’ailleurs rapidement repoussée par les défenseurs des tranchées aidés par l’artillerie de campagne.
Au nord, la bataille continue, les belges ont reculé jusqu’à Ramscapelle et Pervyse. La 42ème division d’Infanterie française se prépare à contre-attaquer l’ennemi. Pour celle-ci, il est fait appel à tous les éléments disponibles. C’est ainsi que la 42ème division réclame le 19ème bataillon de Chasseurs. Mais ce bataillon est engagé, on ne peut l’enlever ni le relever. L’Amiral propose d’envoyer à sa place un bataillon de marins, composé de la 7ème Cie du 1er régiment et des 2ème, 4ème et 5ème du 2ème régiment prélevées sur les réserves de secteur et la réserve générale. Ce bataillon part dans la nuit pour Roussdamme. Il participera aux affaires de Pervyse et de Ramscapelle.
Le 29 octobre, à 8h30, reprise du bombardement auquel répond l’artillerie lourde de la brigade. Comme cette artillerie se trouve trop éloignée des positions ennemies, un nouveau changement est ordonné les 120 long sont établis à l’ouest d’Oudecapelle (au nord et au sud de la route de Forthem) et les 155 vers Saint-Jacques Capelle.
La nuit est tranquille, les Allemands se contentent d’envoyer des shrapnells pendant toute la nuit sur Caeskerke et le carrefour où se trouve le poste de commandement .
Le 30 octobre au levée du jour, les marins détachés attaquent avec succès Ramscapelle et avec pertes Pervyse.
Sur le front de Dixmude, bombardement de la ville et des tranchées de l’Yser. Le pont du chemin de fer est en partie détruit par un obus vers 17h. Au sud de Dixmude et depuis la veille, on entend une très violente canonnade ininterrompue qui se prolonge pendant toute la nuit.
2 novembre – Depuis plusieurs jours on entend une violente canonnade ininterrompue vers Merckem. La tranquillité relative dont la brigade bénéficie après 15 jours de combats continuels résulte vraisemblablement de ce que l’ennemi a fait refluer vers Merckem et au sud, la plupart des forces d’infanterie et d’artillerie qu’il maintenait devant Dixmude.
Pour obliger l’ennemi à maintenir toutes ses forces devant Dixmude et l’inciter à y amener d’autres forces, le commandant décide de faire déboucher de Dixmude une attaque soutenue par une puissante artillerie. Cette attaque est montée par 4 bataillons d’infanterie de la 42ème division d’infanterie. Le 1er/II sert de réserve à cette attaque; le reste de la brigade doit lui servir de repli éventuel. L’attaque décidée dans la nuit commence à 8h par une préparation énergique de l’artillerie de 75 de la Division qui avait pris position pendant la nuit, de l’artillerie belge et de l’artillerie lourde de la défense.
Sur le front nord, rive gauche de l’Yser, l’ennemi est visiblement gêné par l’inondation. Il se retire vers l’Yser, mais occupe toujours les fermes dans lesquelles il laisse quelques hommes et des mitrailleuses.
Le 3 novembre, poursuite de l’attaque de la 42ème division.
En raison du repli des Allemands sur l’Yser, l’Amiral décide de ne laisser que 2 compagnies sur le front nord, rive gauche. En conséquence, il fait rentrer le 3ème/I à la réserve générale et 2 des compagnies du 2ème/I à la réserve de Caeskerke. Il ne reste donc plus dans les tranchées du nord que la moitié du 2ème/I.
La veille, une des batteries de 155 a été envoyée à Reninghe; elle est remplacée par 2 mortiers de 220 qui sont placés au sud d’Oudecapelle et qui sont orientés, l’un vers Woumen, l’autre sur le château de la route de Woumen.
Le 4 novembre, les opérations de la 42ème division se poursuivent. L’Amiral envoie les 2 compagnies du 2ème/I en renfort.
La brigade reçoit un renfort d’artillerie lourde (2 pièces de 120 long).
La nuit est calme autour de Dixmude.
Le 7 novembre, en vue de rendre plus intime l’action de l’artillerie et de l’infanterie, l’Amiral décide une nouvelle répartition du commandement et des forces.
* Ensemble de la défense proprement dite de Dixmude comprenant le front extérieur de la ville, la ville de Dixmude, la rive de l’Yser (nord et sud du Pont route), les réserves de secteur, sera commandé par le commandant du 2ème régiment
* Le reste de la défense comprenant le front nord (face au nord – rive gauche de l’Yser) et la réserve générale, sera commandé par le commandant du 1er régiment Celui-ci devra toujours mettre à la disposition du commandant de la défense de Dixmude les renforts qui lui seront demandés.
Les 2 batteries de 75 français sont placées sous les ordres directs du commandant de la défense de Dixmude (liaison téléphonique).
Les batteries de campagne belges et les batteries lourdes restent à la disposition de l’Amiral.
Pendant toute la journée, des duels d’artillerie ont lieu, notre artillerie lourde cherche l’artillerie allemande, sans parvenir à éteindre son feu.
Sur le front des tranchées de Dixmude, les Allemands montrent une grande activité.
Une pièce de 75 belge est amenée sur la berge de l’Yser en vue de battre un point précis où cette activité se manifeste. Cette pièce est, dès le premier coup, prise sous le feu d’une batterie allemande, dont un projectile tue le commandant du 1er/1 qui surveillait les effets du tir.
Nuit troublée. L’ennemi venant d’Eessen prononce plusieurs attaques sur Dixmude sans toutefois insister.
Un quatrième groisillon, Laurent STÉPHAN, est tué au cours de cette journée.
Au matin du 22, la brigade est disposée comme la veille, mais les compagnies qui sont à la réserve générale et qui viennent de Dixmude sont très éprouvées et très fatiguées. Dès l’aube, le bombardement recommence, moins nourri le matin, très intense de 12 à 13 h, puis cesse. L'après-midi est calme. On en profite pour améliorer les tranchées et pour évacuer des blessés ennemis. On trouve de nombreux tués allemands tombés près des tranchées.
Au nord de Dixmude, les Allemands ont franchi l’Yser dans la boucle de Tervaete, repoussant les troupes belges. Cette division va chercher par une contre-attaque, à jeter les Allemands dans l’Yser. L’Amiral lui offre la collaboration de son artillerie.
La nuit, malgré un bombardement intermittent de Dixmude et des tranchées, est mise à profit pour relever les compagnies des tranchées par les compagnies les moins fatiguées des réserves.
Eugène METAYER (3ème/I, 9ème Cie, 9ème escouade) est blessé dans la journée. Il sera transporté à Dunkerque. Il décèdera de ses blessures à l'hôpital le 24 octobre.
Le 23 octobre, le bombardement se prolonge dans la matinée, devient violent dans l’après-midi; les Allemands utilisent de plus gros calibres. Aux tranchées devant Dixmude, de fréquentes attaques d’infanterie sont repoussées. Dans la boucle de l’Yser, les Allemands résistent aux contre-attaques belges. Ils finissent par occuper toute la boucle malgré le feu de notre artillerie qui a pris cette boucle pour objectif. Des renforts français, la 42ème division d’infanterie du général GROSETTI sont envoyés auprès des Belges. Un détachement d’artillerie lourde vient se mettre à la disposition de la brigade.
Le 26 octobre, les troupes sont très fatiguées et très éprouvées par les journées précédentes, par les combats sans arrêt et sous les feux d’infanterie et d’artillerie lourde.
Vers 19h, la 7ème compagnie du 2ème bataillon qui se rend aux tranchées de l’est, se heurte à des allemands, sur la route d’Eessen, au débouché de Dixmude. Elle l’aborde immédiatement à la baïonnette, tue une quarantaine d’Allemands, tandis que les autres s’enfuient.
Dans la nuit, une colonne allemande réussit à la faveur de l’obscurité et grâce à la fatigue des troupes à pénétrer dans Dixmude sans être aperçue. Elle parvint jusqu’au pont route de l’Yser. La garde de pont reconnut la présence des Allemands, mais seulement après qu’un certain nombre d’entre eux eût franchi le pont (nuit très noire). Le commandant du 1er/I fait ouvrir fit ouvrir le feu et les mitrailleuses du pont eurent bientôt couché par terre la presque totalité des Allemands qui n’avaient pas encore passé le pont. Ceux qui l’avaient franchi furent aperçus au jour dans les prairies, attaqués et faits prisonniers. Le commandant du 1er/II et un médecin trouvèrent la mort dans cette affaire; l’aumônier du 2ème régiment fut blessé.
Le Général D’URBAL commandant le détachement d’armée de Belgique, met à la disposition de la brigade 2 bataillons de Sénégalais (1200 hommes). Les Belges envoient également un bataillon de renfort. Ces bataillons doivent faire la relève des marins qui maintenant occupent à peu près toutes les tranchées extérieures de Dixmude.
Pendant la nuit, les troupes sont totalement réorganisées. A Dixmude, les Sénégalais sont placés dans les tranchées avec un bataillon belge et 2 Cies du 2ème/II. Le reste du 2ème/II est placé sur la rive gauche dans des tranchées près du pont-route. Les rives de l’Yser et le crochet défensif face au nord sont tenus par 11 compagnies (2 du 2ème régiment et 9 du 1er). En réserve de secteur: 4 compagnies. En réserve générale: 5 compagnies très fatiguées et désorganisées. Le 19ème bataillon de chasseurs tient pour le compte de la brigade une ligne de tranchées face à Oud Stuyvekenskerke, au nord du chemin pavé d’Oostkerke à la borne 16 de l’Yser.
A cause des progrès ennemis sur la rive gauche de l’Yser, l’artillerie lourde est déplacée et va se mettre en batterie à l’ouest de Lampernisse et à la ferme Bien-Acquis. L’artillerie de campagne belge est de moins en moins nombreuse. Les pièces qui tirent l’obus de 75 français qui n’est pas fait pour elles se dégradent, et ces pièces sont retirées une à une et envoyées en réparation sans être remplacées.
Le poste de commandement est déplacé à la croisée des routes à l’ouest de Caeskerke, la gare étant devenue intenable.
Le 27 octobre à 8 h, le bombardement reprend. Il devient très intense entre 12 et 15h, et se fait particulièrement sentir sur les ponts de Dixmude et les tranchées sud de la ville (cimetière). Les pertes sont sensibles. Les tranchées atteintes par le bombardement sont démolies.
Laurent DERRIEN est tué ce jour là.
La nuit sera calme. On en profite pour faire refaire et améliorer les tranchées et pour continuer à remettre de l’ordre dans les bataillons.
Le 31 octobre, l’ennemi est repoussé de Ramscapelle par la 42ème division avec de grosses pertes. Au nord de Dixmude, il paraît se retirer sur l’Yser, chassé sans doute par l’inondation qui progresse légèrement.
Sur Dixmude, le bombardement diminue d’intensité. Plus d’attaques d’infanterie sur les tranchées de la ville.
Au sud sud-est, on entend toujours une violente canonnade.
La nuit est calme.
Le 1er novembre, la journée est relativement tranquille. L’Amiral donne l’ordre de remettre de l’ordre dans les régiments et les bataillons. Le 3ème/I relève le 19ème bataillon de chasseurs au nord du chemin Costkerke, borne 16 de l’Yser.
La situation de la brigade est la suivante:
* A Dixmude, le 2ème/II, les sénégalais et un bataillon belge
* Sur l’Yser, le 1er/I au nord du Pont-route, le 3ème/II au sud du Pont route.
* Sur le front nord, le 3ème/I
* Dans les tranchées extérieures de Caeskerke, en réserve, le 2ème/I
* En réserve générale, le 1er/II (avec un nouveau commandant).
L’Amiral porte son quartier général à Oudecapelle où il fait installer les communications téléphoniques; son poste de commandement reste à la croisée des routes.
Le 5 novembre, l’offensive de la 42ème division terminée, le 1er/II est reporté immédiatement à la réserve générale.
A Dixmude, la journée se passe dans une tranquillité relative, mise à profit pour procéder à une nouvelle répartition permettant la relève des unités sur le front.
* A Dixmude, le 2ème/II, 2 compagnies dans les tranchées, 2 compagnies en réserve, le 3ème/I, un bataillon de Sénégalais réduit à 600 hommes et un bataillon belge.
* Sur L’Yser, au nord du Pont de route, le 1er/I et au sud du Pont, le 3ème/II
* Front nord et à Caeskerke, le 2ème/I et un bataillon de Sénégalais.
* En réserve générale, le 1er/II.
La nuit est calme et le brouillard tombe.
Le 6 novembre, le repli de la 42ème D.I. se fait sans incidents et la brigade se trouve de nouveau seule à Dixmude. La division laisse toutefois 1 groupe de 2 batteries de 75 à la disposition de la brigade (3 à de Kapelhoek et 4 à la gare de Caeskerke). L’artillerie belge ayant été retirée pour cause de réparations, il ne reste plus que 14 pièces en état de tirer, sur les 72 du début.
A Dixmude, les Allemands ont ramené leurs grosses pièces avec lesquelles ils reprennent un bombardement assez intense de la ville et de ses tranchées, des tranchées de l’Yser et du terrain en arrière. Sur le soir, une attaque d’infanterie allemande sur le cimetière est repoussée.
La nuit est calme et le brouillard épais.
Le 8 novembre, les allemands attaquent plusieurs fois le cimetière au sud de la ville. Ils sont repoussés. La ville subi de violents bombardements toute la journée. Le tir des allemands est dirigé avec une grande précision sur les tranchées du cimetière et de l’Yser et sur l'artillerie lourde placée vers Oudecapelle. Deux aéroplanes et un drachen ballon comme d’ailleurs presque tous les jours, dirigent ces tirs. Les pertes sont importantes
Le 3ème/II, remplace le 2ème/II à la défense de la ville de Dixmude. Il prend la défense de la rive de l’Yser au sud du Pont-route.
Pendant la nuit, un groupe d’artillerie belge (12 pièces) vient relever ce qui reste de l’artillerie de campagne mise à la disposition de l’amiral et dont l’effectif est tombé à 14 pièces. Ordre est donné à ces 14 pièces de laisser toutes leurs munitions aux batteries de remplacement. Ces batteries reçoivent l’ordre d’installer une batterie vers de Kappelhoek et 2 entre les bornes 22 et 23 du chemin de fer Dixmude – Furnes.
Le 9 novembre, dès le matin, la fusillade allemande reprend contre les tranchées de Dixmude et ainsi que le bombardement pendant toute la journée, auquel l'artillerie répond. Mais nous manquons d’éléments d’appréciation de son tir.
Les batteries de campagne nouvellement installées exécutent des tirs sur des points indiqués, en vue de déterminer les éléments qui leur sont nécessaires pour ouvrir rapidement le feu sur tel point qui leur serait indiqué, et en particulier sur les tranchées allemandes très rapprochées des nôtres.
Deux groisillons, Yves Benoit SALAHUN et Théodore METAYER, sont blessés au cours de cette journée (ou de la précédente). Ils sont évacués sur l'hôpital militaire anglais implanté à Furnes (Veurne). ils décèderont tous les deux le 10 novembre
Le 10 novembre, un bombardement violent com-mence dès le matin, principalement sur les fronts est et sud de Dixmude et sur la rive gauche de l’Yser, notamment sur le cimetière qui devient vite intenable. L’artillerie de campa-gne, l’artillerie lourde de la défense répondent, mais sans grand résultat apparent. A 11h30, le bombardement des tranchées redouble. C’est l’attaque brusquée.
A 13h, l’infanterie ennemie marche sur les tranchées de Dixmude plus ou moins démolies et en tout cas neutralisées. Elle s’empare d’une partie de ces tranchées, de celles qui sont immédiatement au sud de la route d’Eessen et pénètre dans l’intérieur de la défense, prenant en écharpe et à revers les autres tranchées qui sont les unes après les autres évacuées. Une vive fusillade éclate partout en ville où l’ennemi a pénétré avec une rapidité surprenante, encore inexpliquée.
Du côté nord, la 9ème Cie du 3ème/I , est attaquée de flanc et de revers. Le commandant du bataillon, présent, est tué, la section faite prisonnière avec le commandant de la 9ème Cie qui est blessé. Après l'avoir désarmée, l’ennemi pousse ce qui reste de la compagnie vers l’Yser, ordonnant aux officiers d’inviter les tranchées de l’Yser à se rendre. Mais une contre-attaque lancée par le commandant de la défense et exécutée par la 1ère Cie (1er/I) fait fuir les allemands, ce dont les hommes de la 9ème Cie profitent pour traverser l’Yser à la nage avec et pour rendre compte à l’amiral de ce qui se passe (16 h).
Le reste du 3ème/I, avec la 11ème Cie, placé dans les tranchées de la route de Beerst, est attaqué de front, de flanc, et à revers. Ils se maintiennent jusqu’à la nuit, puis rallient les ponts de Dixmude après avoir souffert de difficultés considérables pour cheminer sous le feu de l’ennemi, dans les fossés pleins d’eau. Le commandant de la 11ème peut ainsi ramener à la brigade 450 hommes épuisés et presque tous dépourvus d’armement et d’équipement.
Dans Dixmude même, le commandant du 3ème/II fait occuper par la 8ème Cie, puis par une section de la 5ème Cie du 2ème/II, la barricade établie au passage à niveau de la route d’Eessen, mais il se voit forcé d’ordonner la retraite, à un moment où la situation est intenable et où l’évacuation est rendue fort dangereuse par la fusillade que les allemands dirigent des fenêtres des maisons en ruines.
Il envoie alors une compagnie de renfort (5ème Cie du 2ème/II), vers le passage à niveau du chemin de fer, et les voies aboutissant au Pont-route au nord, à l’est et au sud où elles servent de repli. Cette manœuvre permet en outre de sauver de nombreux blessés.
A 16h30, la situation est des plus confuses. Les actes d’héroïsme relevés sont nombreux; ils ne peuvent aboutir à la conservation de la ville, et l’amiral décide d’abandonner Dixmude et de mettre tout en œuvre pour arrêter les progrès de l’ennemi à l’Yser.
A 17h, la ville est prise, l’amiral fait sauter les ponts. L’artillerie lourde de la défense reçoit l’ordre de bombarder à son tour Dixmude, pour en rendre l’occupation intenable. Le feu est mis à la minoterie. La décision de bombarder Dixmude était des plus pénibles, parce que la ville contenait certainement beaucoup de blessés alliés, mais elle était nécessaire pour le maintien du front de l’Yser, à une heure où le moral de nos troupes pouvait être fortement ébranlé. Les pertes sont considérables, le commandant du 2ème/I est tué, le commandant du 2ème régiment est blessé (Il est remplacé dans le commandement de son régiment par le commandant du 3ème/II).
De la garnison de Dixmude, il ne revient que 200 Sénégalais, 200 Belges, 500 marins et quelques officiers.
La perte de Dixmude est due à différentes causes:
1 - L’artillerie de campagne de la défense était, malgré les réclamations réitérées de l’amiral, tombée à 19 pièces.
2 - Douze de ces pièces, étaient sur leurs emplacements de combat depuis la veille et leurs chefs ne connaissaient pas encore suffisamment les terrains à battre.
3 - L’approvisionnement en munitions de toute l’artillerie (campagne et lourde) était insuffisant. La batterie de 75 placée à la gare de Caeskerke a dû se retirer du combat, ses coffres étant vides.
4 - L’artillerie lourde n’avait pas l’efficacité désirable, aucun moyen d’observation des effets du tir n’ayant été mis à sa disposition.
5 - Les hommes étaient fatigués. Il y a eu surprise.
6 - L’offensive de la 42ème division avait laissé en avant de nos lignes, et à 200 m environ des tranchées auxquelles les allemands ont pu arriver par des boyaux de communication profonds, et d’où ils sont partis à l’attaque du côté d’Eessen. Ces nouvelles tranchées n’avaient pas été occupées par nos troupes, à cause de l’impossibilité d’augmenter notre front.
7 - Les Allemands avaient peut-être fait des travaux souterrains dans le secteur sud-est de la ville leur permettant d’arriver aux caves des premières maisons de Dixmude (non vérifié).
8 - Attaque brusquée et bien menée.
A 18h, les renforts arrivent: 14 compagnies de la 5ème division belge et des unités de la 6ème division belge; pour l'artillerie de campagne deux groupes de 75 français (24 pièces) et 4 batterie de 75 belges et pour l'artillerie lourde un ravitaillement de 3000 coups et 2 groupes d’obusiers belges de 120. La réorganisation des bataillons commence aussitôt.
Trois groisillons sont morts au combat durant cette journée Félix Marie LE PADELLEC, Pierre Laurent RAUDE et Elysée Pierre STÉPHANT.
Le 11 novembre, tous les efforts sont faits pour empêcher l’ennemi de se servir de Dixmude. Le front de l’Yser est solidement tenu. Un canon de 37 y est placé, des abris sont construits. Une pièce de 75 est amenée à proximité. L’artillerie lourde de la défense tire sans relâche sur Dixmude et sur ses abords, de multiples incendies se déclarent dans la ville.
Les Allemands répondent par un bombardement violent des tranchées de l’Yser qu’ils prennent en écharpe, et des terrains en arrière. Ils n’essaient pas de déboucher de Dixmude, par contre, ils montrent beaucoup d’activité dans les marais au nord de la ville. Le soir, une courte fusillade a lieu sur le front nord Yser.
Une violente tempête a lieu toute la nuit.
La situation des troupes de la brigade est la suivante :
* les 1er/I et 2ème/II sur l’Yser face à l’est;
* le 2ème/I (3 compagnies seulement) le front nord de la rive ouest (l’autre compagnie est en réserve générale)
* le 1er/II en soutien.
* les 3ème/I et 3ème/II au repos.
* les Sénégalais réduits à 600 h sont mis au cantonnement à Caeskerke. Ils sont pratiquement inutilisables. Les Belges qui étaient à Dixmude sont reportés en arrière, à Oostkerke.
Les renforts d’infanterie belge sont disposés comme suit :
* 2 compagnies à Kappelhoek
* 1 bataillon de chasseurs réparti dans les fermes avoisinant la route Dixmude – Oudecapelle
* 1 bataillon de ligne à la réserve générale
* 1 bataillon de chasseurs à l’est d’Oostkerke.
* une compagnie de Génie belge exécute des travaux d’amélioration de la position de repli.
Le 14 novembre à partir de 7 h, reprise des bombardements violents et systématiques de tous les pâtés de maisons de la rive ouest, des routes et de notre artillerie lourde. Un de nos 220 est culbuté et son frein mis hors d’usage. L’artillerie de campagne française est soumise à un bombardement prolongé et réglé. Les groupes placés sur la route d’Oudecappelle et à Saint-Jacques Cappelle souffrent beaucoup.
Les maisons de la route Dixmude–Caeskerke, épargnées jusqu’ici, et où se trouvent les états-majors des deux régiments, sont détruites.
Il n'y a pas d’attaque d’infanterie.
Le 15 novembre, le G.Q.G. belge, ayant décidé de tenter une inondation sur la rive est de l’Yser, le Génie belge, avec l’aide des marins, fait sauter l’éclusette au sud de la borne 16 pour déterminer une inondation sur cette rive, un peu au nord de Dixmude.
Les tranchées de l’Yser sont très éprouvées, étant prises en écharpe par la grosse artillerie ennemie. L’artillerie allemande recherche les batteries de Caeskerke et d’Oudecappelle.
Dans la soirée, des ordres arrivent pour la relève de la brigade par des unités de la 89ème division territoriale.
Le 12 novembre, toute la journée jusqu’à 17 h, le bombardement intense des tranchées et des routes recommence. Quelques tranchées de l’Yser au sud du pont sont démolies.
Aucune attaque d’infanterie, mais on aperçoit des mouvements de troupes notamment entre le moulin et l’hôpital Saint-Jean, puis à la hauteur de la route de Beerst et dans le Beerst-Bloot.
L’artillerie lourde de la défense ainsi que l’artillerie de campagne bombardent sans relâche Dixmude et ses abords.
Les 3ème/I et 3ème/II sont reconstitués à 3 compagnies et placés à la réserve générale.
La nuit est calme.
Le 13 novembre, dès 7 h, le bombardement recommence auquel notre artillerie répond, avec succès, semble-t-il. De 9 à 10 h, on observe une fusillade assez nourrie sur le front sud.
A Dixmude, les Allemands installent des mitrailleuses dans les maisons de la rue du Pont-route. L’artillerie lourde tire sur ces maisons, les détruit ou les rend intenables.
Le 16 novembre, l’inondation de la rive est commence. Les Allemands reprennent le bombardement des maisons de la rive ouest et cherchent à atteindre nos batteries. Ils détruisent et incendient, à Oudecappelle, le Q.G. de la brigade qui est obligé de se reporter un peu en arrière (ferme Inn Den Raablar sur la route d’Oudecappelle – Forthem).
Les ordres pour la relève sont donnés. Cette relève s’exécute sans difficulté entre 19 et 20h. La brigade vient cantonner à Pollinchove et à Hoogstade.
Elle a perdu plus de la moitié de son effectif. L'effectif initial au début septembre était de 6.585 hommes Deux groupes de renfort ont été amenés, le premier en octobre de 1.414 hommes et le second en en novembre de 1.181 soit au total 9.180 marins. Au lendemain de la bataille de Dixmude, l'amiral RONAC'H indique que la brigade ne dépasse pas 5.000 hommes, soit plus de 4.000 marins mis hors de combat dont près de 1.000 morts. Neuf groisillons sont de ceux-là.
La brigade est ramenée sur l’Yser à la fin de novembre.
Le 8 décembre, la brigade est placée dans un groupement qui comprend en outre les 87ème et 89ème Division Territoriale, et la 7ème Division de Cavalerie. La mission de ce groupement est de tenir la ligne du canal de l’Yser entre le pont de Knocke jusqu’où s’étend l’armée belge et la passerelle située sur le canal de l’Yser, à 400 m au sud du pont de Steenstraat où doit venir se souder la gauche du 20ème C.A.
La brigade tient la droite; elle doit, dans ces conditions, étendre encore son front vers la droite jusqu’à la passerelle sud de Steenstraat. Par contre, au nord, le front de défense qui lui incombe ne va plus que jusqu’à la passerelle Nord de Steenstraat, cette passerelle incluse.
La tête de pont de Steenstraat, par où débouche la route de Dixmude, se trouve donc dans la part de la brigade.
La nuit est calme
Le 10 décembre, journée calmes. L’Amiral en profite pour poursuivre l’amélioration du secteur et le développement du réseau téléphonique.
La fatigue des hommes est considérable. Sur 20 compagnies, la brigade a 14 compagnies (et 4 sections de mitrailleuses), dont 8 depuis 5 jours, au travail sur le front.
Le temps continue à être pluvieux et les tranchées sont en mauvais état et remplies de boue.
Le 16 décembre " Par ordre du général commandant la 8ème Armée et en vue de favoriser les progrès réalisés par nos troupes dans la région du littoral, le détachement HELY D'OISSEL et le 20ème C.A. doivent attaquer, demain, au point du jour, le 1er le carrefour ouest de Bixschoote, le 2ème le bois triangulaire et Korteker Cabaret." Pour cette attaque, le général désigne la brigade de Marins à laquelle il envoie un renfort d’une batterie d’artillerie (batterie à cheval A.D.C.) et une compagnie cycliste.
Les dispositions prises par l’Amiral pour cette attaque :
Toute l’artillerie appuiera l’attaque, ouverture du feu, 6h40.
Le premier objectif d’attaque sont les tranchées allemandes en avant de Steenstraate.
Le directeur des attaques sera le commandant du 1er régiment
Les troupes d’attaque sont les suivantes
* le 1er/I à la tête duquel périra le C.F. Gabriel GEYNET
* la compagnie cycliste
* deux sections de mitrailleuses
qui seront placées pendant la nuit à leurs emplacements de départ pour l’attaque. L’attaque par les marins et les cyclistes commencera à 6h40; deux compagnies de marins débouchant par la passerelle nord, une compagnie de marins et la compagnie de cycliste par le pont de Steenstraate.
Les troupes de soutien éventuel seront le 3ème/II qui sera formé avant le jour, à l’abri des vues, sur le plateau à l’ouest de Kemmelbeck. Les troupes de la défense du front aideront l’attaque par leurs feux. En tous cas, la ligne du canal de l’Yser doit rester inviolable.
La nuit du 20 au 21 décembre est calme. Le 21 décembre dans la matinée, des avions allemands survolent encore les lignes. Les lignes arrières subissent un bombardement assez intense de l’artillerie allemande qui cherche nos batteries.
Le groupement H.O. et la 20ème C.A. doivent reprendre l’offensive sur les objectifs indiqués pour l’attaque du 17. Cette attaque doit avoir le 22 avant le jour. C’est encore la brigade qui reçoit la mission d’attaquer la grande tranchées allemande située en travers de la route Steenstraate–Dixmude à 500 m environ de Strenstraate en lien avec la 11ème D.I.
En vue de cette attaque, l’Amiral ordonne :
* au 2ème/I avec 2 sections de mitrailleuses chargé de l’attaque, de se porter demain pour 6h dans les tranchées du nouveau front, face à l’objectif d’attaque.
* au 2ème/II de se porter demain pour 6h30 en réserve, à l’abri des vues, sur le plateau ouest du Kemmelbeck.
* au commandant du 1er régiment de prendre la direction des attaques.
La nuit est calme. de nombreuses fusées éclairantes alleman-des illuminent le champ de bataille.
Pendant la période du 15 au 31 décembre, le 1er/II est détaché vers Nieuport, et il a pris part à l’offensive du Corps de Mitry sur Lombartzyde et Saint-Georges.
Ce bataillon, avec un groupe de cyclistes, eut pour mission de s’emparer de Saint-Georges. L’opération sur Saint-Georges était particulièrement délicate et difficile, les prairies inondées ne laissant comme terrain à la disposition de l’attaque que 2 digues et une route. Cette opération se termina par la prise et l’occupation de Saint-Georges.
L’attaque fut conduite méthodiquement, prudemment, en consolidant chaque jour les points conquis. Le village de Saint-Georges fut pris d’assaut le 29 décembre par la 3ème Cie de marins qui fit une cinquantaine de prisonniers et qui, aidé d’escadrons de cavalerie à pied, de la 4ème Cie de marins puis de la 2ème compagnie finit par s’installer à l’est du village et par s’y organiser défensivement. Par la suite les contre-attaques allemandes lancées pour reprendre le village ont échoué.
Le dixième groisillon, Jean-Marie TONNERRE, fut évacué dans les derniers jours de décembre pour raison de maladie (fièvre typhoïde) sur un hôpital de Dunkerque où il décèdera le 4 janvier 1915.
Le 17 décembre, l’attaque commence comme prévue, toutefois, les cyclistes sont remplacés par la 10ème Cie du 2ème régiment.
L'attaque débouchant de la passerelle nord (1ère et 4ème Cie du 1er régiment) est accueillie par un feu nourri venant des tranchées allemandes organisées en avant. Elle gagne 150 m à l’est du canal, mais ne peut progresser davantage.
L'attaque débouchant du pont de Steenstraate et de la passerelle doit commencer par la droite (2ème du 1er régiment et 10ème du 2ème régiment) en liaison avec l’attaque menée par la 11ème division d’infanterie. Ces compagnies s’avancent d’abord sans trop de peine, s’emparent d’une première tranchée allemande, y font 30 prisonniers et capturent 2 mitrailleuses. Poussant plus avant leurs progrès, les compagnies prennent une autre tranchée ennemie (en forme de redan), dans laquelle elles font encore une trentaine de prisonniers.
Malheureusement, au centre, la 3ème Cie dirigée par le commandant du bataillon en personne, débouchant par la route de Dixmude avant que les progrès de l’attaque de droite soient suffisants, est presqu’aussitôt prise de front et en écharpe par des feux puissants d’infanterie et de mitrailleuses qui la déci-ment. Le commandant du 1er/I est tué.
La 3ème compagnie du 1er régiment est aussitôt remplacée par la 9ème du 2ème régiment qui se déploie prudemment et, en établissant une liaison avec les 10ème du 2ème régiment et 2ème du 1er régiment, permet à ces dernières compagnies de maintenir leur avance et de consolider leur situation, car il n’est pas possible de progresser davantage. En avant de ces compagnies, à 4 ou 500 m, une fusillade nourrie part d’une grande tranchée allemande. Cette tranchée précédée d’un réseau de fils de fer ne paraît pas susceptible d’être enlevée sans être préala-blement battue par une puissante artillerie dont on ne peut obtenir le concours avant la nuit.
A la nuit, l’Amiral ordonne :
* d’organiser défensivement le front. Il demande 6000 sacs de terre pour faire un parapet. On ne peut, en effet, creuser suffisamment le sol, car on trouve l’eau à 50 cm et de le relier avec les troupes voisines du 20ème C.A.
* d’occuper ce front avec la compagnie cycliste, la compagnie 11ème Cie du 2ème régiment et la 6ème Cie du 2ème régiment
* aux 3ème/I et 2ème/I de conserver leurs positions sur les rives du canal de l’Yser et la tête de pont de Steenstraat
* au 2ème/II moins la 6ème Cie, de rester en réserve de secteur, sur le plateau à l’ouest de Kemmelbeck
* enfin, aux 1er/I et 3ème/II de rester dans les cantonnements de Boschhoek.
Ces mouvements s’exécutent sans incident pendant la nuit qui est calme, les Allemands se contentant de lancer de nombreuses fusées éclairantes.
L’offensive du 17 décembre a pour résultat la prise sur les Allemands de 2 ou 300 mètres de terrain. Malheureusement elle coûte très cher à la brigade, les 1er/I et 3ème/II sont très épuisés. Les pertes en officiers sont considérables.
Le 22 décembre, les bataillons désignés se portent à leurs emplacements. De 6h30 à 6h40, tir violent de préparation par toute l’artillerie du secteur sur la grande tranchée allemande. A 6h45, l’artillerie allonge son tir et le 2ème/I se porte à l’attaque :
* la 8ème Cie attaque de front, sa gauche appuyée à la route Steenstraate–Dixmude.
* les 5ème et 7ème Cies se déploient en dehors, de manière à prendre à revers, car on croyait, d’après des photographies prises en avion, que la tranchée allemande formidablement défendue sur son front, n’était qu’un élément de tranchée interrompu vers le S.E. et pouvait par suite être tournée.
- la 6ème Cie est maintenue en réserve sur le chemin de halage, rive droite du canal.
Dès le début de l’attaque, la 8ème Cie est prise par une fusillade violente. Elle est obligée de s’arrêter, elle se couche dans un fossé à demi plein d’eau et ne pourra plus bouger de la journée. Les 5ème et 7ème progressent d’abord sans trop de difficultés, puis se trouvent tout à coup sous des feux violents de front et de flanc. Elles arrivent quand même sur des réseaux de fils de fer organisés en avant de la tranchée ennemie, mais ne peuvent en venir à bout. A ce moment, elles flottent, et sont ramenées en arrière, dans les tranchées de départ.
L’insuccès de cette attaque tient à diverses causes :
* la grande tranchée est formidable. Elle est d’un fort relief. Elle n’est pas interrompue; elle se prolonge au contraire sans interruption vers Bixschoote, ce qui a permis aux Allemands de prendre d’écharpe les 5ème et 7ème compagnies.
* elle est précédée d’un réseau épais de barbelés de 20 m.
* les marins ne possédaient pas les engins nécessaires pour venir à bout de cette défense.
* l'artillerie, quoique ayant bien réglé son tir, n’a obtenu aucun résultat, le parapet n’a pas paru endommagé; de plus, dès qu’elle a cessé le feu, les Allemands, probablement à l’abri jusque-là, ont immédiatement garni la tranchée.
* enfin, nos pertes eussent été moins lourdes si l’on avait pu doter les marins de boucliers.
A la nuit, l’Amiral fait rentrer le 2ème/I qui est très éprouvé, et ordonne la relève du 3ème/I par le bataillon le 2ème/II régiment) et la 3ème compagnie du 1er régiment (70 fusils). Les autres bataillons rentrent au cantonnement.
Le 24 décembre, les effectifs de la brigade fondent, le nombre des malades, des éclopés, des exempts de service croissant de jour en jour.
Dans la nuit du 30 au 31 décembre, la brigade est relevée en envoyée au repos. Fortement éprouvée par les fatigues et les pertes subies au cours des mois d’octobre, novembre et décembre, elle va se réorganiser.
Le 11 janvier 1915, le Président de la République passe en revue la brigade, et fait la remise du drapeau. La garde en est confiée au 2ème régiment, dont le commandant est plus ancien de grade que le commandant de 1er régiment.
(Extrait du journal officiel du vendredi 15 janvier 1915)
Le Président de la République... est arrivé lundi matin à 3h à Dunkerque. Il s’est aussitôt rendu sur le terrain où était réunie la brigade des Fusiliers marins en armes et il a remis à ces troupes, dont on connaît l’attitude héroïque dans les combats de l’Yser, le drapeau récemment conféré aux formations de marins à terre et qui porte l’inscription «Régiments de marins».
En présentant le drapeau aux troupes, M. POINCARÉ a prononcé l’allocution suivante :
«Fusiliers marins, mes amis,
Le drapeau que le Gouvernement de la République vous remet aujourd’hui, c’est vous-mêmes qui l’avez gagné sur les champs de bataille. Vous vous êtes montrés dignes de la recevoir et capables de le défendre. Voilà de longues semaines ... (que) vous soutenez victorieusement ..., la lutte la plus âpre et la plus sanglante. Rien n’a refroidi votre ardeur, ni les difficultés du terrain, ni les ravages qu’a d’abord fait parmi vous le feu de l’ennemi, rien n’a ralenti votre élan, ni les gelées, ni les pluies, ni les inondations. ... partout vous avez accompli... des prodiges d’héroïsme et d’abnégation.
Le drapeau que je vous confie représentera désormais, à vos yeux, la France immortelle, la France c’est-à-dire vos foyers, le lieu où vous êtes nés, les parents qui vous ont élevés, vos femmes, vos enfants, vos familles et vos amis, tous vos souvenirs,... Mes amis, ce sont les plus lointaines destinées de la Patrie et de l’humanité qui s’inscrivent, en ce moment, sur le Livre d’Or de l’Armée française. Notre race, notre civilisation, notre idéal, sont l’enjeu sacré des batailles que vous livrez... En conduisant ce drapeau à la victoire, vous ne vengerez pas seulement nos morts, vous mériterez l’admiration du monde et la reconnaissance de la postérité. Vive la République, Vive la France.»